Le Service d’investigation générale (SIG) du commandement de la Gendarmerie nationale a été instruit à l’effet d’enquêter sur la spéculation effrénée sur la pomme de terre. Et c’est sur ordre du président de la République, en tant que ministre de la Défense nationale, que cette action, d’envergure nationale, a été lancée il y a à peine quelques jours.
C’est ce qu’a appris, hier, El Watan de sources sûres. «L’Etat veut en finir définitivement avec le problème récurrent de la spéculation sur la pomme de terre. Après l’enquête du ministère de l’Agriculture en mai dernier, il a été conclu que des personnes, dont plusieurs ne sont pas des professionnels, achetaient les récoltes de pomme de terre et les plaçaient dans des chambres froides à des fins spéculatives.
D’où l’élargissement de l’enquête aux limiers militaires qui couvriront tout le territoire national», expliquent nos sources. Pour s’assurer de la perspicacité des investigations, les enquêteurs permuteront avec leurs collègues d’autres wilayas au niveau des quatre régions du pays.
Ils se baseront, entre autres, sur les renseignements récoltés, comme c’était le cas avec B. A., 44 ans, agriculteur dans la commune de Chelghoum Laïd, de la wilaya de Mila, arrêté au lendemain de la saisie de 12 000 quintaux de pomme de terre non déclarés, qu’il a stockés dans des chambres froides publiques «Magasins généraux de Skikda SPA».
Il s’agit d’importantes informations concernant des agissements spéculatifs ayant fait monter le prix de la pomme de terre à plus de 150 DA. «Les investigateurs, qui soupçonnent une éventuelle complicité des responsables de ces espaces publics de stockage, ont déjà relevé que 2984 chambres froides et plus de 1860 entrepôts sont déclarés auprès des services relevant du ministère de l’Agriculture et celui du Commerce où des milliers, sinon des millions de tonnes de pomme de terre y sont déposées. Leurs capacités de stockage totalisent 10 millions de mètres cubes. Parmi eux, plusieurs ne sont pas déclarés à des fins spéculatives et du monopole.
En effet, le stockage légal impose aux propriétaires de déclarer tous les produits déposés ainsi que toute information y afférent auprès des services concernés du secteur du Commerce», affirment nos sources, promettant que ce problème sera réglé dans les prochaines semaines, soit à la veille du mois de Ramadhan. Vraisemblablement, cette enquête va faire tomber plusieurs têtes impliquées directement et indirectement dans ce trafic.
Dans la shortlist des présumés trafiquants, préétablie par les enquêteurs, figurent outre des spéculateurs récidivistes connus par les services de sécurité, un ancien ministre de l’Agriculture, un responsable dans la Fédération nationale des producteurs de pomme de terre, le propriétaire d’une entreprise privée de commercialisation d’engrais…
Ces dernières semaines, les services de contrôle et de répression de la fraude au ministère du Commerce ont procédé à la saisie d’une quantité dépassant 116 000 quintaux de pommes de terre et 3200 quintaux d’autres denrées alimentaires, telles la farine et l’ail, qui étaient destinées à la spéculation.
Abdelmadjid Tebboune avait chargé le ministre de la Justice, garde des Sceaux, lors d’une réunion du Conseil des ministres tenue en octobre dernier, d’élaborer le projet de loi relatif à la lutte contre la spéculation, car il s’agit là d’un crime à part entière avec des peines allant jusqu’à 30 ans.