Le football algérien traverse une période sans précédent. Pour la première fois dans l’histoire du sport national, un ancien président de la Fédération algérienne de football (FAF) est incarcéré. Kheireddine Zetchi, à la tête de la FAF entre 2017 et 2021, a été placé sous mandat de dépôt hier mercredi 27 novembre 2024 sur ordre du juge d’instruction du pôle pénal national économique et financier de Sidi M’hamed, à Alger.
Transféré à la prison de Koléa après son audition, cet homme d’affaires de 59 ans, également fondateur du club Paradou AC, est impliqué dans une enquête portant sur des soupçons de corruption, de détournement de fonds publics et d’octroi de privilèges injustifiés.
Cette décision s’inscrit dans une enquête approfondie menée depuis plusieurs mois. Au cœur des accusations figurent des contrats controversés avec l’équipementier Adidas, des primes en devises accordées à des joueurs locaux et d’autres irrégularités présumées ayant marqué les mandats de Zetchi et de ses successeurs, Charaf-Eddine Amara et Djahid Zefizef. Ces derniers avaient également été entendus en octobre dans le cadre de cette même affaire. Zetchi n’est pas le seul à être écroué.
En effet, début novembre, trois anciens cadres de la FAF, dont deux ex-secrétaires généraux et un directeur de l’administration générale, avaient été placés sous mandat de dépôt, tandis que deux membres du bureau fédéral étaient soumis à un contrôle judiciaire. En tout, 14 cadres de la Fédération, incluant trois anciens présidents, sont impliqués dans des accusations d’«abus de fonction», de «détournement de deniers publics» et de «conclusion de contrats en violation des procédures légales». Alors que ce scandale ébranle les plus hautes sphères du football algérien, le nouveau ministre des Sports, Walid Sadi – lui-même ancien président de la FAF – est engagé pour lancer une série de mesures inédites à l’effet de restaurer la transparence et la confiance dans le secteur. Parmi elles, des audits approfondis des finances des clubs de Ligue 1 seront menés par des équipes de la Cour des comptes, une première dans le pays.
«Cette initiative vise à mettre fin à des décennies de gestion opaque et à aligner notre football sur des standards professionnels reconnus internationalement», a déclaré à El Watan une source proche du ministère.
Depuis l’introduction du professionnalisme en 2010, le football algérien peine à instaurer des pratiques financières conformes aux normes. Les clubs, largement soutenus par des entreprises publiques, souffrent de déficits chroniques et d’une inflation des salaires. Désormais, chaque dépense devra être justifiée sous peine de sanctions sévères ou de poursuites judiciaires.
Cette affaire intervient dans un contexte où l’équipe nationale brille sur le terrain, comme en témoigne sa récente victoire 5-1 contre le Togo à Annaba lors des éliminatoires de la CAN-2024. Pourtant, ces succès sportifs risquent d’être éclipsés par l’ampleur des scandales autour de la FAF. «Avec ces nouvelles régulations, nous espérons entrer dans une ère de gouvernance exemplaire. La transparence et la responsabilité doivent devenir les piliers du football algérien», a souligné un dirigeant de club évoluant en nationale 1.
Le pôle pénal économique et financier a réitéré son engagement à mener cette enquête avec impartialité, tout en promettant une communication transparente des résultats.