48e anniversaire de la proclamation de la République sahraouie : La résistance pour briser le carcan du colonialisme

27/02/2024 mis à jour: 18:11
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La lutte du peuple sahraoui devant les tribunaux internationaux pour recouvrer sa souveraineté sur son territoire connaît une évolution «significative» ( photo : H. LYÈS/archives)

Le peuple sahraoui célèbre, aujourd’hui, le 48e anniversaire de la proclamation de la République  sahraouie. Le 27 février 1976, au lendemain du départ du dernier soldat espagnol du territoire sahraoui, est annoncée à Bir Lahlou (territoires libérés), la naissance de la République sahraouie. 

Toutefois, la question du Sahara occidental demeure sans règlement et les Sahraouis continuent de réclamer leur droit à l’autodétermination. Entre-temps, l’occupant marocain poursuit impunément sa politique répressive traduite pas les violations des droits de l’homme dans les territoires sahraouis. 

Ainsi, le peuple sahraoui saisira l’occasion de ce 48e anniversaire pour attirer davantage l’attention de la communauté internationale, les Nations unies en particulier, sur la guerre menée par le makhzen dans les territoires de la dernière colonie d’Afrique depuis fin octobre 1975, qui s’est intensifiée après la violation par l’occupant du cessez-le-feu de 1991, le 13 novembre 2020. 

Récemment, le président de la République sahraouie, secrétaire général du Front Polisario, Brahim Ghali, a, dans une lettre adressée au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, alerté sur «une vaste escalade» des violations et de la répression contre le peuple sahraoui et une situation «de plus en plus dangereuse», dans les territoires sahraouis occupés. 

Aussi, il a appelé l’ONU, en particulier le Conseil de sécurité, à «activer en urgence la responsabilité juridique et morale des Nations unies envers le peuple sahraoui, notamment à travers la création d’un mécanisme indépendant des Nations unies pour surveiller les droits de l’homme sur le territoire où se trouve la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO)».
 

L’autre front

Outre la lutte pour l’indépendance, la bataille juridique relative au dossier sahraoui se poursuit afin de mettre un terme au pillage des ressources naturelles du Sahara occidental par l’occupant marocain, avec l’implication de certains pays européens. A ce propos, l’ambassadeur de la République  sahraouie en Algérie, Abdelkader Taleb Omar, a affirmé récemment que l’année 2024 «sera riche en évènements», citant, entre autres, l’attente de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) portant annulation de tout accord avec le Maroc s’il englobe les territoires sahraouis. 

C’est ce qu’a indiqué le diplomate sahraoui, lors de la 47e Conférence de la coordination européenne pour le soutien et la solidarité avec le peuple sahraoui (Eucoco), tenue début décembre à Tolède en Espagne. En septembre 2021, le Tribunal de l’Union européenne (UE) a statué en faveur du Front Polisario qui soutenait que l’accord de pêche entre Bruxelles et Rabat a été conclu sans le consentement du peuple du Sahara occidental. Les Conseil et Commission européens avaient introduit un recours en appel en décembre de la même année. Cet accord, d’une validité de 4 ans et arrivé à terme en juillet dernier, fait actuellement l’objet d’une procédure judiciaire devant la CJUE pour éviter sa reconduction. 

Le peuple sahraoui attend ainsi «avec optimisme» une décision finale de la CJUE à cet égard, «car tout laisse entendre que les accords illégaux conclus entre l’Union européenne et la Maroc ne seront pas reconduits», selon les propos du ministre sahraoui des Affaires étrangères, Mohamed Sidati, tenus à la veille du 37e Sommet de l’Union africaine (UA), organisé les 17 et 18 février en cours à Addis-Abeba (Ethiopie). Selon des sources sahraouies, la CJUE compte annoncer les conclusions relatives aux accords d’association UE/Maroc, étendus illégalement au Sahara occidental occupé, le 21 mars prochain.
 

A ce sujet, dans un entretien accordé hier à l’agence APS, l’avocat du Front Polisario, Gilles Devers, a déclaré que la lutte du peuple sahraoui devant les tribunaux internationaux pour recouvrer sa souveraineté sur son territoire, ses richesses et son espace aérien connaît une évolution «significative». 

Lutte qui a pris de «nouvelles proportions». Evoquant les progrès réalisés, sur le plan juridique, dans le dossier sur l’accord de pêche entre le Maroc et l’UE, il  a cité la cessation définitive de la pêche sur les côtes sahraouies depuis juillet 2023.

 «Par décision du Tribunal de l’Union européenne(UE) en septembre 2021, on avait obtenu l’annulation des accords signés entre l’UE et le Maroc parce que ces accords s’appliquaient sur le territoire du Sahara occidental. Considéré comme un territoire distinct et séparé du Maroc, l’UE devait, au préalable, obtenir le consentement du peuple sahraoui par le biais de son représentant légitime et unique, le Front Polisario, avant de commencer toute opération d’exploitation des richesses du Sahara occidental», a-t-il affirmé. 

Il a relevé que la bataille juridique au Sahara occidental pour reprendre le contrôle de sa zone économique s’est poursuivie, en particulier dans trois domaines, à savoir la pêche, les produits agricoles et la question du codage clair des produits importés du Sahara occidental et qui doit être différent de celui appliqué aux produits marocains. Il a affirmé que les dirigeants sahraouis sont «optimistes» quant à la réaffirmation de la décision de la Cour de l’UE en 2021 de reconnaître le Front Polisario comme un mouvement de libération nationale possédant la personnalité juridique internationale pour plaider devant les tribunaux européens la défense des intérêts du territoire sahraoui et de sa population, ainsi que l’affirmation du jugement sur l’abolition des accords sur la pêche et les produits agricoles, pour leur inclusion du Sahara occidental sans consulter le peuple sahraoui, en violation des décisions précédentes de la Cour européenne de justice, en particulier la décision de 2016. 

L’avocat du Front Polisario a estimé, à ce propos, que «la décision à venir constituerait un gain significatif dans la pratique et ouvrira plus qu’une porte au Front Polisario pour l’incarner sur le terrain et consacrer la souveraineté du peuple sahraoui sur son territoire et ses mers, en particulier, et expulser toutes les entreprises et bateaux étrangers pêchant dans les eaux territoriales sahraouies avec des permis marocains». Il compte, dans ce contexte, faire valoir «les mêmes arguments qui ont conduit à l’arrêt de l’exploitation de la pêche au Sahara occidental» pour «arrêter l’exploitation des produits agricoles». 

Quant à la bataille juridique engagée pour l’application du droit en matière de violation de l’espace aérien du territoire sahraoui, par les compagnies de transport aérien, Me Devers a soutenu que «la lutte juridique, suite à la décision prochaine de la Cour européenne, peut prendre une nouvelle dimension pour inclure la responsabilité de toutes les compagnies aériennes qui exploitent le Sahara occidental de manière injustifiable et violent le droit international en entrant sur le territoire avec la permission d’un pays (le Maroc) sans souveraineté sur le territoire».

De son côté, le ministre des Affaires étrangères français, Stéphane Séjourné, a réitéré, hier, lors de sa visite à Rabat le soutien «clair et constant» de Paris au plan d’autonomie marocain du Sahara occidental. «C’est un enjeu existentiel pour le Maroc. Nous le savons», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse au côté de son homologue marocain, Nasser Bourita. «Le Maroc peut compter sur le soutien clair et constant de la France» à son plan d’autonomie, a-t-il ajouté. 
 

La longue marche

Ancienne colonie espagnole, le Sahara occidental est inscrit en 1963 sur la liste des territoires non autonomes établie par la IVe Commission générale des Nations unies. En 1965, la résolution 2072 de l’Assemblée générale des Nations unies le place sur la liste des régions à décoloniser et fait référence à la résolution 1514 sur le droit à l’autodétermination des peuples colonisés. Le 20 août 1974, le gouvernement espagnol annonce son intention d’organiser un référendum d’autodétermination au Sahara, prévu pour le premier semestre 1975. Le roi du Maroc Hassan II s’oppose à ce que l’indépendance en soit une des options. 

En octobre 1975, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye rend son arrêt consultatif qui réaffirme le droit des Sahraouis à l’autodétermination. Mais cela n’empêche pas Rabat de l’annexer cette même année pour proposer ensuite un plan d’autonomie sous sa souveraineté. Le Front Polisario réclame un référendum d’autodétermination sous l’égide de l’Onu, prévu lors de la signature en 1991 d’un cessez-le feu, mais jamais concrétisé. 

Envoyé spécial de l’ONU au Sahara occidental, James Baker présente un plan en 2003 qui prévoit un régime d’autonomie pour une durée de 5 ans, suivi d’un référendum comportant l’option de l’indépendance. Les électeurs seront les Sahraouis et toute autre personne de plus de 18 ans vivant au Sahara occidental depuis au moins 4 ans. Accepté par le Front Polisario, il est rejeté par le Maroc. 

D’où la démission de Baker en 2004. En juin 2007, s’ouvre la première session des pourparlers entre le Maroc et le Front Polisario en présence des Etats voisins, à savoir l’Algérie et la Mauritanie, à Manhasset (New York) sans aboutir à une solution. En mai 2012, le Maroc retire un temps sa confiance à Christopher Ross, l’envoyé spécial de Ban Ki-moon, l’accusant de «partialité». Ross finit par démissionner en mars 2017. Son successeur, l’ancien président allemand, Horst Köhler, a réussi à relancer des pourparlers au point mort depuis 2012, en convoquant les parties concernées à deux tables rondes à Genève, en décembre 2018 puis en mars 2019. 
 

Néanmoins, il a démissionné en mai 2019 «pour raisons de santé». Lui succèdera Staffan de Mistura.En novembre 2020, Les Sahraouis ont repris la lutte armée en réponse à l’agression militaire marocaine contre des civils  sans défense dans la zone d’El-Guerguerat. 

En décembre de la même année, le président américain à l’époque Donald Trump a décidé de reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, en contrepartie de la normalisation des relations entre le royaume et Israël. 

Ceci dit, les mêmes puissances qui soutiennent l’Ukraine face à l’offensive russe adoptent une attitude complaisante vis-à-vis du Maroc qui, en violation du droit international, continue à opprimer un peuple qui réclame son droit à l’autodétermination. 

Une vision à géométrie variable qui fait que le droit de la force se substitue à la force du droit. Reste en conséquence aux Sahraouis à poursuivre leur longue marche pour arracher leur indépendance.Amnay Idi
 

 

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