Rencontre sur l’impact médiatique et diplomatique durant la Guerre de Libération au Sila : «Le colonialisme a concentré ses forces sur l’Algérie»

27/03/2022 mis à jour: 01:17
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« C’est tout un appareil diplomatique qui s’est constitué en une véritable machine de guerre pour résister à la pression médiatique et diplomatique coloniale »

En marge du 25e Salon international du livre d’Alger (SILA), une conférence portant sur l’impact médiatique et diplomatique, menée durant la guerre de Libération nationale, a été animée, vendredi dernier, par trois historiens spécialistes du mouvement national et de la guerre de Libération. Les intervenants se sont relayés pour mettre en exergue le rôle important qu’à joué la diplomatie algérienne durant la lutte armée, et ce, jusqu’au recouvrement de la souveraineté nationale. 

A ce sujet, le premier intervenant, le commandant Azzedine, fait une confidence à l’assistance. Il affirme que si durant la lutte, on lui avait proposé deux caméras ou bien une mitraillette MAT 49, il aurait choisi à cette époque, l’arme. «Je ne pensais pas connaître la valeur de la caméra à cette époque. Grâce à la lutte de Libération et aux sacrifices des gens qui se disaient journalistes, si aujourd’hui on me propose une batterie de canon devant une caméra, je choisirai la caméra.» 

Pour sa part, le sociologue Hassen Remaoun a axé son intervention sur la place de l’Afrique dans la guerre de Libération nationale, celle-ci se décline sous la forme d’une bataille diplomatique et médiatique à la fois. Il rappelle que plusieurs jeunes diplomates se sont formés sur le terrain. 

C’était un mouvement de jeunes qui représentait l’Algérie aux quatre coins du monde. «C’est tout un appareil diplomatique qui s’est constitué en une véritable machine de guerre pour résister à la pression médiatique et diplomatique coloniale, laquelle était extrêmement importante. Il s’agissait d’une bataille de grands enjeux. Il y a eu différents axes de luttes et d’efforts qui ont contribué à l’effondrement du système colonial», souligne-t-il. 

L’universitaire estime que les enjeux de l’Afrique étaient importants au moment de la guerre de Libération nationale parce que l’Algérie était considérée à l’époque comme un empire colonial français qui s’entendait sur une partie de l’Afrique. «Cette révolution en Algérie va donner un impact important. Elle va précipiter les indépendances du Maroc et de la Tunisie. Le colonialisme va concentrer ses forces sur l’Algérie. Elle va aussi précipiter d’une certaine manière l’ascension de l’indépendance de certains pays de l’Afrique saharienne». 

Toujours selon l’orateur, le mouvement national en Algérie va mûrir à partir des années 1920 et 1930 jusqu’à aboutir au déclenchement de la guerre de Libération nationale. Le mouvement national est extrêmement lié aux négociations internationales. 

Des délégations algériennes ont participé à des conférences, notamment à la conférence de 1927 à Bruxelles. L’historien Hassen Remaoun met l’accent sur l’Afrique à partir de la perception qu’avait le GPRA et le FLN, à la faveur des publications sur les colonnes du journal algérien El Moudjahid entre 1956 et 1962. 

A travers ce journal, le GPRA va asseoir une grande partie de sa diplomatie en direction de l’Afrique car la stratégie française était basée sur l’Afrique. «A partir de 1958, nous allons remarquer la communauté franco-africaine. Elle disait dans une large mesure devancer les événements en essayant d’aboutir à des indépendances plus ou moins octroyées au moment où le mouvement de libération commençait à émerger», note-t-il. 

Pour le chercheur au Centre de recherches en anthropologie sociale et culturelle (CRASC) d’Oran, la diplomatie algérienne avait d’autres objectifs. C’était d’aboutir à une série d’Etats indépendants - qui vont apparaître de 1959 à 1960 - qui permettraient à la France de faire passer sa politique et d’avoir des voix pour contrecarrer les partisans de l’indépendance. 

De même que toute une stratégie était menée en direction du Sahara et surtout pour intégrer le Sahara dans le système de domination français. «Le cheval de bataille de la France était de dire que le Sahara n’appartient pas à l’Algérie. Il fallait faire connaître la lutte de Libération de l’Algérie, montrer une solidarité à l’international et isoler la propagande française qui était extrêmement importante», argue notre universitaire. 

Le dernier intervenant, Mohamed Bounaâma, docteur en archivistique et historien, a évoque dans son argumentaire le rôle de la diplomatie algérienne en pleine guerre. Il rappelle que les Suisses ne se sont pas ingérés pleinement dans les négociations des accords d’Evian. L’universitaire a également mis l’accent sur la diplomatie algérienne avant les accords d’Evian. Il précise que le GPRA a intercédé auprès du gouvernement guinéen, Ahmed Sékou Touré afin d’obtenir la libération d’un prisonnier helvétique. Grâce aux démarches du GPRA, Sékou Touré libère le prisonnier. Cet événement renforce la crédibilité des Algériens auprès des Suisses. 

Après le recouvrement de l’indépendance, la Suisse a pu profiter des relations préférentielles avec l’Algérie, notamment avec des partenariats sur le plan entre autres de l’industrie et de l’agriculture.
 

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