Soutien de la France au plan d’autonomie pour le Sahara Occidental : L’Algérie exprime sa «profonde désapprobation»

27/07/2024 mis à jour: 09:06
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Défilé de l’armée populaire de libération sahraouie

Les relations algéro-françaises, soumises à des fluctuations cycliques, entrent dans une nouvelle zone de turbulences. 

L’Algérie a réagi énergiquement, jeudi, à la décision «inattendue, inopportune et contre-productive» de la France d’apporter son soutien au plan d’autonomie défendu par le Maroc pour le Sahara occidental, a indiqué le ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger (MAE) dans un communiqué. 

Exprimant sa «profonde désapprobation», le gouvernement algérien «tirera toutes les conséquences qui découlent de cette décision française» et dont le gouvernement français «assume seul la pleine et entière responsabilité», a ajouté la même source. «Le gouvernement algérien a pris connaissance avec un grand regret et une profonde désapprobation de la décision (…) apportant un soutien sans équivoque et sans nuance au plan d’autonomie sur le Sahara occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine», lit-on dans le communiqué publié en ligne et repris par l’APS. La décision «a été communiquée officiellement aux autorités algériennes par les autorités françaises ces derniers jours», a expliqué le MAE, sans donner d’autres détails, soulignant que «les puissances coloniales, anciennes et nouvelles, savent se reconnaître, se comprendre et se tendre des mains secourables». 

Aussi, le communiqué a mis en exergue la volonté des autorités françaises d’occulter une vérité existentielle qui est celle d’un peuple en lutte pour son indépendance et que la question sahraouie relève, fondamentalement, d’un processus de décolonistaion. «La décision française relève manifestement d’un calcul politique douteux, d’un a priori moralement contestable et de lectures juridiques que rien ne conforte et rien ne justifie, a précisé le communiqué. Cette décision française n’aide pas à réunir les conditions d’un règlement pacifique de la question du Sahara occidental, elle conforte une impasse, celle créée précisément par le prétendu plan d’autonomie marocain et qui dure depuis plus de dix-sept ans.» 

Et d’ajouter : «Bien plus et alors même que la communauté internationale est convaincue depuis longtemps que la question du Sahara occidental relève indubitablement d’un processus de décolonisation à parachever, cette même décision française vient en pervertir et fausser les données en donnant une caution à un fait colonial et en apportant un soutien injustifiable à une souveraineté contestée et contestable du Maroc sur le territoire du Sahara occidental.» Cette position française «est d’autant plus malvenue qu’elle émane d’un membre permanent du Conseil de sécurité censé agir en conformité avec les décisions de cet organe d’une manière particulière et avec la légalité internationale d’une manière générale», a estimé le MAE. 

«Enfin, et alors que la conjoncture actuelle connaît une mobilisation des bonnes volontés au sein des Nations unies à l’effet de donner un nouveau souffle à la recherche d’un règlement au conflit du Sahara occidental, la même décision française vient s’inscrire à contre-courant de ces efforts dont elle contrarie et entrave le déploiement dans l’intérêt supérieur de la paix, de la stabilité et de la sécurité dans la région», a-t-il déploré. Et d’affirmer que cette décision «ne sert absolument pas l’objectif de la paix au Sahara occidental, qu’elle aide à prolonger une impasse et qu’elle justifie et aide à consolider le fait accompli colonial dans ce territoire». Dans son communiqué, le MAE a indiqué que le gouvernement algérien «tirera toutes les conséquences qui découlent de cette décision française et dont le gouvernement français assume seul la pleine et entière responsabilité». Le parti du Rassemblement national démocratique (RND) et le parti du Front de libération nationale (FLN) ont également dénoncé la décision du gouvernement français de reconnaître le plan d’autonomie sur le territoire du Sahara occidental. 


«Nouvelle provocation»

Le RND a estimé que cette décision était «suspecte, complice et en contradiction avec les résolutions des Nations unies considérant la cause du Sahara occidental comme une question de décolonisation», a indiqué, jeudi, un communiqué du parti. Le parti du Front de libération nationale (FLN), a, quant à lui, condamné hier la décision du gouvernement français de reconnaître ledit plan d’autonomie sur le territoire du Sahara occidental, estimant, dans un communiqué, que c’était «une nouvelle provocation qui va à l’encontre de la légalité internationale et qui doit être dénoncée». 

Rappelons que depuis 2007, la France soutient le plan d’autonomie du Sahara occidental, marquant un «recalibrage» de la doctrine française sur le sujet après s’être longtemps conformé aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies qui se basent sur le principe de l’autodétermination, selon des médias français. Alain Juppé, ancien ministre français des Affaires étrangères, avait, lors d’une visite à Rabat en mars 2012, affirmé que le plan royal est «aujourd’hui la seule proposition réaliste sur la table», constituait «la base sérieuse et crédible d’une solution». La formule avait ensuite été abandonnée par la diplomatie française avec l’arrivée à l’Elysée de François Hollande quelques mois plus tard, notent ces mêmes médias. 

Récemment, en février 2024, le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, avait annoncé sans ambiguïté : «La France le sait, la question du Sahara occidental est existentielle pour le Maroc et pour tous les Marocains.» Selon l’édition d’hier du journal Le Monde, le ministère français des Affaires étrangères (Quai d’Orsay) a refusé de communiquer sur le sujet. «(…) La relation franco-algérienne devrait connaître ainsi une nouvelle phase de crispation, mais dans des proportions encore incertaines», a-t-il fait savoir. 

Depuis neuf mois, note Le Monde, la diplomatie française au Maghreb s’«oriente de plus en plus clairement vers un rapprochement avec le Maroc», pays avec lequel la crise avait été virulente de l’été 2021 à l’été 2023.
 

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