En attendant une rencontre entre Joe Biden et Xi Jinping : Le ministre des Affaires étrangères chinois demain à Washington

25/10/2023 mis à jour: 06:07
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Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, et le chef de la politique étrangère du Parti communiste chinois, Wang Yi

Le ministre des Affaires étrangères chinois, Wang Yi, entamera une visite demain aux Etats-Unis. 
Cette visite qui s’étend jusqu’à samedi intervient après l’annonce par Pékin hier d’une vaste réorganisation ministérielle, révoquant notamment son ministre de la Défense, Li Shangfu, et écartant son ex-chef de la diplomatie, Qin Gang, qui conservait toujours un titre au gouvernement, sans justifier jusque-là ces changements.
 

Le rapprochement sino-russe, la guerre en Ukraine et celle entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas devraient prendront une part importante dans les discussions avec son homologue américain Antony Blinken.

Pour Washington, la rencontre avec Wang Yi sera l’occasion d’inciter Pékin à avoir «une approche plus constructive» dans ces deux conflits et au-delà, a indiqué un haut responsable américain sous le couvert de l’anonymat. 

De son côté, Pékin a confirmé hier les dates de la visite et exprimé le souhait que celle-ci permette aux relations entre les deux pays de reprendre «le droit chemin». Le ministre des Affaires étrangères chinois a prévu des «échanges de vues approfondis avec les dirigeants américains sur les relations entre la Chine et les Etats-Unis et sur les questions internationales et régionales d’intérêt commun», a ajouté la porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois, Mao Ning, lors d’une conférence de presse. Comme il «exprimera les principes et les positions de la Chine et ses préoccupations légitimes concernant les relations entre la Chine et les Etats-Unis», a-t-elle affirmé. 

Pékin espère que Washington travaillera avec la Chine pour «renforcer la communication et le dialogue, accroître la coopération et gérer les différences, et remettre par des efforts conjoints, les relations entre la Chine et les Etats-Unis sur le droit chemin d’un développement sain et stable», a ajouté la porte-parole.
 

Il s’agit de «poursuivre nos efforts visant à maintenir des canaux de communication ouverts» avec Pékin et à «gérer notre compétition de façon responsable», a déclaré à la presse un autre haut responsable américain en annonçant la visite.

La visite du chef de la diplomatie  chinoise pourrait servir à préparer celle de Xi Jinping aux Etats-Unis, qui pourrait se tenir en marge du prochain sommet des pays de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec) à San Francisco à la mi-novembre. Le président américain Joe Biden a exprimé à plusieurs reprises son «espoir» d’une prochaine rencontre avant la fin de l’année, alors que leur dernier entretien en tête-à-tête remonte au sommet du G20 à Bali, en novembre 2022. 

Contacts multipliés

Les relations entre Pékin et Washington ont connu des tensions qui sont monté d’un cran avec le survol par un ballon chinois du territoire américain en début d’année. En juin, Joe Biden a déclaré que Xi Jinping  appartient à la catégorie des «dictateurs». 
 

Les Etats-Unis activent pour le renforcement de leurs alliances en Asie, que Pékin considère n’être autre qu’une volonté «d’endiguement» et d’«encerclement» de la Chine. Ces derniers mois, les Etats-Unis ont reçu à Washington, pour une visite d’Etat, le Premier ministre indien Narendra Modi, tenu un sommet trilatéral à Camp David avec les dirigeants japonais et sud-coréens, et renforcé des alliances de défense avec les Philippines et des îles du Pacifique. Le président Biden a effectué une visite au Vietnam et recevra en grande pompe aujourd’hui à la Maison-Blanche le Premier ministre australien Anthony Albanese. 

Le président américain réclame par ailleurs au Congrès 7,4 milliards supplémentaires pour tenir tête à la Chine, sur le plan militaire et économique. En outre, les Etats-Unis ont mis en place ces dernières années plusieurs mesures pour restreindre l’accès des entreprises chinoises à certaines technologies américaines ou compliquer leur fabrication de semi-conducteurs de pointe. 

Cependant, les deux premières puissances économiques mondiales ont multiplié ces derniers mois les contacts pour du moins créer un climat d’apaisement pour gérer leurs différends. Contacts marqués  par une succession de visites de hauts responsables américains à Pékin, dont le chef de la diplomatie, Antony Blinken, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, et récemment une délégation de sénateurs américains, menée par le chef de la majorité au Sénat, Chuck Schumer.
 

Lors de sa visite en juin en Chine, Antony Blinken a indiqué qu’il n’est pas dans l’«intérêt» de son pays «de fournir à la Chine des technologies qui pourraient être utilisées contre nous». «Alors qu’elle développe de manière très opaque son programme d’armes nucléaires, qu’elle produit des missiles hypersoniques, qu’elle utilise la technologie à des fins répressives, en quoi est-il dans notre intérêt de fournir ces technologies spécifiques à la Chine ?» s’est-il demandé.
 

A l’occasion de son déplacement en Chine en juillet, Mme Yellen a déclaré que les Etats-Unis vont continuer de mener «des actions ciblées», motivées par de simples considérations de «sécurité nationale». «Nous ne les utilisons pas pour obtenir un avantage économique.»
 

Guerre des puces et recherche de zones d’influence 

De son côté, la Chine a annoncé le 31 mars dernier l’ouverture d’une enquête contre le groupe américain Micron, quatrième fabricant mondial de semi-conducteurs, pour des raisons de sécurité nationale. Pékin a indiqué ne plus vouloir de ses produits chez les opérateurs d’infrastructures dites «sensibles» en Chine. En mai, Pékin a appelé les entreprises chinoises traitant des données sensibles à arrêter d’acheter des puces mémoires dudit groupe. 
 

Dans une déclaration officielle, l’administration chinoise chargée de la cybersécurité a estimé que les produits de Micron «présentent des problèmes potentiels pour la sécurité des réseaux relativement sérieux, ce qui pose un problème majeur à la sécurité des chaînes d’approvisionnement (…) et affecte la sécurité nationale de la Chine».
La Chine a imposé depuis le 1er août des restrictions aux exportations de deux métaux indispensables aux semi-conducteurs et dont elle est le principal producteur. 

Selon une directive du ministère du Commerce, les exportateurs chinois de gallium et de germanium doivent obtenir une licence. Ils devront fournir des informations sur le destinataire final et en notifier l’utilisation, précise ce document de juillet. La décision est perçue comme des représailles aux mesures prises par Washington à l’encontre de son secteur technologique. 
 

La Chine, qui cherche à devenir autonome dans la conception de semi-conducteurs, estime que les mesures de Washington visent à maintenir la suprématie des Etats-Unis dans ce domaine. 
 

En parallèle, les deux pays sont engagés dans la quête de zones d’influence. Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, malgré les prétentions rivales de ses voisins, comme les Philippines et le Vietnam. L’Empire du Milieu a rejeté le verdict de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) de La Haye en 2016, qui a estimé que Pékin n’a pas de «droits historiques» sur la majorité des eaux stratégiques de la mer de Chine méridionale et donné raison aux Philippines. Washington prône un règlement multilatéral et pacifique de ces conflits et a déclaré «illégales» les revendications territoriales de Pékin en mer de Chine méridionale. Entre-temps Pékin considère Taïwan comme une province qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. 
 

La Chine, qui dit privilégier une réunification pacifique avec l’île, n’exclut toutefois pas un recours à la force pour y parvenir. Les Etats-Unis, qui ont accordé leur reconnaissance diplomatique à la République populaire de Chine en 1979, restent l’allié le plus puissant de Taipei ainsi que son principal fournisseur d’armes.  
Aussi, la Chine lorgne vers les îles du Pacifique. 
 

C’est le cas, notamment, aux îles Fidji, où s’est rendu le président chinois en 2018, au Vanuatu, aux îles Samoa, aux îles Salomon, qui ont intégré les «Nouvelles routes de la soie». En 2019, les îles Salomon, qui jusque-là ne reconnaissaient pas Taïwan, ont rompu leurs relations avec Taipei et établi des liens diplomatiques avec Pékin. Le 27 mai 2022, la Chine et l’île Kiribati ont signé des documents de coopération, afin de construire des infrastructures et de lutter contre le changement climatique. Pékin devrait réhabiliter une ancienne piste de l’armée américaine sur l’île de Kanton. 
 

Le 12 juillet 2022, la vice-présidente américaine, Kamala Harris, a annoncé aux Etats du Forum des îles du Pacifique (FIP) la nomination d’un premier «envoyé spécial américain», dans le cadre d’une toute nouvelle «stratégie nationale sur les îles du Pacifique». 
 

En septembre, la Maison-Blanche a annoncé un nouveau fonds de 810 millions de dollars d’aide pour les îles du Pacifique-Sud, déclarant, à l’époque, vouloir accroître la présence diplomatique des Etats-Unis dans cette région. En février dernier, les Etats-Unis ont rouvert leur ambassade aux îles Salomon, fermée en 1993.  
 

La Papouasie-Nouvelle Guinée a signé, en mai dernier, un pacte de sécurité avec Washington qui donne aux forces américaines l’accès aux ports et aéroports de ce pays. Fin septembre, Washington a accueilli le Forum Etats-Unis - îles du Pacifique. A cette occasion, le président américain a annoncé la reconnaissance officielle comme «Etats souverains et indépendants» de deux territoires, les îles Cook et Niue. 

 

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