Si l’année 2024 a connu une baisse des prix des matières premières alimentaires par rapport à 2023, selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’année qui commence s’annonce incertaine.
Les aléas climatiques et les orientations de la politique douanière américaine que cherche à imposer Donald Trump pèseront en effet lourds sur le marché des produits agricoles.
Ce sera en somme l’incertitude en 2025. Les pays importateurs de biens alimentaires et les gros industriels agroalimentaires sont appelés a suivre minutieusement l’évolution des marchés pour planifier leurs achats. Ainsi, après la guerre entre la Russie et l’Ukraine, qui a induit une flambée consécutive des cours des engrais, du blé ou du tournesol, les prix mondiaux sont revenus à la baisse.
Fin 2024, l’enjeu géopolitique s’est largement effacé au profit d’un «retour des fondamentaux» animant les marchés agricoles : la météo et les taxes, relève Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France, cité par l’AFP. «Le marché s’est habitué au conflit russo-ukrainien, les primes de risque se sont dégonflées» et le prix de la céréale du pain «s’est détendu», souligne l’analyste. Cependant, si le risque géopolitique s’est un peu tassé en mer Noire, les facteurs climatiques ont toujours leur impact sur les marchés agricoles.
Il y a eu, pour rappel, en 2024 un pic des prix du blé en mai, la plus forte variation de l’année. Une hausse liée «essentiellement à des craintes pour la future récolte russe», après des épisodes de gel et de sécheresse dans les plaines de la Volga et du Sud, selon l’analyste. Aussi, la récolte 2024 de blé a été marquée par le repli de la production en Europe de l’Ouest, notamment en France, où la moisson a chuté de près de 30% du fait de l’excès d’eau et du manque d’ensoleillement réduisant ainsi les exportations de blé français à leur plus bas niveau depuis 1995.
Ce qui «a contribué au renforcement de la position dominante des blés originaires de la mer Noire (russes, ukrainiens, roumains), qui ont largement compensé la baisse de l’offre ouest-européenne sur la scène internationale», rappelle Gautier Le Molgat. Cela pour dire que 2025 commence avec des perturbations mais surtout des incertitudes, notamment sur les stocks avec «des stocks de blé plus faibles chez les grands exportateurs», Russie en tête.
Dans ce cadre, faudrait-il souligner que les exportations russes de blé s’annoncent largement en baisse dans les prochains mois, pour atteindre environ 43 millions de tonnes en 2024-25, contre plus de 55 millions de tonnes lors de la campagne précédente, selon un cabinet russe. En attendant les récoltes, prometteuses, d’Australie et d’Argentine, les prix mondiaux du blé sont lestés par l’offre russe, abondante et peu chère. C’est également l’abondance de la production de maïs et de soja aux Etats-Unis, et celle attendue au Brésil, qui a pesé sur les prix.
Mais au-delà des conditions de culture et des aléas climatiques, les marchés seront particulièrement attentifs à l’arrivée de l’administration Trump en janvier. Le nouveau président américain a fait des droits de douane la pierre angulaire de sa politique commerciale, évoquant l’imposition d’une surtaxe allant de 10 à 20% sur l’ensemble des produits étrangers entrant aux Etats-Unis, et promettant d’aller jusque 60% pour ceux provenant de Chine – premier acheteur du soja américain.
Si le maïs américain pourrait être affecté par une hausse des droits de douane et délaissé au profit du grain jaune brésilien, le soja suscite le plus d’inquiétudes, selon les spécialistes du marché. Ces derniers prévoient que la Chine continue à réduire ses achats de soja américain et jugent la demande pour la graine américaine «très incertaine» en 2025. L’enjeu majeur pour le maïs, dont plus d’un tiers de la production américaine est convertie en bioéthanol, sera la politique choisie par la nouvelle administration concernant les agrocarburants.