Rencontre nationale consacrée à la modernisation du système de santé : Des résultats diversement appréciés

11/01/2022 mis à jour: 23:30
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La rencontre nationale de deux jours consacrée à la modernisation du système de santé a été diversement appréciée par les professionnels de la santé. Certains professeurs et spécialistes du secteur et praticiens n’ont pas caché leur «déception» alors qu’une autre catégorie de soignants nourrit l’espoir de voir les promesses formulées par le président de la République se concrétiser sur le terrain.

Le Pr Kamel Bouzid, président de la Société algérienne d’oncologie médicale, et chef de service oncologie au Centre Pierre et Marie Curie (CPMC) d’Alger, rappelle que des assises sur la réforme du système de santé ont déjà eu lieu en 2015 et qu’une loi sanitaire a été élaborée et adoptée par le Parlement.

Cette loi, précise-t-il, se trouve dans les tiroirs depuis juillet 2018. «Nous attendons depuis 2018 les textes d’application. C’est également le cas pour la carte sanitaire qui est en stand-by alors qu’elle a été validée avec les partenaires sociaux en 2015, de même pour la réforme hospitalière.

Nous avons les outils pour réformer le système de santé, c’est leur application qui fait défaut. Pourquoi donc la tenue d’autres assises puisque le diagnostic a été déjà établi, le traitement est connu puisqu’une feuille de route a été tracée ?», s’interroge le Pr Bouzid qui déplore dans la foulée la pénurie récurrente de médicaments anticancéreux qui accable les malades.

Une rupture engendrée, entre autres, par le retard, estime-t-il, dans la mise en place d’une «réforme profonde du système de santé désorganisé et malade». Le Pr Bouzid a tenu à rappeler que dans un passé récent le président Tebboune a pris des décisions qui concernent tout le personnel de santé, «mais qui n’ont pas été appliquées à ce jour».

«Pourquoi les instructions du président ne sont-elles pas appliquées ?» s’interroge le professeur qui n’a pas été convié aux assises. Ces interrogations ont également été posées par le Dr Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialisés de la santé publique (SNPSSP), qui précise qu’en 2020, M. Tebboune a pris des décisions dont certaines ont concerné les spécialistes de la santé publique, à savoir les mesures incitatives pour abroger le service civil.

Et d’autres relatives à la Covid : la prime Covid, l’assurance globale, la bonification de la retraite, le capital décès. «Tout cela a été dit et annoncé, mais malheureusement, cela n’a pas été mis en application. Jusqu’à présent, la prime Covid est difficilement arrachée. Pourquoi ?» s’interroge le Dr Yousfi qui a opté pour le boycott de ces rencontres.

De son côté, le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) affirme être «très déçu et n’attend rien d’une rencontre où les thématiques ont été imposées et n’ont pas fait l’objet de concertation».

«Le secteur nécessite une révolution»

Les véritables concernés, déplore-t-il, ont été «exclus» du document de travail devant servir de modèle de débat. «Quand on invite un partenaire social à participer, c’est pour prendre part activement aux travaux des assises et non pas pour cautionner le travail qui a été fait par d’autres. Nous avons un système de santé moribond que nous n’arrivons pas à réformer», tranche le Dr Merabet.

Et d’ajouter que s’agissant des huit ateliers mis en place, le ministère de la Santé, en tant qu’administration centrale, a désigné «de façon unilatérale les présidents de séance et les modérateurs. Cela donne l’impression que nous avons été invités pour cautionner une situation de fait accompli et des recommandations déjà préparées, ce que nous refusons.»

Pour le Dr Merabet, le secteur privé a été «privilégié, et ce, au détriment du public». «Les participants en force à cette rencontre sont issus du secteur privé, notamment les propriétaires des cliniques, ceux qui exercent l’activité complémentaire… Ces professionnels sont venus défendre leurs intérêts», accuse-t-il.

De son côté, le Dr Bekkat Berkani, président de l’Ordre des médecins, n’attend pas un miracle de cette rencontre, mais il a espoir de voir aboutir, cette fois-ci, la réforme tant attendue du système sanitaire. «Notre système de santé nécessite une révolution, nos hôpitaux sont dans la pagaille. Les grands principes ont été affirmés et réaffirmés lors de cette rencontre. Le diagnostic a été fait, des propositions ont été arrêtées et une feuille de route a été élaborée.

Que chacun assume ses responsabilités», indique le Dr Bekkat, rappelant que par le passé des assises ont eu lieu, mais elles sont restés des vœux pieux. «Le gouvernement et toutes les forces vives de la nation étaient présents à cette rencontre. Le président de la République s’est engagé à réformer le secteur qui est l’affaire de tous, pas seulement du ministère de la Santé. Nous avons espoir !», conclut-il. 

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