Canicule dans le sud du pays : Comment vivre sous 50° degrés

13/07/2023 mis à jour: 00:47
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Photo : Sami K.

Le sud de l’Algérie bat des records de températures diurnes et nocturnes très fortes pour la saison, dépassant allègrement les 49°C et qui se prolongent depuis plus d’une semaine mais aucun dispositif spécifique n’est entré en vigueur hormis l’aménagement des horaires de la Fonction publique.

Le porte-parole du bureau local de l’Association nationale de protection du consommateur de la wilaya d’Ouargla vient de solliciter l’intervention du Premier ministre pour reconsidérer les horaires d’été instaurées par le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale dans les wilayas du sud du pays.

Salim Belkram multiplie ses interventions médiatiques et publications sur les réseaux sociaux interpellant les plus hautes instances du pays pour trouver des «solutions efficaces» à la gestion des horaires administratives légales dans les régions sahariennes durant l’été. «Il y va de la santé et salubrité publiques», relève-t-il. Il n’est pas le seul à relancer le débat sur cette problématique qui revient chaque année à l’occasion de la canicule. Un moment tant redouté par les populations qui savent qu’aucun dispositif spécifique n’est actionné quand le mercure dépasse les 50°C.

Seul indice rappelant la prise en compte anticipée de ces températures intolérables pour le corps humain, le budget conséquent que Sonelgaz programme pour cette période. En effet, la direction de cette entreprise à Ouargla a alloué 698 milliards de centimes pour affronter l’été 2023. Un important programme d’investissement pour renforcer le réseau électrique dans les quartiers durant cette période de surconsommation énergétique via la concrétisation de son programme d’investissement pour l’année 2023 visant à améliorer la qualité des services rendus à ses clients.

La direction de la distribution de l’électricité et du gaz de Ouargla s’est en outre efforcée d’achever et de mettre en service 17 nouveaux transformateurs électriques ainsi que la réalisation de 74 kilomètres de nouveaux réseaux électriques moyenne et basse tensions. Pour assurer la continuité du service public, plus de 60 agents ont été recrutés en régime posté pour entretenir et réparer diverses pannes pouvant survenir dans les réseaux tout au long de la semaine, 24h/24, avec la vulgarisation du numéro du centre d'appel national (3303).

Shams remonte au créneau

A In Salah, l’association Shams de protection de l’environnement est montée au créneau cette semaine, appelant à l’application urgente des dispositions édictées par l’article 10 de la loi n°04-20 du 25 décembre 2004 relative à la prévention et à la gestion des catastrophes dans le cadre du développement durable afin d’éviter les effets des dangers majeurs dus à une urgence naturelle exceptionnelle et/ou par l’activité humaine, y compris les fluctuations météorologiques.

L’occasion pour Shams de rappeler son combat de toujours pour la promotion des énergies et du développement durable auprès des autorités locales et centrales, afin d’activer toutes les mesures visant à réduire l’impact de ce phénomène naturel qu’est la hausse des températures et son impact sur les personnes et les biens, et toutes les mesures visant à atténuer les effets de la canicule sur les personnes âgées, les enfants et les personnes atteintes de maladies chroniques.

Entre autres actions urgentes préconisées, celle de vulgariser l’information sanitaire et environnementale au sein d’un dispositif estival spécifique, accroître les moyens d’intervention des services de la Protection civile et des urgences médicales pour recevoir les cas d’urgence en période de canicule et l’accompagnement des équipes de Sonelgaz et de l’Algérienne des eaux afin d’éviter les coupures d’électricité et d’eau.

Dans un comparatif météorologique s’étendant sur 121 ans publié sur sa page Facebook, l’association a démontré que la température mensuelle moyenne a augmenté de 1,3 degrés Celsius durant la période estivale dans la wilaya d’In Salah, relevant que les températures enregistrées au cours du mois de juin de l’année 1900 dépassaient les 51°C, c’est dire que le phénomène naturel qu’est la chaleur est désormais exacerbé par les dérèglements climatiques et qu’il se doit d’être traité autrement par les pouvoirs publics en matière de politiques d’urbanisme, de santé et d’aménagement des villes.

Aucun suivi particulier dans les hôpitaux

D’ailleurs à écouter l’intervention du Dr Mamri Abdelfettah, médecin coordinateur du service des urgences médicochirurgicales de l’hôpital Mohamed Boudiaf de Ouargla, il n’y aurait aucun suivi particulier des pathologies engendrées ou exacerbées par la canicule dans son service, se contentant de déplorer «deux à trois cas quotidiens de coup de soleil parmi les personnes âgées et ouvriers exerçant à l’air libre depuis le début de la saison estivale».

Les conseils prodigués par ce praticien sont d’éviter les sorties inutiles aux heures de grosse chaleur, se protéger avec des habits amples et boire beaucoup d’eau. 

Hormis les consignes générales publiées par le ministère de la Santé via les réseaux sociaux ou les mass médias, valables pour l’ensemble du territoire national, et au moment où l’ensemble du pays est concerné par un épisode caniculaire très éprouvant en ce début de juillet, le sud de l’Algérie bat des records de températures diurnes et nocturnes très fortes pour la saison, dépassant allègrement les 49°C et qui se prolongent depuis plus d’une semaine mais aucun dispositif spécifique n’est entré en vigueur hormis l’aménagement des horaires de la fonction publique, qui a changé le 1er juin dernier comme chaque année et qui est jugé obsolète et aberrant par les bénéficiaires, décriant notamment l’horaire de sortie des bureaux fixée à 15h, moment des hautes températures mais aussi période où il n’a y a pas âme qui vive dans les rues, mis à part les fonctionnaires à la recherche d’un moyen de transport salvateur.

Le parcours du combattant

Pour ce faire, il faut se rendre au plus proche arrêt de tramway, pour ceux habitant sur le trajet desservi par ce transport qui assure un service public sur une distance de 9 km traversant l’artère principale de la ville de Ouargla vers l’extension urbaine d’El Khafdji. Pour les autres quartiers de la ville, nul besoin de chercher un taxi ou un bus. Certains s’abonnent auprès d’un taxieur attitré, d’autres recourent au covoiturage et la plupart préfèrent rester sur place jusqu’à 17h pour s’exposer le moins possible aux rayons du soleil et attendre la reprise des transports.

C’est le cas de Habiba, fonctionnaire des impôts, qui profite de la ligne du tramway pour rentrer de Hai Nasr à La Silice mais qui déplore l’absence de moyens de locomotion à partir du terminus. «Je dois traverser la rue déserte sous un soleil de plomb, je l’ai fait pendant le mois de juin, mais plus maintenant», dit-elle. Comment affronter au mieux cette canicule quand on est un habitant du Sahara et qu’on ne peut pas aller se prélasser au bord de la mer.

Telle est la grande question qui se pose chaque année à la même période, avec la survenue des grosses chaleurs, caractérisées par une baisse significative de l’amplitude thermique entre le jour et la nuit en langage météorologique, c’est-à-dire la fournaise en continu et à toute heure de la journée ? C’est d’ailleurs le principal indicateur qui alarme la population ces derniers jours : voir le thermomètre afficher 50°C à minuit, être obligé de travailler de 7h à 15h, ne pas avoir de transport desservant son quartier et ne pas posséder ou n’avoir qu’un seul climatiseur chez soi.

La planque à domicile

Soulef s’est résignée à ne plus quitter son domicile depuis une dizaine de jours, allumant par intermittence ses vieux climatiseurs pour finir la saison au moins. Entre autres précautions supplémentaires prises par cette dernière, l’achat d’un second réfrigérateur a été tempéré. «Il m’a coûté 120 000 DA avec un échéancier de 10 mois, et j’envisage sérieusement d’acquérir un second climatiseur par la même voie si cette vague de canicule persiste», explique Soulef, retraitée de la fonction publique, qui touche une pension de 70 000 DA.

«Je ne peux pas me payer de nouveaux équipements avec le cours actuel du marché, mais la vente par facilité me sied parfaitement, malgré le surplus de paiement», ajoute cette cheffe de famille. Le nombre de boutiques de vente d’électroménager par facilité a doublé à Ouargla, où ces échoppes prennent de plus en plus d’espace et affichent ostentatoirement une offre plus étoffée et diversifiée au bonheur des petites bourses.

«La canicule actuelle a dopé les ventes, des petites acquisitions de ventilateurs et congélateurs en juin, nous sommes vite passés aux gros calibres en matière de climatisation et de réfrigération, la demande va crescendo», assure Mohamed, marchand d’électroménager ayant pignon sur rue aux 4 Chemins de Beni Thour, au cœur d’une des rues commerçantes les plus fréquentées du centre-ville.

Sa boutique ne désemplit pas, il a même dû changer de local pour bénéficier d’une extension de son espace d’exposition. «Les clients veulent voir les équipements grandeur nature et pouvoir comparer après avoir visité nos pages sur les réseaux sociaux.» Les tarifs se rapprochent à vue d’œil et la marge n’est même pas cachée ou tue tant le marché explose, avec une prédilection pour les ventilateurs cette année, à la faveur d’une offre très alléchante tant en prix qu’en qualité, relate Salim, chef de rayon à Crestline, grande surface du centre-ville.

Les tarifs vont de 3500 à 7000 DA tandis que les frigos s’affichent entre 50 000 et 70 000 DA sans compter les Side By Side qui s’élèvent à 120 000 DA globalement. Les congélateurs sont eux cédés entre 53 000 et 80 000 DA selon la capacité et la marque. Ainsi, après avoir placé un second réfrigérateur dans sa cuisine pour servir d’appoint à son ancien frigo fatigué qu’elle ne lâche pas pour autant, Soulef lorgne sur un climatiseur de 12 000 BTU pour équiper sa chambre parentale.

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