Visite du chef de la diplomatie britannique en Chine : Londres espère un dialogue «constructif» avec Pékin

19/10/2024 mis à jour: 05:10
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Le ministre britannique des Affaires étrangères David Lammy et le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi se serrent la main

Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Lammy, a déclaré, hier à Pékin à son homologue chinois, Wang Yi, qu’il espère que les deux pays puissent discuter de leurs différends «de manière constructive», rapporte l’AFP.

Cette visite à Pékin intervient dans un contexte de réchauffement des relations entre le Royaume-Uni et la Chine, après des années de tensions liées notamment aux critiques de Londres sur la répression politique à Hong Kong. David Lammy est par ailleurs le Premier ministre britannique à se rendre dans le pays asiatique depuis que le travailliste Keir Starmer a pris la tête du gouvernement en juillet. 

Avant sa visite, malgré le dégel diplomatique en cours, Londres a promis que le ministre allait «interpeller» Pékin sur les relations sino-russes dans le contexte de la guerre en Ukraine, les droits humains ou Hong Kong, ex-colonie britannique rendue à la Chine en 1997. Le chef de la diplomatie britannique a déclaré devant son hôte qu’il subsiste des domaines dans lesquels Pékin et Londres ont «des perspectives différentes».

 Mais il a indiqué espérer que les deux pays puissent «trouver un espace pour discuter de ces domaines de manière constructive». Et d’ajouter : «Aucun de nous n’a intérêt à une escalade ou à davantage d’instabilité.»  De son côté, Wang Yi a indiqué que les relations bilatérales se trouvent désormais à un «nouveau point de départ». 

«Nous espérons que les deux parties respecteront leurs préoccupations respectives, approfondiront la communication stratégique, établiront un cadre politique stable et à long terme (...) et favoriseront l’entrée des relations sino-britanniques dans une nouvelle phase de développement stable», a-t-il soutenu. Pékin et Londres se doivent d’être «des partenaires pour répondre aux défis mondiaux», a-t-il affirmé. 

Durant sa visite de deux jours, David Lammy entend trouver un point d’équilibre entre le renforcement des liens avec la Chine, partenaire commercial majeur, et l’évocation des questions sensibles. Comme il doit également rencontrer des chefs d’entreprises britanniques à Shanghai (est). Sa venue constitue également l’occasion de confirmer le réchauffement relatif des liens diplomatiques, après les tensions liées notamment aux critiques récurrentes du Royaume-Uni sur la répression par la Chine du mouvement pro-démocratie à Hong Kong. Les deux pays se sont aussi mutuellement accusés d’espionnage et Londres a dénoncé des cyberattaques contre ses élus.

La Chine et le Royaume-Uni avaient renoué le contact à haut niveau en août lors d’un appel téléphonique entre le président chinois Xi Jinping et Keir Starmer.  Les deux pays «ont des intérêts communs, notamment en ce qui concerne la transition vers une énergie verte à l’échelle mondiale, et des liens économiques profonds», a indiqué jeudi Londres.

Selon Londres, David Lammy va durant sa visite «demander instamment à la Chine de cesser son soutien politique et économique à l’effort de guerre russe». 

La Chine appelle à des pourparlers de paix et au respect de l’intégrité territoriale de tous les pays, sous-entendu Ukraine comprise. Mais elle n’a jamais condamné la Russie pour son intervention, lancée en 2022, et les liens économiques  et militaires Pékin-Moscou se sont même renforcés depuis cette date.

Le Royaume-Uni est membre de l’Aukus avec les Etats-Unis et l’Australie. Dans le cadre de cette alliance, les trois pays ont lancé, en mars 2023, un programme de coopération concernant les sous-marins nucléaires. L’accord a suscité l’ire de Pékin. Aucun pays «ne doit s’engager dans des alliances prenant pour cible les intérêts d’un pays tiers», a déclaré en la circonstance l’ambassade chinoise aux Etats-Unis. 

«Tout particulièrement, ces pays devraient abandonner leur mentalité de guerre froide et leur idéologie portant préjudice» à un pays tiers. Cet accord est «extrêmement irresponsable», a affirmé le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian, pour qui, il «sabote gravement la paix et la sécurité de la région et donne un nouveau coup de fouet à la course aux armements».

Londres est aussi membre de l’alliance dite «Five Eyes» dans le renseignement avec l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis.
 

Pomme de discorde

Une des questions les plus sensibles  envenimant les relations entre les deux pays consiste aux yeux de Londres la campagne de Pékin pour limiter la liberté de la presse et les manifestations à Hong Kong.
Londres critique les lois sur la sécurité nationale dans le territoire et déplore une érosion des libertés civiles. Mais la Chine avance qu’elle a ainsi réussi à rétablir l’ordre après les manifestations et émeutes. Elle voit toute critique comme une ingérence dans ses affaires intérieures.

Avant le déplacement de David Lammy en Chine, Keir Starmer avait appelé à la libération du magnat des médias Jimmy Lai, une figure majeure du mouvement pour la démocratie à Hong Kong, actuellement emprisonné pour «atteinte à la sécurité nationale». A la fin du XVIIe siècle, la Compagnie anglaise des Indes orientales commence à faire des affaires en Chine et y exporte de l’opium. Le gouvernement chinois proteste. La première guerre de l’opium est déclenchée. Pékin est contraint de demander la paix. D’où la signature du traité de Nankin le 29 août 1842. Il met fin au conflit et proclame la cession de l’île de Hong Kong. A l’issue de la deuxième guerre de l’opium (1856-1860), le Royaume-Uni récupère la péninsule de Kowloon. 

En 1898, il négocie un bail de 99 ans sur Hong Kong. En 1984, le Royaume-Uni de Margaret Thatcher et la Chine de Deng Xiaoping signent un accord sur la rétrocession de Hong Kong. En échange, Pékin s’engage à respecter temporairement le système économique capitaliste qui y règne. C’est le principe «Un pays, deux systèmes». 

Le 1er juillet 1997, Hong Kong a été rétrocédé à la Chine. Le territoire en question dispose du statut de Région administrative spéciale (RAS) de la République populaire de Chine. C’est pourquoi on parle d’un territoire «semi-autonome», statut valable jusqu’en 2047. Un territoire qui a sa propre Loi fondamentale (équivalent d’une Constitution) qui prévoit en principe des élections au suffrage universel. Il dispose de sa propre monnaie, le dollar hong-kongais, indexé sur le dollar américain. Comme il possède son propre système judiciaire, mais aucune indépendance en matière de diplomatie et de défense. 

En 2010 apparaît le mouvement contre l’éducation patriotique, face à la volonté de changer les manuels d’éducation civique de Hong Kong et d’imposer la vision du Parti communiste. 

Une grande manifestation est déclenchée. A l’automne 2014, Hong Kong a connu des manifestations populaires, le «mouvement des parapluies», une vaste mobilisation en faveur de l’autodétermination et de la démocratie. Mais Pékin n’a pas cédé aux contestataires. 

En 2018, les autorités hongkongaises ont en interdit le parti indépendantiste HKNP, estimant qu’il «avait un objectif clair visant à faire de Hong Kong une république indépendante».

 

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