- La consommation du lait et des produits laitiers augmente considérablement pendant le mois de Ramadhan, particulièrement les produits non pasteurisés. Un danger que vous appréhendez. Quelles recommandations faite-vous aujourd’hui pour éviter la brucellose ?
Il faut d’abord expliquer que la brucellose est une maladie infectieuse et contagieuse due à des bactéries appelée Brucella. Elle touche les espèces animales domestiques et sauvages et est transmise à l’homme par contact direct avec des animaux infectés ou par consommation de lait cru et des produits laitiers contaminés.
Il est important et urgent donc de lancer des campagnes de sensibilisation, surtout de mettre l’accent sur la transmission par le lait cru et les produits laitiers non pasteurisés, dont l’origine est inconnue.
D’ailleurs, parmi les recommandations des 5eJournées scientifiques internationales du laboratoire HASAQ, c’est d’exiger l’agrément sanitaire (indemne de brucellose et tuberculose) pour la vente du lait. Une manière de lutter contre la brucellose.
J’insiste sur la sensibilisation et l’information de la population quant aux modes de transmission et la gravité des zoonoses. Il est aussi préconisé de constituer un comité mixte entre les secteurs de l’agriculture, de la santé et de la recherche dans le concept One Health (une seule santé) pour réfléchir sur une stratégie de lutte plus efficace et plus adaptée aux conditions du terrain.
Il est également nécessaire et même recommandé de sensibiliser l’éleveur quant aux dangers de la brucellose pour son élevage, à savoir les pertes économiques dues aux avortements, l’infertilité, diminution de production laitière, mais aussi au danger sanitaire de cette maladie pour lui et sa famille.
Les professionnels de l’élevage et des abattoirs doivent être aussi sensibilisés quant aux modes de transmission. Pour avoir une lutte efficace, il est aussi important de revoir à la hausse l’indemnisation des éleveurs lors de l’abattage des animaux infectés et le respect du délai d’indemnisation.
Il y a eu lors de cette conférence un débat houleux à ce sujet. En effet, dans le programme de lutte contre la brucellose en Algérie et dans le monde, lorsqu’on détecte les animaux atteints, il est obligatoire de les abattre dans les 15 jours qui suivent le diagnostic.
L’éleveur est indemnisé selon un pourcentage de la valeur d’un animal (35%) et la carcasse est vendue selon sa valeur bouchère.
Les experts, lors de cette journée scientifique, ont aussi recommandé d’augmenter la prime de vaccination des vétérinaires praticiens lors des campagnes de vaccination entre la brucellose, vu le risque encouru suite à ce geste.
- Quel état des lieux peut-on faire aujourd’hui sur la brucellose en Algérie ?
La brucellose est reconnue par l’OMSA, la FAO et l’OMS, comme la zoonose la plus répandue dans le monde, engendrant de lourdes pertes économiques et des milliers de cas humains, annuellement.
En élevage, elle provoque des pertes importantes traduites par des avortements, des infertilités et diminution en production laitière. Actuellement, elle continue à se propager suscitant un véritable problème de santé publique vétérinaire, dans le monde.
L’Algérie n’est pas épargnée, classée, par l’OMSA, 10e au monde quant au nombre de cas humains, avec une moyenne de plus de 5000 cas déclarés annuellement par l’Institut national de la santé publique, qui la classe comme étant la première zoonose à déclaration obligatoire en Algérie.
86% de ces cas sont dus à la consommation de lait cru et produits laitiers contaminés. Les services vétérinaires ont mis en place plusieurs programmes prophylactiques, depuis les années 70, mais ces derniers n’ont pas prouvé leur efficacité, à cause de multiples raisons liées à un manque de rigueur dans l’application de la législation ; la méconnaissance des éleveurs et la mauvaise conduite des élevages.
Ainsi, la brucellose sévit dans nos élevages dans toutes les régions d’Algérie, touchant toutes les espèces domestiques sensibles. Actuellement, la brucellose sévit à l’état enzootique dans toutes les régions d’Algérie et dans toutes les espèces animales domestiques.
- De nouveaux traitements et méthodes de diagnostic sont mis en place, la lutte contre la brucellose sera-t-elle plus efficace ?
La brucellose est une zoonose dont le diagnostic rapide et fiable chez les animaux est d’une grande importance pour pouvoir lutter efficacement contre cette maladie. Dans la pratique, on distingue les méthodes de détection directe et indirecte.
Ces dernières sont principalement utilisées pour effectuer des tests de surveillance chez les animaux de rente. Il s’agit notamment de kits de tests d’anticorps, tels que le test Elisa pour le lait ou le sang, qui permet de traiter un grand nombre d’échantillons, ou le test Rose bengale, qui permet de détecter les anticorps avec des moyens simples.
D’autres méthodes, comme la réaction de fixation du complément, sont souvent utilisées comme tests de confirmation. Pour détecter directement la bactérie Brucella, la culture sur milieu de culture et l’identification du pathogène sont considérées comme gold standard.
Ces dernières années, les méthodes PCR en particulier ont remplacé les méthodes d’identification bactériologique classiques dans les laboratoires spécialisés.
Dans les laboratoires de microbiologie clinique bien équipés, les spectromètres de masse Maldi-Tof sont de plus en plus utilisés. Les méthodes de typage biologique moléculaire sont utilisées pour les études épidémiologiques et autres études scientifiques.
Les analyses MLVA ou MLST classiques sont de plus en plus souvent remplacées par des analyses du génome entier. Les coûts de ces analyses ont fortement baissé ces dernières années.
Toutefois, pour comparer les séquences complètes de nombreux isolats bactériens différents et obtenir des résultats significatifs, il faut des ordinateurs puissants et de bonnes compétences en matière de logiciels.
Cependant, en Algérie, ces méthodes ne sont pas mises en place pour le diagnostic de routine de la brucellose. Les méthodes sérologiques classiques pour la détection des anticorps dans le sang sont les plus utilisées dans les laboratoires vétérinaires ou médicaux et font toujours leurs preuves et restent efficaces dans la lutte contre cette maladie.