Avec l’entrée en vigueur de l’accord de cessez-le-feu entre Hamas et Israël, les premiers convois d’aide humanitaire ont franchi, hier matin, les frontières de Ghaza dès les premières minutes de la trêve, sachant que celle-ci n’a été effective qu’à partir de 11h15, heure locale (10h15 heure d’Alger), avec trois heures de retard.
«Les premiers camions de fournitures ont commencé à entrer 15 minutes plus tard (après le début du cessez-le-feu)», a annoncé Jonathan Whittall, chef par intérim du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), hier sur X. «Ces derniers jours, les partenaires humanitaires ont déployé des efforts considérables pour charger et préparer la distribution d’une aide massive dans l’ensemble de la bande de Ghaza», a-t-il ajouté.
De son côté, Tom Fletcher, chef du bureau de l’OCHA en Palestine, a rassuré lui aussi que l’aide humanitaire était prête à être acheminée vers Ghaza. «Nous sommes aux points de passage, prêts à faire circuler des convois d’aide humanitaire vers Ghaza à grande échelle et à un rythme soutenu. De la nourriture et des médicaments pour les survivants. Il n’y a pas de temps à perdre», a-t-il posté sur la plateforme X.
Selon un responsable égyptien cité par l’AFP, «197 camions d’aide et 5 de carburant sont entrés par les passages de Kerem Shalom (Karam Abou Salem, ndlr) entre Israël et Ghaza et celui de Al Oga et Nitzana, à la frontière entre l’Egypte et Israël».
Pourquoi il faut réhabiliter l’UNRWA
Le commissaire général de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, a annoncé pour sa part que l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens dispose de 4000 camions chargés d’aide humanitaire, dont la moitié transportant de la nourriture et de la farine.
Ce cortège attend toutefois le signal de l’entité sioniste pour accéder à l’enclave assiégée. M. Lazzarini a souligné qu’une fois que l’aide humanitaire commencera à affluer, «les attaques contre les convois humanitaires à Ghaza devraient diminuer après le cessez-le-feu», rapporte l’agence Wafa. Philippe Lazzarini a indiqué que l’UNRWA est déterminée à poursuivre ses opérations à Ghaza et en Cisjordanie occupée, malgré l’interdiction de ses activités par le gouvernement israélien, interdiction qui sera effective à compter du 30 janvier 2025. «L’UNRWA est la seule agence capable de fournir des services essentiels de santé et d’éducation à Ghaza», a-t-il insisté.
Juliette Touma, directrice de la communication de l’Agence onusienne pour les réfugiés palestiniens, a assuré dans une interview à CNN peu avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu : «Nos équipes sont sur le terrain. Nous avons des milliers d’employés de l’UNRWA qui sont des travailleurs humanitaires expérimentés. Dès que l’aide sera autorisée à entrer dans la bande de Ghaza, nous commencerons à la livrer.» Sam Rose, responsable de l’UNRWA dans la bande de Ghaza, fera remarquer dans une déclaration à la même chaîne d’information américaine : «Les deux tiers de l’aide alimentaire qui sont en attente à l’extérieur de la bande de Ghaza appartiennent à l’UNRWA. L’aide est là, à la frontière.
Nous sommes prêts à l’acheminer. Nous avons le réseau de distribution. Nous avons le personnel sur le terrain.» Une autre agence onusienne, le PAM, le Programme alimentaire mondial, a mobilisé également ses équipes en force en prévision de l’accroissement des niveaux d’aide autorisés à entrer à Ghaza. «Les premiers camions du PAM ont commencé à quitter l’Egypte pour entrer dans la bande de Ghaza en passant par Kerem Shalom/Karam Abu Salem. Le PAM peut envoyer environ 30 000 tonnes de nourriture chaque mois pour atteindre plus d’un million de personnes», informe le PAM via les réseaux sociaux.
Et de souligner : «Tous les points de passage doivent rester ouverts et fonctionner de manière efficace et fiable.» «Depuis plus de 15 mois, la guerre à Ghaza prive les populations des éléments essentiels à leur survie : accès sécurisé à la nourriture, à l’eau, aux abris et à l’éducation. Un cessez-le-feu est un premier pas, mais la sécurité et l’accès doivent être rétablis pour atteindre tous ceux qui en ont besoin», plaide le PAM. Selon Al Jazeera qui cite des médias israéliens, «plus de 500 camions d’aide» étaient sur le point d’entrer hier dans la bande de Ghaza. L’accord de cessez-le-feu prévoit «d’intensifier l’acheminement de l’aide humanitaire dans la bande de Ghaza au cours des prochains jours», précise la même source.
«Il n’y a pas de temps à perdre»
Comme beaucoup d’ONG, Amnesty International a appelé à l’envoi sans plus attendre d’une aide intensive vers l’enclave martyrisée où les besoins humanitaires sont incommensurables. «Il n’y a pas de temps à perdre. Israël a bloqué et entravé de manière continue et délibérée l’acheminement de l’aide humanitaire à Ghaza : les civils ont été confrontés à des niveaux de famine sans précédent, et des enfants sont morts de faim.
La communauté internationale, qui n’a pas réussi jusqu’à présent à persuader Israël de respecter ses obligations légales, doit veiller à ce qu’il autorise sans attendre l’acheminement de produits vitaux dans toutes les zones de la bande de Ghaza occupée, afin d’assurer la survie de la population palestinienne», a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, à travers un communiqué diffusé par l’ONG. «Il s’agit notamment de garantir l’entrée de fournitures médicales vitales pour soigner les blessés et les malades, et de faciliter la réparation des centres médicaux et des infrastructures essentielles.»
Mme Callamard a également appelé à la levée immédiate du blocus illégal imposé à la bande de Ghaza et qui asphyxie la population palestinienne. «Si le blocus illégal imposé par Israël à Ghaza n’est pas rapidement levé, ces souffrances vont perdurer», a-t-elle prévenu.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il faudrait au moins 10 milliards de dollars pour reconstruire le système de santé à Ghaza. C’est ce qu’a affirmé Rik Peeperkorn, responsable de l’OMS pour les territoires palestiniens, cité par l’AFP.
Il s’exprimait lors d’une conférence de presse tenue jeudi à Genève. «Nous savons tous que les destructions à Ghaza sont massives. Je n’ai jamais vu cela ailleurs dans ma vie», a-t-il confié. Rik Peeperkorn a insisté sur le fait que la reconstruction de Ghaza est une «responsabilité collective des Etats membres de l’OMS,
y compris Israël». Mustapha Benfodil
L’appel du Forum des journalistes palestiniens
Le Forum des journalistes palestiniens a appelé les médias internationaux à prendre des mesures urgentes pour documenter les crimes sionistes dans la bande de Ghaza, qui ont entraîné un génocide et des souffrances humaines sans précédent. Dans un communiqué publié hier, le Forum a affirmé que «l’absence de couverture médiatique directe représente une soumission au blocus injuste imposé à la réalité de la situation à Ghaza, permettant ainsi à l’occupation de poursuivre ses tentatives de dissimulation de ses crimes contre les civils innocents». Il a souligné que «la présence des médias internationaux à Ghaza est essentielle pour garantir la documentation des crimes et violations en temps opportun». En effet, selon la source, «le passage du temps sans que les équipes médiatiques ne parviennent sur les lieux des crimes facilite pour l’occupant la dissimulation des preuves et l’effacement des traces des crimes, empêchant ainsi la vérité d’atteindre le monde et entravant la quête de justice pour les victimes». Le Forum des journalistes palestiniens a averti que le maintien du blocus médiatique depuis 15 mois pendant la guerre d’extermination à Ghaza constitue une «violation flagrante de la liberté de la presse et du droit des peuples à connaître la vérité». Il a appelé les journalistes et les institutions médiatiques à «refuser les diktats (sionistes) et à ne pas se soumettre aux tentatives de les empêcher d’accomplir leur devoir moral et professionnel». Le Forum a, enfin, réaffirmé que documenter les crimes et les transmettre au monde «n’est pas seulement une responsabilité professionnelle, mais un devoir humanitaire et moral qui exige du courage et de la persévérance face à tous les obstacles».(APS)