Un plan national de prévention s’impose d’urgence : Monoxyde de carbone, ce tueur silencieux

11/01/2023 mis à jour: 08:03
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C’est un véritable drame qui se déroule à huis clos dans le pays. Régulièrement sont enregistrés des décès de personnes, souvent des familles entières, par intoxication au monoxyde de carbone, victimes de leurs maladresses ou ignorance au moment d’installation ou de l’utilisation de matériels fonctionnant au gaz. Régulièrement, avant chaque hiver, les services de la Protection civile déploient des campagnes de sensibilisation mais qui ne suffisent pas à stopper l’hécatombe. Aussi, comme pour la prévention routière s’impose en urgence aux autorités, la mise en place d’un plan national de prévention de l’usage du gaz domestique ou industriel est tout aussi nécessaire. Ces dernières quarante-huit heures, 19 personnes sont décédées, neuf à Bou Saâda d’une même famille dans leur domicile. Il s’agit d’un couple, leurs cinq enfants et deux proches. A Aïn Oulmane dans la wilaya de Sétif, c’est un couple et leurs quatre enfants qui ont été découverts, dans la nuit de lundi à mardi, intoxiqués par des émanations toxiques provenant de leur appareil de chauffage. Lundi soir, ce sont deux autres personnes mortes asphyxiées par des émanations de gaz à Mostaganem et deux autres personnes décédées à Ain M'lila. Ce regain de décès trouve son explication dans le retour du grand froid qui pousse les citoyens, notamment à l’intérieur du pays, à vouloir chauffer leur domicile avec les appareils de chauffage fonctionnant souvent au gaz ou au fioul. Mais utiliser une chaudière, un chauffe-eau, un groupe électrogène, une cuisinière ou tout autre appareil à combustion présente un risque d'intoxication au monoxyde de carbone (CO). Selon le Dr Noemi Perez, pédiatre française, le monoxyde de carbone est un gaz asphyxiant, inodore, incolore très toxique : dans un espace clos, il peut tuer en moins d'une heure. 

Le monoxyde de carbone (CO) se dégage lorsqu'un appareil à combustion au gaz, au bois ou au charbon par exemple, fonctionne mal. La combustion ne se fait pas correctement et dégage ce CO hautement toxique. La plupart du temps, c'est une chaudière qui est en cause, ce qui explique une recrudescence des intoxications en période hivernale. Mais ce qui rend le monoxyde de carbone dangereux pour l'organisme est le fait qu'il se fixe sur l'hémoglobine et bloque le transport de l'oxygène dans le sang. Il empêche également l'oxygène de se fixer sur les organes qui en ont besoin. De fait, ces différents organes ne sont plus suffisamment alimentés en oxygène, ce qui conduit à la mort. Le monoxyde de carbone est produit par la combustion incomplète d'un composé carboné en raison d'une quantité d'oxygène insuffisante. Ce phénomène est dû à soit une quantité insuffisante d'oxygène dans l'air (pièce calfeutrée, aération insuffisante, entrée d'air bouchée…), soit à la présence d'impuretés dans les matières carbonées, objets de la combus-tion, soit à une évacuation insuffisante des gaz de combustion (conduit mal raccordé, cheminée obstruée ou mal ramonée…), soit à une utilisation prolongée ou inadaptée d'un appareil, soit enfin à un dysfonctionnement de l'appareil utilisé pour la combustion. Dans les habitations, les principales sources de monoxyde de carbone sont les systèmes de chauffage (bois, charbon, gaz, butane, essence, fuel, éthanol...) ou de production d'eau chaude (chaudières), les appareils de cuisson (cuisinière, barbecue, brasero), les cheminées, les moteurs de véhicule dans un garage sans aération et les groupes électrogènes placés dans un garage ou la cave. Les symptômes de l'intoxication au monoxyde de carbone se manifestent rapidement et peuvent évidemment affecter toutes les personnes se trouvant dans le même endroit. Il s'agit le plus souvent de maux de tête, nausées et/ou des vomissements, d'une fatigue musculaire, de douleurs thoraciques ou abdominales, de troubles de l'équilibre, d'une confusion voire de brèves pertes de connaissance. A un stade plus avancé, des troubles cardiaques (troubles du rythme et ischémie coronarienne), des troubles pulmonaires (œdème aigu du poumon), des troubles musculaires et viscéraux (pancréatite) peuvent advenir. Enfin, des manifestations neurologiques telles que les convulsions, apraxie (troubles de mouvements), amnésie, agnosie (trouble de reconnaissance des objets), parkinsonisme, cécité corticale, incontinence peuvent aussi faire partie des symptômes initiaux de l'intoxication. Le coma témoigne bien sûr d'une urgence vitale et nécessite une prise en charge immédiate. Chez la femme enceinte, l'intoxication au monoxyde de carbone comporte un risque élevé de mortalité ou d'atteintes chez le fœtus Une exposition régulière, même à de faibles doses de monoxyde de carbone peut se manifester par une baisse des performances intellectuelles, des difficultés d'apprentissage, des maux de tête chroniques, une altération de l'acuité visuelle et auditive «voire même des symptômes parkinsoniens» ?  Grave et non traitée, l'intoxication au monoxyde de carbone est mortelle. Une intoxication au monoxyde de carbone peut parfois engendrer des séquelles neurologiques et cardiaques à long terme qui laissent des symptômes invalidants. «Elle augmente également le risque de développer une maladie cardiovasculaire dans les dix ans qui suivent»

Le Dr Noemie Perez ajoute qu’il existe aussi des symptômes neurologiques à distance, malgré un traitement bien administré et suivi. Ceux-ci peuvent apparaître chez des patients qui semblaient pourtant avoir complètement récupéré d'une intoxication aiguë. Ils apparaissent après une période de latence de deux jours à cinq semaines. Ce syndrome dit «post intervallaire» se manifeste notamment par des symptômes proches de ceux de la maladie de Parkinson, par des céphalées chroniques, des troubles de la vision, des changements d'humeur ou des troubles de la personnalité. 

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