La préservation du patrimoine matériel et immatériel passe par le maintien des traditions ou expressions héritées des ancêtres et transmises aux descendants comme les arts du spectacle, les pratiques sociales, les rituels et les événements festifs, ainsi que l’artisanat traditionnel. Le mouvement associatif féminin se mobilise à Tigzirt, entre autres, pour la revitalisation du patrimoine culturel local.
Dans la commune d’Iflissen, outre celles de Taksebt et d’Arvi (lauréat du prix du village le plus propre de Tizi Ouzou), une autre association a vu le jour à Tizi Tamlelt, il s’agit de celle de Tulas n’Yemma Akerma. L’objectif de cette nouvelle création est de mettre en œuvre des programmes visant notamment la promotion de l’activité culturelle au niveau de cette bourgade.
A peine mise sur pied, cette structure a organisé, la semaine dernière, une grandiose manifestation qui a drainé des centaines de personnes.
D’ailleurs, dans le cadre des activités de l’inauguration officielle de l’aire de jeu du saint Yemma Akerma, une panoplie de festivités a marqué cette journée qui a été clôturée en apothéose. Il y avait ainsi des chants traditionnels avec la chorale du village, accompagnée de la musique de Karim, fils du regretté artiste Moh Ouali Hakem, décédé il y a quelques années, laissant derrière lui une œuvre palpitante. Des chérubins, vêtus de tenues traditionnelles, ont donné le ton à des chants envoûtants et enveloppés dans une ambiance magnifique.
C’est tout le village qui s’emballe dans une atmosphère de mobilisation et de solidarité afin de réussir tout ce qui peut offrir à Tizi Tamlelt des moments magnifiques, surtout aux enfants et aux femmes qui se sont régalés, une journée durant, à travers des festivités qui remettent au goût du jour certaines valeurs ancestrales. Des femmes ont ainsi récité ichewiqen comme au bon vieux temps.
Du théâtre, de la poésie et des activités ludiques, récréatives, divertissantes, amusantes au grand bonheur des enfants ont meublé également le menu de cette journée. L’autre activité, la plus marquante de l’événement, est la simulation d’un mariage, selon les traditions avec bijoux et habits d’antan ainsi que le henné, cette cérémonie symbolique qui permet de célébrer le passage d’une femme de son statut de fiancée à celui d’épouse.
L’objectif consiste à faire découvrir, surtout à la génération montante, des traditions ancestrales vouées inexorablement à l’oubli. Parallèlement à ces festivités et une exposition d’objets traditionnels, de robes kabyles, de livres sur l’histoire et la culture était également de la partie durant cette manifestation.
Cette dernière se voulait aussi un moment de métissage interculturel surtout avec la présence de Macha Bouanfel, une Russe habitant le village depuis plus de 12 ans, qui a animé un stand, avec des membres de sa famille, venus de Russie, pour faire découvrir aux présents quelques aspects traditionnels de la culture culinaires de son pays d’origine. Une initiative très appréciée aussi bien par les habitants de Tizi Tamlelt que par les visiteurs des autres villages de la région.
Rappelons, par ailleurs, que toutes ces activités s’inscrivent dans le cadre d’un programme concocté pour l’inauguration du stade Chahid Ali Bouanfel qui a été «ressuscité», à l’occasion, par les membre de sa famille, dont son neveu Mohamed Bouanfel et des moudjahidine du village, à l’image de Mohamed Saïd Azzouzi.
La cérémonie s’est tenue en présence des autorités locales : le maire d’Iflissen, Athmane Zarir, le président d’APC de Tgzirt, le vice- président de l’APW ainsi que le chef de daïra de Tigzirt et le représentant de l’ONEC d’Iflissen ont pris part à cet hommage.
Ce fut ainsi un moment d’histoire et de mémoire dans un village qui a grandement contribué durant la guerre de Libération nationale. Les initiateurs de cette journée, appuyés par la contribution de tous les citoyens du village, estiment qu’il s’agit d’une activité qui s’ajoute aux multiples actions entreprises depuis plusieurs années dans le cadre des travaux d’intérêt général au sein du village. Il n’est pas justement vain de rappeler que les habitants de Tizi Tamlelt ont réalisé d’importants projets grâce à la mobilisation de la population.
Chacun y a participé en fonction de sa disponibilité, même les émigrés et les villageois, résidant à l’extérieur, apportent souvent leur précieuse contribution à tout ce qui se fait dans l’intérêt commun. Il faut dire, en outre, que l’esprit de solidarité et de communion qui règne au village attire vraiment l’attention.
Les visiteurs venus à l’activité de vendredi dernier ont d’ailleurs beaucoup apprécié, surtout l’organisation assurée par les villageois qui ont eu déjà l’expérience à gérer ce genre d’événements. «J’ai beaucoup aimé ce qui a été organisé à l’occasion de l’inauguration du stade de Tizi Tamlelt qui viendrait de ‘tumlilt’, cette argile blanche que nos femmes utilisaient pour peindre nos maisons traditionnelles à l’odeur si particulière. Je le connaissais de nom à travers le défunt chanteur Moh Ouali Tizi Tamlelt.
Ce village a une particularité. Son saint est une sainte qui répond au nom de Ima Karma», tel est le commentaire posté par l’écrivaine Malika Arabi avec sa photo. «Là, juste derrière moi, en plus de ces magnifiques femmes aux couleurs chatoyantes, on voit, je ne dirai pas un mausolée, mais presque, qui porte le nom de cette sainte. Ici, on jure en évoquant Ima Karma. Ici, hommes et femmes s’y rencontrent lors de grands événements se passant dans le village. Un village qui a une vue imprenable sur la Méditerranée et qui fait la fierté de toute la Kabylie maritime», a-t-elle écrit avec un sentiment de nostalgie lié à l’évocation de notre passé où le bonheur était harmonieusement mêlé à toutes ces belles choses de la vie d’antan.
Ce n’est pas la première fois qu’une manifestation culturelle similaire a eu lieu à Tizi Tamlelt. Le 12 janvier dernier, le comité de village avait célébré Yennayer avec un riche programme d’activités qui ont drainé des milliers de personnes venues des localités de Tizi Ouzou et même d’autres wilayas.
Il y a aussi le vibrant hommage rendu au chanteur Moh Ouali Hakem qui a été vraiment une grande réussite compte tenu de la foule nombreuse qui a assisté à cet événement animé par des artistes connus, comme Yasmina et Cherif Hamani. Pour revenir aux festivités de vendredi dernier, Sadjia Djerrah, présidente de l’association Tulas n’Yema Akerma, et Abderrahmane Baouche, qui remplace, depuis le mois d’août dernier, Rabah Tafouzelt à la tête du comité, estimant que cet événement fait suite à une certaine dynamique citoyenne ancrée à Tizi Tamlelt depuis des décennies.
«En mon nom et au nom du village de Tizi Tamlelt, je remercie tous ceux qui ont contribué à la réussite de cette occasion. Depuis plus d’un mois, nous préparons cette inauguration qui a été couronnée de succès. Je remercie tout particulièrement nos femmes qui ont honoré notre village», a déclaré Sadjia Djerrah. Enfin, pour le préserver, le patrimoine immatériel doit être recréé en permanence et transmis d’une génération à l’autre afin de maintenir la diversité culturelle.