Pékin a déclaré que ses troupes sont en «alerte maximale» après le passage dans le détroit de Taïwan de deux navires appartenant aux Etats-Unis et au Canada au début du mois.
Vingt-huit avions militaires ont été détectés près des côtes de Taïwan hier, la plupart traversant la ligne médiane du détroit, ont indiqué les autorités de l’île, citées par l’AFP.
Selon le ministère taiwanais de la Défense, 20 avions détectés hier ont franchi la ligne médiane séparant Taïwan de la Chine continentale, pénétrant dans la zone de défense aérienne de l’île au sud-est et au sud-ouest.
Le ministère a également déclaré que Pékin mène «des exercices à longue portée et des entraînements», ajoutant surveiller la situation avec des avions et navires de patrouille. Pékin considère l’île autonome comme une partie de son territoire dont elle pourrait s’emparer un jour par la force. Ainsi, il s’oppose à tout contact officiel entre les pays occidentaux et l’ex-Formose.
Des avions militaires font régulièrement des incursions dans la zone d’identification de défense aérienne (Adiz) de Taïwan. Une Adiz est une zone bien plus étendue qu’un espace aérien, dans laquelle les autorités d’un territoire demandent que les aéronefs étrangers s’identifient pour des raisons de sécurité nationale.
La semaine dernière, Taipei a fait état d’un nombre croissant d’incursions d’avions et de navires chinois. Pékin a déclaré que ses troupes sont en «alerte maximale» après le passage dans le détroit de Taïwan de deux navires appartenant aux Etats-Unis et au Canada au début du mois. Entre mercredi et jeudi matin, Taipei a déclaré avoir détecté 68 avions et 10 navires de l’armée chinoise.
Ces appareils se dirigeaient vers le Pacifique occidental pour rejoindre le porte-avions chinois Shandong dans le cadre d’un entraînement, selon le ministère taïwanais de la Défense.
Le Shandong est l’un des deux porte-avions opérationnels de la flotte chinoise. Il a été détecté lundi à environ 60 milles nautiques (111 kilomètres) au sud-est du point le plus méridional de l’île. Pékin n’a jusqu’à présent pas fait de commentaires sur ces manœuvres.
En avril, Pékin a mené des exercices militaires simulant un encerclement de l’île, après une rencontre entre la présidente taiwanaise, Mme Tsai Ing-wen, et le président de la Chambre des représentants américaine, Kevin McCarthy, en Californie. Taïwan a alors détecté 71 avions de combat en 24 heures, égalant un déploiement record atteint en décembre 2022.
Le 19 août, la Chine a organisé des manœuvres militaires autour de Taïwan à titre de «sévère mise en garde», après une escale aux Etats-Unis du vice-président de l’île, William Lai. La Chine a réagi avec colère en la circonstance qualifiant W. Lai de «fauteur de troubles».
Taïwan a déclaré un peu plus tard avoir détecté 42 incursions d’avions militaires chinois dans sa zone de défense aérienne, ajoutant que huit navires chinois ont également participé aux manœuvres. Parmi ces incursions, 26 avions de guerre ont franchi la ligne médiane du détroit de Taïwan, a précisé dans un communiqué le ministère de la Défense de l’île.
«Sévères mises en garde»
Selon l’agence officielle Chine Nouvelle, ces manœuvres sont destinées à tester la capacité des navires et avions chinois «à prendre le contrôle des espaces aérien et maritime» et à combattre «dans des conditions réelles».
Elles devaient également servir «de sévères mises en garde à la collusion des séparatistes indépendantistes de Taïwan avec des éléments étrangers et à leurs provocations», a ajouté l’agence. Taïwan a condamné «ce comportement irrationnel et provocateur» et a promis d’envoyer «les forces appropriées pour y répondre (...) afin de défendre la liberté, la démocratie et la souveraineté de Taïwan».
Le ministère taïwanais de la Défense a, pour sa part, déclaré que «le fait de mener un exercice militaire (...) sous un faux prétexte non seulement ne contribue pas à la paix et à la stabilité dans le détroit de Taïwan, mais met également en évidence la mentalité militariste» chinoise.
William Lai a reçu l’investiture du Parti démocratique progressiste (DPP) pour briguer la présidence en janvier 2024 et succéder à la présidente Tsai Ing-wen, dont le second mandat s’achèvera alors. Les relations Pékin-Taipei se sont envenimées en 2016 avec l’arrivée à la présidence de Tsai Ing-wen. La dirigeante du parti DPP défend «l’identité nationale» de l’île et réclame un dialogue «d’égal à égal» avec la Chine. Pékin suspend toute communication et accentue sa pression diplomatique et économique sur l’île.
Les Etats-Unis ont accordé leur reconnaissance diplomatique à la République populaire de Chine en 1979. Néanmoins, ils restent un allié de Taïwan ainsi que son principal fournisseur d’armes. Le président américain Donald Trump a appelé au téléphone Tsai Ing-wen, un contact direct qui est une première depuis des décennies.
Son administration accepte ensuite de vendre pour 1,4 milliard d’euros d’armement à Taïwan. Début octobre 2021, Taipei et Washington ont confirmé la présence de soldats américains sur l’île. Le même mois, le ministre de la Défense taiwanais, Chiu Kuo-cheng, a prévenu que l’armée chinoise aurait la «pleine capacité» d’attaquer le pays en 2025. En mai 2022, le président américain Joe Biden a répondu par l’affirmative à la question de savoir si les Etats-Unis défendraient militairement Taïwan.
Rapidement, la Maison-Blanche a précisé que la position américaine sur Taïwan n’a pas changé et a réitéré son engagement envers la politique d’«une seule Chine». En août de la même année, la présidente de la Chambre des représentants américaine, Nancy Pelosi, a effectué une visite dans l’île suscitant des représailles chinoises, avec des manœuvres militaires de grande envergure encerclant l’île le 4 août, et des tirs de missiles une semaine durant.