Après l’annonce de l’Exécutif, le Parlement finlandais doit examiner aujourd’hui le projet d’adhésion, avec un vote prévu, selon le président de la chambre. Samedi, le parti social-démocrate de la Première ministre Sanna Marin a exprimé son soutien.
La Finlande a annoncé hier sa candidature à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), rapporte l’AFP. Le président finlandais et un conseil gouvernemental «ont conjointement décidé que la Finlande allait demander à devenir membre de l’OTAN», a déclaré le chef de l’Etat, Sauli Niinistö.
«C’est un jour historique. Une nouvelle ère s’ouvre», a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse. Après l’annonce de l’Exécutif, le Parlement finlandais doit examiner aujourd’hui le projet d’adhésion, avec un vote prévu, selon le président de la chambre.
Samedi, le parti social-démocrate de la Première ministre, Sanna Marin, a exprimé son soutien. Un peu plus tard, en Suède, lors d’une réunion extraordinaire, le parti social-démocrate au pouvoir a donné son feu vert à une candidature de Stockholm à l’OTAN.
Il a ouvert ainsi la voie à une demande d’adhésion par le gouvernement, conjointement avec la Finlande. La direction a décidé que le parti compte «contribuer à une candidature de la Suède à l’OTAN», ont indiqué les sociaux-démocrates dans un communiqué.
Avec ce feu vert du parti de la Première ministre Magdalena Andersson, la voie serait libre pour une annonce de candidature suédoise, après près de deux siècles de neutralité puis, depuis les années 1990, de non-alignement militaire. Formellement, les deux pays doivent ensuite transmettre leur candidature au siège de l’OTAN en vue de l’ouverture de négociations d’adhésion, qui nécessitent une unanimité des 30 membres actuels.
La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a indiqué hier que ces deux adhésions pourraient intervenir «très rapidement». Après les négociations d’adhésion qui peuvent être brèves, le processus de ratification parlementaire par les pays membres prend plusieurs mois.
L’écueil turc
La candidature des deux pays nordiques risque de se heurter à l’hostilité de la Turquie. Vendredi dans la marche de la Suède et de la Finlande vers l’OTAN, lorsque le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a affiché son hostilité à l’intégration des deux pays nordiques dans l’Alliance, qui compte actuellement 30 membres dont la Turquie.
Le chef de l’Etat turc a indiqué ne pas vouloir voir «se répéter la même erreur que celle commise au moment de l’adhésion de la Grèce», un voisin avec lequel Ankara entretient historiquement des relations compliquées. Il a notamment reproché à Helsinki et Stockholm de servir d’«auberge aux terroristes du PKK», le Parti des travailleurs du Kurdistan, considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis.
Le chef d’Etat turc cherche-t-il à obtenir des avantages en échange de son accord favorable à l’entrée des deux nouveaux candidats ? L’unanimité étant exigée, Ankara se trouve en position de bloquer le processus d’adhésion.
La Turquie est impliquée dans les pourparlers entre l’Ukraine et la Russie. Elle souhaite acquérir des avions de combat F-16 américains. Elle a initialement commandé et versé 1,4 milliard de dollars pour une commande d’avions de combat furtifs F-35, jamais livrés. L’ensemble du contrat a été gelé par les Etats-Unis en 2019 après l’achat par la Turquie du système antimissile russe S-400, perçu comme une menace pour le F-35.
Washington a alors exclu la Turquie de ce programme militaire. Hier, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, s’est montré conciliant envers la Finlande, mais a reproché à la Suède des déclarations «provocantes», lors des discussions à Berlin sur l’adhésion des deux pays à l’OTAN.
«Les déclarations de la ministre des Affaires étrangères de Suède ne sont malheureusement pas constructives. Elle continue de tenir des propos provocants», a affirmé le chef de la diplomatie turc devant la presse turque à Berlin, en marge de la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères de l’Alliance Atlantique.
En revanche, il a qualifié l’attitude de la Finlande de «très respectueuse» face aux «inquiétudes» d’Ankara. «Mais nous ne voyons pas la même chose chez la Suède», a-t-il observé. Et de poursuivre : «Nous soutenons depuis toujours la politique de portes ouvertes de l’OTAN (...) Mais le fait que ces deux pays soient en contact avec les membres d’une organisation terroriste, que la Suède leur envoie des armes et qu’ils imposent des restrictions aux exportations de matériel de défense vers la Turquie vont à l’encontre de l’esprit d’alliance.»
Lors de sa rencontre avec les deux ministres nordiques, ces dernières lui ont proposé d’entreprendre «un travail» pour «répondre aux inquiétudes de la Turquie», a-t-il ajouté. Il a indiqué qu'il attend de voir «les garanties» qui seront proposées par les deux pays.
De son côté, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, s’est dit «confiant», dans la possibilité pour les pays membres de l’Alliance de trouver un compromis avec la Turquie qui n’a pas l’intention, selon lui, de bloquer l’adhésion de la Finlande et de la Suède.
«Je suis confiant dans le fait que nous serons en mesure de trouver un terrain d’entente, un consensus sur la manière d’avancer sur les questions d’appartenance» à l’Alliance, a-t-il assuré à l’issue d’une réunion informelle hier des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN à Berlin. Il a ajouté que la Turquie, qui a manifesté son hostilité à une telle adhésion, a «clairement indiqué son intention de ne pas bloquer» l’entrée des deux pays nordiques.
A son tour, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a déclaré le même jour à Berlin que les Etats-Unis «soutiennent fortement» les demandes d’adhésion à l’OTAN de ces deux pays. «Les Etats-Unis soutiendraient fortement la candidature à l’OTAN de la Suède ou de la Finlande, si elles choisissaient de poser officiellement leur candidature à l’Alliance», a-t-il indiqué, après une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Alliance à Berlin, se disant «confiant dans un consensus» prochain entre les 30 membres en vue d’une adhésion de Helsinki et de Stockholm.
Samedi, le président finlandais a appelé son homologue russe, Vladimir Poutine, pour l’informer de la demande d’adhésion imminente de son pays, qui suscite l’hostilité de Moscou. Le président russe lui a signifié qu’adhérer à l’OTAN «serait une erreur», jugeant qu’il «n’y a aucune menace à la sécurité de la Finlande», selon le Kremlin.
En septembre 1809, la Suède cède à la Russie la Finlande. Helsinki proclame son indépendance de la Russie à l’occasion de la révolution bolchévique de 1917. Un traité «d’amitié» est signé pour dix ans par les deux pays en avril 1948. Helsinki accepte de rester en dehors de la coopération militaire.
Ainsi, durant la guerre froide, la Finlande a privilégié la politique de neutralité, initiée par le président, Juho Kusti Paasikivi, et prolongée par son successeur Urho Kaleva Kekkonen. Politique qui consiste à entretenir des liens avec les pays nordiques, l’Europe occidentale et le voisin soviétique, tout en conservant son indépendance. Au début de 1956, moyennant une prorogation du traité d’amitié jusqu’en 1976, l’URSS restitua à la Finlande la base de Porkkala, qu’elle occupait depuis la fin de la guerre.
Ainsi, il n’y a plus de troupes étrangères sur le sol finlandais. Après la chute de l’Union soviétique, la Finlande adhère à l’Union européenne (1995) et au Partenariat pour la paix de l’OTAN, mais reste officiellement militairement non alignée.
Tout en restant en dehors de l’OTAN, la Finlande et la Suède ont tissé des liens étroits avec l’Alliance, qui les considère désormais comme les deux Etats non membres les plus proches. Ils ont ainsi participé à des missions menées par l’OTAN dans les Balkans, en Afghanistan et en Irak, ainsi qu’à de nombreux exercices conjoints.