Si beaucoup de choses ont été faites sur le plan juridique pour lutter contre le phénomène des violences faites aux enfants et adolescents en Algérie, à travers notamment l’adoption d’une loi relative à la protection de l’enfant mais aussi l’adhésion du pays aux conventions internationales, il est important désormais de mettre en place un réseau national doté de références permettant d’intervenir rapidement, en commençant au niveau local à travers la commune et de façon coordonnée entre l’ensemble des acteurs, a déclaré le Pr Terranti, président de la Société algérienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et des professions associées (SAPEAPA) lors de l’ouverture du 2e congrès de l’association, consacré aux maltraitances à l’égard des enfants et adolescents, tenu jeudi et vendredi.
Selon lui, «la connaissance multidisciplinaire permettra de fournir aux professionnels, familles et institutions publiques, les éléments pour la mise sur pied de politiques et dispositifs de prise en charge et de prévention», a-t-il expliqué.
En effet, par leur ampleur, les violences et les maltraitances dans les sociétés en transition et en crise envahissent les espaces publics et privés. «Ils sont même qualifiés d’épidémiques par l’OMS en raison de leur fréquence, leur prévalence et leurs conséquences; par leurs conséquences à la fois sur l’individu, la famille et la communauté», précisent les organisateurs du congrès. «Ce thème nous interpelle avec force à la fois en tant que professionnels mais aussi en tant que parents et citoyens», affirme Mme Sandra Mouffok, chef de service de pédopsychiatrie à l’EHS Sidi Chami à Oran. «Dans les faits, il y a de plus en plus d’enfant maltraités.
Reste à savoir maintenant si ce nombre croissant revient à plus de déclarations car la parole s’est plus libérée ou bien si la maltraitance envers les enfants s’est intensifiée», s’interroge-t-elle. En ce qui concerne le type de maltraitance, Mme Mouffok explique qu’elle peut être physique, sexuelle, par négligence, ou encore de la maltraitance psychologique ou la cruauté mentale. Et ces violences et maltraitances ne sont pas sans conséquences sur la santé des enfants et des adolescents.
En effet, à en croire la spécialiste, les violences et les maltraitances sur les enfants ont des effets dévastateurs sur leur santé. «Les traumatismes qui résultent de ces violences altèrent durablement le développement, les capacités de régulation émotionnelle et comportementale des enfants. Pire encore, ils constituent même un risque majeur pour de nombreux troubles mentaux et pour des maladies somatiques chroniques», explique-t-elle. Plus loin encore.
La pathologie traumatique peut aussi, selon Mme Sandra Mouffok, constituer une menace pour la santé du couple, de la famille, de la communauté et de la société. «Les traumatismes vécus dans l’enfance continuent d’habiter la personne devenue adulte et altèrent ses capacités à être un parent protecteur», a-t-elle ajouté.
C’est pourquoi, il est plus que jamais important d’agir afin de lutter et tenter de stopper ces violences à l’égard des enfants. «Lors de ce congrès, nous avons réussi à mettre à plat les problèmes. Nous avons aussi explicité les difficultés mais désormais, il est important de tirer les recommandations», assure Mme Mouffok.
«Il est vrai que l’adoption de la loi 15-12 du 15 juillet 2015 constitue une avancée remarquable dans la lutte contre les violences faites aux enfants et constitue un cadre juridique de protection particulière quel que soit la situation légale de l’enfant mais malheureusement, il manque les textes d’application», soulève la spécialiste.
«C’est en fonction de ces textes d’application qu’on pourra mener à bien notre mission», ajoute-t-elle. Alors que le 2e congrès de la SAPEAPA a vu la participation de pédopsychiatres et profession associées (psychologues cliniciens, orthophonistes, ergothérapeutes, psychomotriciens, psychiatres d’adultes), Mme Mouffok confie qu’elle aurait également souhaité la présence de magistrats. A cet effet, elle explique : «Ce fléau de violence à l’encontre des enfants exige une collaboration pluridisciplinaire et la présence de magistrats à ce congrès aurait constitué un atout considérable pour tenter de trouver des solutions».
A noter que différents ateliers ont été animés lors de ce congrès et «la thématique de la maltraitance envers l’enfant et l’adolescent a été approchée selon différentes prises de vues et divers spécialistes, de différentes disciplines». En effet, selon les organisateurs, «les interventions du pédopsychiatre, du pédiatre, du médecin légiste, de l’historien, du psychologue et du sociologue convergent toutes vers le même constat».
Tous tirent la sonnette d’alarme sur l’importance d’une action commune car il s’agit à la fois d’un impératif de santé publique et un devoir envers les futures générations que de faire le maximum afin de stopper les maltraitances à l’encontre des enfants et adolescents et leur offrir plutôt un environnement sain pour leur développement.