L’écrivaine et pédagogue, Djoher Amhis, a eu droit à un vibrant hommage qui lui a été rendu, samedi, dans sa commune natale, Ath Yenni, dans la wilaya de Tizi Ouzou, où l’APC, en collaboration avec le comité communale des fêtes ainsi que l’association des amis de la rampe Louni Arezki de La Casbah, a concocté un riche programme d’activités en l’honneur à cette femme emblématique de la région.
Des hommes de culture, des amis et des membres de la famille de Mme Amhis, appelée affectueusement Nna Djoher, ont pris part à cet hommage qui a eu lieu à l’espace culturel Mouloud Mammeri du chef-lieu de la commune d’Ath Yenni. Ainsi, Abdellah Djenane, maire d’Ath Yenni, a tenu à saluer la bienvenue à tous ceux qui sont venus assister à cette rencontre conviviale. «C’est un honneur pour nous d’organiser cet hommage à une femme qui a beaucoup donné pour la culture et qui, après sa retraite dans l’enseignement, s’est mise à la littérature.
Aujourd’hui, à 97 ans, elle a une œuvre riche après un parcours exemplaire», a-t-il déclaré devant une assistance où nous avons remarqué plusieurs invités, à l’image des maires des Ouacifs et d’Ait Touddert ainsi que le professeur d’économie à l’université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, Mohamed Dahmani. Les témoignages des présents convergent tous à retracer l’itinéraire de cette dame qui a émergé du lot avec ses qualités intellectuelles et sa sagesse, comme l’a confié son cousin, Belkacem Ouksel, qui s’est montré heureux d’assister à cet hommage rendu, a-t-il déclaré, avec honneur et gloire à Djoher Amhis. «Je suis très heureux d’assister à cette journée en hommage à cette dame qui a honoré notre commune, Ath Yenni, la wilaya de Tizi Ouzou et l’Algérie en général, à travers ses productions et son travail pour les bonnes causes. Nous lui souhaitons longue vie», a-t-il laissé entendre.
De son côté, Ahcène Metref, qui, lui aussi est impliqué dans l’organisation de cet hommage, dira : «Je suis très content de voir tout ce beau monde qui est venu à cet hommage rendu à cette essayiste, poétesse, professeur, auteur de guides scolaires et femme de lettres qui est aujourd’hui la doyenne des écrivains algériens».
Oui. Un parcours de plusieurs décennies dans la production littéraire et surtout didactique puisqu’elle a également offert ces belles années de sa jeunesse à la formation de générations de cadres ayant occupé de hautes fonctions de responsabilité. C’est ce qu’a, d’ailleurs, souligné Hacène Helouane, maître de conférence au département de langue française de l’université de Tizi Ouzou. Il y avait aussi le président du Salon du livre amazigh, Salem Ait Ali Belkacem, également membre de l’APW de Tizi Ouzou, qui a salué l’initiative car, a-t-il soutenu, Nna Djoher mérite un hommage national pour tout son travail pour la culture et la littérature algérienne et amazighe en particulier. «Elle a été dans le staff du Festival national culturel annuel du film amazigh. Nous avons appris beaucoup de choses avec elle. Elle nous a accompagnés durant plusieurs séminaires, colloques et journées d’étude organisés par le HCA à travers les différentes wilayas du pays. Elle a toujours plaidé pour le vivre ensemble. Aujourd’hui, je me joins, au nom du Salon du livre amazigh de Ouacifs, avec joie, à cette louable initiative», a-t-il déclaré lors de son intervention.
Aider la jeunesse
Lounis Ait Aoudia, de l’association des Amis de la Rampe Louni Arezki de La Casbah a, pour sa part, estimé que la journée de samedi était une fête pour retracer l’itinéraire d’une femme qui a travaillé pour la culture, l’identité et la jeunesse. «Je l’ai eue au téléphone. Elle a toujours une mémoire extraordinaire. Elle salue tous ceux qui sont venus à cet hommage», a-t-il confié à l’assistance, tout en citant quelques femmes, dont le nom est intimement lié au savoir, le livre, la culture et la révolution. M. Ait Aoudia a parlé aussi d’un livre sur Djoher Amhis paru écrit par Hocine Hadid et la défunte Zakia Gaouaoui.
Dans le même contexte, Malek Amirouche, propriétaire de l’entreprise d’organisation d’activités culturelles et scientifiques, a évoqué le film qu’il a consacré à la vie et l’œuvre de Mme Amhis. «C’est une femme qui rassemble. J’ai réalisé un film documentaire sur sa vie et son parcours, mais je suis toujours confronté à des obstacles», a-t-il déploré.
Cette production cinématographique, intitulée Djoher Amhis, une femme d’exception a, d’ailleurs été projetée samedi à l’espace culture Mouloud Mammeri d’Ath Yenni. Par ailleurs, notons que Djoher Amhis, née Ouksel, a vu le jour à Ath Yenni, en 1928. A l’âge de 17 ans, en 1945, elle entame sa formation à l’Ecole normale de Miliana. Une fois diplômée, elle commence sa carrière professionnelle comme professeure des écoles à Thénia avant de devenir enseignante de lettres au lycée de Médéa.
En 1968, elle est nommée inspectrice de l’éducation avant de revenir à l’enseignement de la littérature dans un lycée d’Alger. «Depuis 1983, elle entreprend régulièrement une série d’ouvrages qu’elle appelle Lectures, dans laquelle elle parcourt successivement les romans de Mouloud Mammeri, Mohammed Dib, Mouloud Feraoun, Malek Ouary, Taos Amrouche, Abdelhamid Benhedouga, Tahar Djaout, Assia Djebar, et plus récemment Kateb Yacine», lit-on d’une biographie réalisée par l’archiviste Mohamed Chami. Le même texte ajoute que la plupart de ces livres ont paru chez Casbah éditions, dans la collection Empreintes. Le travail pédagogique de Djoher Amhis-Ouksel porte, notamment, sur «la présentation, l’étude et l’analyse des ouvrages des auteurs algériens dans l’intention d’aider la jeunesse à entrer dans la littérature algérienne avec une stratégie éducative qui favorise la pratique de la lecture par le plaisir et non par la contrainte. Son œuvre est tout entière guidée par le souci de transmettre aux jeunes générations la connaissance et le goût des principales œuvres du patrimoine littéraire algérien».
Il y a quelques mois, elle édité un ouvrage intitulé La dame d’Ighil Ali où elle a ressuscité Fadhma Ath Mansour Amrouche, en décortiquant le livre Histoire de ma vie. Mme Amhis a été primée plusieurs fois pour son travail. Elle a été, d›ailleurs, récipiendaire du Prix Mahfoud Boucebci, en 2012 et du Prix de la Fondation Nedjma, en 2013. Elle inscrit ainsi son nom dans l’histoire d’Ath Yenni, une commune qui a enfanté, entre autres, l’écrivain et anthropologue Mouloud Mammeri, l’islamologue Mohamed Arkoun et le chanteur Idir.
Tizi Ouzou
De notre bureau Hafid Azzouzi