Théâtre municipal de Sétif : Un monument à l’agonie

01/03/2022 mis à jour: 05:38
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Ce témoin de l’histoire de la ville est victime de la mauvaise gestion

Le dicton «Les apparences sont souvent trompeuses» sied parfaitement au théâtre municipal de Sétif. Très belle œuvre architecturale, la structure de 330 places, inaugurée en 1896 vit des moments sombres et affligeants à la fois. 

Prenant son courage à deux mains, le comédien Toufik Mezaache qui n’avait pas le droit, dit-il, de «couvrir» les atteintes faites à l’institution, l’autre témoin de l’histoire de la ville a attendu le moment opportun pour mettre à nu la gestion catastrophique d’un grand patrimoine culturel tombant en ruine. En lanceur d’alerte, l’artiste a pris la parole, samedi, à l’issue du spectacle «Koumachia» suivi par un public nombreux. 

Le réalisateur de la pièce refuse d’empocher les 40 000 DA, cachet de la représentation. Il en fait don à la direction de l’Office communal pour la culture et le tourisme, pour procéder au nettoyage des lieux, à la réparation des chaises, du matériel et des sanitaires fermés au public. 

Faisant le tour de la toile, la vidéo postée en ce sens montre l’ampleur des dégâts occasionnés à l’institution. «En tant qu’artiste et enfant de la ville, je ne peux être complice d’une telle situation. Je refuse le cachet et la gratuité des spectacles. Le public à droit au respect. 

À Constantine, Tizi Ouzou et ailleurs les représentations culturelles ne sont pas gratos et les théâtres affichent complet. Ce n’est malheureusement pas le cas à Sétif où la médiocrité s’est enracinée. Je suis conscient que ma franchise dérange, la vérité doit être dite. 

C’est le devoir de tout artiste engagé», souligne non sans colère le comédien mettant le doigt sur la plaie. En manque d’arguments, le directeur de l’office Khaled Mehnaoui essaye de justifier l’injustifiable et de tout mettre sur le dos de l’absent, en l’occurrence l’ancienne équipe communale. 

D’après lui, les «absents» n’ont pas fait le nécessaire pour redorer le blason du théâtre. Faisant fausse route, le premier responsable de l’office oublie que la commune du temps de Mohamed Dib et Nacer Ouahrani avait mis le paquet dans la rénovation et la restauration du théâtre municipal victime de la négligence, du laisser-aller et de la mauvaise gestion. 

Outrés par les images défilant sur la toile, d’anciens scouts du groupe El Hayat élisant domicile dans un coin de Zkak Etamara (rue des vendeurs de dattes) s’insurgent. «Le théâtre municipal représente notre jeunesse. Sétif des années 1970- 980 n’était pas dotée d’une maison de la culture, les SMA très productifs à l’époque, n’activaient qu’au niveau du théâtre plein à craquer à la moindre manifestation rehaussée par la présence de nombreuses familles. Il est regrettable de voir un tel patrimoine pourtant le nom d’un scout, d’un homme de lettres et de culture, d’un grand Chahid Hacen Belkired, dans un tel état. Il ne faut pas se taire. On n’a pas le droit de laisser passer de telles pratiques portant un préjudice à notre histoire et à notre patrimoine», fulminent les anciens. 

En attendant une réaction salvatrice de la nouvelle équipe communale ayant en outre promis de régler le problème du cinéma «Variétés» fermé depuis plus de 30 ans, le théâtre municipal Hacen Belkired, s’enfonce inexorablement dans le sable mouvant.  

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