La forte pression de la rue nigérienne a contraint la France à rapatrier son ambassadeur et retirer ses 1500 soldats du Niger, mettant ainsi fin à sa coopération militaire avec les autorités issues du coup d’Etat.
La France va retirer ses troupes stationnées au Niger d’ici la fin de l’année. Elle s’apprête aussi à rapatrier son ambassadeur à Niamey. L’annonce a été faite dimanche soir par le président français, Emmanuel Macron, dans une interview accordée à TF1 et France 2. Une décision qui a été saluée par les autorités nigériennes. «Les troupes françaises ainsi que l’ambassadeur de France quitteront le sol nigérien d’ici la fin de l’année.
C’est un moment historique qui témoigne de la détermination et de la volonté du peuple nigérien», ont réagi les auteurs du coup d’Etat du 26 juillet dernier, perpétré contre le président Mohamed Bazoum. «Toute personne, toute institution ou structure dont la présence menace les intérêts et les projections de notre pays devront quitter la terre de nos ancêtres, qu’elles le veuillent ou non», ont-ils mis en garde.
Ainsi, après un bras de fer de deux mois avec les autorités issues du coup d’Etat, Paris a fini par se soumettre à la volonté du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), qui a vu le jour au lendemain du putsch.
Cette instance décisionnelle a, dès le début du mois d’août, exigé le retrait des soldats français du sol nigérien. Une exigence à laquelle les autorités françaises ont répondu par un refus catégorique, arguant que «les putschistes n’ont pas autorité pour faire cette demande».
Vendredi 25 août 2023, le CNSP a donné un ultimatum de 48 heures à l’ambassadeur de France pour qu’il quitte le pays, suite à son «refus de répondre à l’invitation des autorités pour un entretien», mais également à cause «d’autres agissements du gouvernement français contraires aux intérêts du Niger». Les tensions entre Paris et Niamey ont atteint leur paroxysme lorsque les autorités françaises ont refusé la décision d’expulsion, considérant qu’elle n’émanait pas des «autorités légitimes nigériennes élues».
L’échec d’une politique
Depuis, des manifestations et des rassemblements de protestation sont régulièrement organisés dans le périmètre où se trouvent l’ambassade de France et la base militaire française à Niamey pour dénoncer «l’attitude désinvolte» de Paris. Les autorités issues du coup d’Etat ont même accusé la France de «préparer une intervention militaire» pour rétablir le président déchu dans ses fonctions.
La rupture entre les deux capitales semble ainsi consommée. La forte pression de la rue nigérienne a contraint la France à retirer ses 1500 soldats du Niger et mettre fin à sa coopération militaire avec les autorités issues du coup d’Etat. Ce retrait constitue ainsi un nouveau camouflet pour la France, qui a été déjà contrainte de retirer ses troupes militaires du Mali en août 2022 et du Burkina Faso en février 2023.
Des forces qu’elle a déployées à partir de 2013 dans le cadre d’accords de coopération dans la lutte antiterroriste conclus avec ces pays. Pour plusieurs observateurs, le rejet de la présence militaire française dans cette région en proie à la recrudescence de l’activité terroriste signifie l’échec de la politique de la France au Sahel. «Le Mali a fait tache d’huile, on sait qu’on était face à une tendance lourde. Cela fait des années qu’on voit monter cette vague.
La France a senti qu’elle perdait pied, mais elle est restée dans le déni et la stupeur», a affirmé une source diplomatique française à l’AFP. Mais si la France a fini par céder en acceptant de mettre fin à sa présence militaire au Niger, c’est aussi en raison de l’éloignement de l’option militaire, mise sur la table par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), pour rétablir l’ordre constitutionnel dans ce pays. Une option que l’Algérie a réussi à contrer à travers une initiative pour un règlement politique et pacifique de cette crise. Une initiative qui a été bien accueillie par les pays membres de la Cédéao, à leur tête le président du Nigéria, Bola Ahmed Tinubu.