Comédie au Théâtre régional d’Oran : «Les journées du rire» reviennent sur les planches

02/04/2023 mis à jour: 00:23
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Haroudi au milieu - Photo : D. R.

Organisées au TRO à l’initiative de l’association «SOS jeunesse d’Oran», les journées du rire tentent de renouer avec le public après plusieurs années d’absence.

La soirée du jeudi a été notamment marquée par la prestation de la troupe de Harroudi, une des figures marquantes de la scène humoristique oranaise. Les sketchs de celui-ci, caractérisés par un détournement subtil de la langue, parfois de situations, font toujours recette malgré une certaine usure.

Il n’y a qu’à voir les fous rires déclenchés chez le jeune public qui le découvre sans doute pour la première fois pour s’en convaincre.

Il s’agit d’un humour accessible, parfois naïf conjugué à des mimiques typiques et une tenue vestimentaire (pantalon bouffi, gilet et chechia) devenue une marque de fabrique. Il est en outre l’un des rares à avoir été adopté par les éléments du célèbre trio Bila Houdoud à l’époque où ceux-ci étaient à l’apogée de leur carrière télévisuelle.

Exemple, jouant le rôle d’un enfant avec comme partenaire Hazim: «Papa, donne moi 10 DA. Que veux-tu faire avec 10 DA ? Je veux «tourner» (dans le sens de flâner) à Oran (ndour fi wahran). Tiens, voilà 5 DA et va tout droit ! (rouh nichan)».

Cette parenthèse mise à part, la performance assurée sur la scène se veut plus élaborée notamment avec l’introduction de plusieurs autres personnages.

Mais le phénomène Harroudi n’a pas besoin d’intrigue théâtrale pour faire rire et «l’histoire» qu’on veut raconter ne sert en réalité que de prétexte pour ses délires humoristiques soutenus par une bonne dizaine de blagues racontées dans ou hors contexte de la pièce.

Pour quelqu’un qui ne connait pas le contexte sociologique local, certains passages peuvent paraître racistes, misogynes, etc., mais le personnage Harroudi fonctionne comme un enfant qui n’a pas encore assimilé toutes les restrictions que la société va graduellement lui imposer. Une fraîcheur d’esprit renouvelée indéfiniment.

Dans le spectacle en question, il s’agit avant tout de l’éternelle et indétrônable thématique liée à la demande en mariage. De mariage, il est également question dans le spectacle donnée le lendemain par Noredine Barigo et ses complices dont Mohamed Ardjouna. Barigo fait référence à Perrégaux, l’ancien nom de l’actuelle ville de Mohammadia, wilaya de Mascara, dont il est originaire.

C’est l’histoire d’un jeune homme qui peine, pudeur aidant, à annoncer à son père qu’il veut se marier, et ce, malgré l’appui de son frère, la mère étant absente car décédée depuis longtemps.

Egalement très connu par le biais du petit écran, Noredine Barigo utilise à merveille les codes vestimentaires et langagiers de la tradition. L’ancrage dans le terroir confère à son personnage une authenticité particulièrement appréciée par le public qui le découvre ici directement sur scène.

Certes, le sujet traité est ancien, mais les références sont d’actualité, et c’est précisément le cas pour le jeune prétendant qui finit par déclarer à son père qu’il a rencontré celle qu’il veut épouser sur Internet grâce aux réseaux sociaux. La scène des négociations qui se font par Smartphones interposés est là aussi hilarante.

Le fait qu’on apprenne que père et fils le sont également dans la vie réelle ajoute un grain de sel au spectacle. Les journées du rire, ouvertes par une troupe folklorique, Afrah Wahran, alliant percussion traditionnelle, trompette et autre instrument à vent allongé prisés dans les célébrations des fêtes notamment de mariages (justement) concernent également les comédiens qui se sont lancés dans le one man show et ils sont légion à Oran.

«Nous sommes là pour égayer l’atmosphère au profit des  familles afin de leur permettre d’échapper à la routine du quotidien et aux soucis de la vie en général», déclare Slimane Mokhtari, lui aussi comédien à qui a été confiée la tâche de présenter les artistes et d’animer les intermèdes des spectacles.

Il se souvient des toutes premières journées du genre organisées au milieu des années 1990 à l’ancien centre culturel Souiyeh El Houari situé sur la Rue Larbi Ben Mhidi.

«Les journées sont ouvertes aux artistes d’Oran et d’ailleurs ; il y a eu une rupture, mais aujourd’hui, nous sommes en train de les faire revivre grâce à l’association SOS jeunesse El Bahia avec l’espoir d’en faire un festival». L’avantage mis en avant concerne la possibilité pour le public d’approcher de près tous ces comédiens qu’il n’a l’habitude de voir que sur les écrans.

«C’est une heureuse initiative que cette collaboration des organisateurs avec le TRO pour faire revivre ces journées du rire pour offrir aux familles oranaises des moments de détente et nous, nous sommes là pour apporter notre contribution», déclare Houari Ftita (Mellouk de son vrai nom), également célèbre humoriste ayant par ailleurs fait les beaux jours des premières saisons du feuilleton Messaoud et Messaouda diffusé antérieurement durant le mois de ramadan.

Lui est programmé ici pour la soirée de clôture. «Je dis souvent que, de manière général, l’Algérien a perdu le sens du rire, le bon rire, je précise, celui qui exige de notre part de la créativité et le souci de toujours chercher à évoluer», ajoute-t-il pour signifier la nécessité de ne pas tomber dans la facilité des redites, lassantes à la longue.

Les artistes qui y participent ont fait preuve d’un véritable engagement eu égard aux moyens limités de l’association. «Nous avons invité plusieurs autres humoriste d’Oran et d’ailleurs mais nous n’avons pas les programmer car ils ont demandé des cachets que nous ne pouvons pas leur assurer pour le moment», explique Hmida, représentant de l’association organisatrice qui garde l’espoir que les choses vont évoluer à l’avenir et c’est pour les bienfaits du rire. 
 

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