Sommet du G20 à New Delhi : Le poids des tensions mondiales

09/09/2023 mis à jour: 04:36
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Photo : D. R.

Le forum, pour tout économique qu’il soit, offre la même cartographie des divisions qui  opposent les puissances mondiales et leurs alliés diplomatiques au sein des autres regroupements internationaux. Ce n’est pourtant pas les urgences mondiales qui manquent.

Le 18e sommet du plus grand forum économique mondial s’ouvre aujourd’hui dans la capitale indienne avec un certain nombre d’appréhensions quant à la capacité de ses membres à dépasser les clivages diplomatiques exacerbés, notamment, par la guerre en Ukraine.  La présidence indienne du G20, entamée en décembre 2022 et devant s’achever en novembre prochain, a tenté tout au long de l’année de relativiser l’impact de la crise mondiale née du conflit qui s’enlise en Europe et étend ses lourdes répliques partout dans le monde.

L’Inde, menée par son Premier ministre Narendra Modi et servie par une conjoncture qui la place parmi les forces économiques avec lesquelles il faudra compter dans le court terme, met tout son poids diplomatique pour faire réussir le sommet. Mais la configuration actuelle des tensions mondiales est de nature à contrarier les ambitions de Narendra Modi et de son gouvernement.

L’adoption d’un communiqué commun final à l’issue de la réunion, comme il est de coutume, serait du domaine du miracle, selon les prévisions des spécialistes, tant les positionnements sur la guerre en Ukraine continuent à diviser les pays membres. Les pays occidentaux, à leur tête les Etas-Unis, continuent à insister sur une condamnation de l’«agression» russe sur l’Ukraine, alors que Pékin et Moscou, les deux autres poids lourds du G20, y expriment bien entendu une farouche opposition.

Le forum, pour tout économique qu’il soit, offre la même cartographie des divisions qui  opposent les puissances mondiales et leurs alliés diplomatiques au sein des autres regroupements internationaux, depuis le début du conflit. Ce n’est pourtant pas les urgences mondiales qui manquent. A commencer par le désastre climatique et la menace globale qu’il fait peser sur la planète, et dont la gravité vient d’être une énième fois soulignée par les instances de l’ONU.

Subsidiairement, l’impératif d’une transition énergétique rapide, qui puisse permettre un amortissement des impacts climatiques par la réduction de l’usage des énergies fossiles, est un autre thème brûlant que se doit de prendre en charge le puissant G20 : Ses membres représentent plus de 80% du PIB mondial, regroupent plus de 60% de la population de la planète et font tourner au moins 75% du commerce à l’échelle internationale.

Famille «Dysfonctionelle»

Dans une tribune publiée à l’occasion de la tenue du sommet (voir le texte ci-dessous), le Premier ministre indien, Narendra Modi, déploie tout son talent diplomatique pour donner une dimension rassembleuse à la réunion de New Delhi, malgré les points de discorde, d’autant qu’elle clôt pratiquement son mandat à la tête de l’organisation.

«Notre Présidence au G20 s’efforce de combler les fossés, de démanteler les barrières et de semer les graines de la collaboration qui nourrissent un monde où l’unité l’emporte sur la discorde, où le destin commun éclipse l’isolement. En tant que Président du G20, nous nous sommes engagés à élargir la table mondiale, à faire en sorte que chaque voix soit entendue et que chaque pays apporte sa contribution. Je suis convaincu que nous avons concrétisé notre engagement par des actions et des résultats», se satisfait-il, en insistant sur le concept de «famille mondiale».

Ce n’est pas tout fait l’avis du secrétaire général de l’ONU. Arrivé hier dans la capitale indienne pour prendre part au sommet, Antonio Guterres met pratiquement les pieds dans le plat. «Si nous sommes effectivement une famille mondiale, nous ressemblons aujourd’hui à une famille plutôt dysfonctionnelle (…). Les divisions s’accroissent, les tensions explosent et la confiance s’érode, ce qui fait planer le spectre de la fragmentation et, à terme, de la confrontation», avertit-il.

L’UA, nouveau membre

Quoi qu’il en soit, c’est dans cet esprit de rassemblement prôné par les membres influents du G20 qu’il faudra sans doute inscrire la démarche d’accorder un siège de membre permanent à l’Union africaine (UA). En attendant l’officialisation de la décision, des agences de presse mondiales, citant des sources sûres au sein du G20, assurent que l’adhésion est acquise pour l’organisation africaine.

Après le soutien affiché par les Etats-Unis, le Japon et l’Allemagne, parmi les voix qui portent au sein du forum international, fin août dernier, le Premier ministre indien a pour sa part salué la perspective de voir arriver l’UA au sein du G20.

«Nous avons une vision d’inclusion, et avec cette vision, nous avons invité l’Union africaine à devenir membre permanent du G20», avait-il notamment annoncé. Avec cette  adhésion annoncée, l’Union africaine sera le deuxième regroupement politique rassemblant des Etats à être représentée comme tel au sein du G20 après l’Union européenne (UE).

Cet intérêt pour l’Afrique  est une autre manifestation, sans doute, de l’élan plus général de la course à l’influence sur le Continent noir et opposant de manière plus ou moins discrète les puissances mondiales.  A noter que le sommet sera marqué par l’absence des présidents chinois et russe, Xi Jinping et Vladimir Poutine. Tous deux se font représenter par leurs ministres des Affaires étrangères respectifs. Ça fait du terrain libre à Joe Biden, le président américain qui est quant à lui depuis hier à New Delhi.

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