C’est un Président certes un peu fatigué par les contraintes de sa campagne électorale qui est apparu hier à la cérémonie de prestation de serment, mais qui n’a pas perdu de sa fougue dans la défense de son bilan du premier mandat.
Celui-ci a été, rappelons-le, brièvement marqué par un retrait de sa personne durant plusieurs mois à la suite d’une atteinte grave à la Covid-19, et par le reflux général de tout le pays devant l’extension de l’épidémie. Puis est intervenue une reprise graduelle de l’activité générale du pays, principalement au niveau de la machine économique et de la sphère institutionnelle. L’épineux dossier de la corruption a été clôturé par l’incarcération de trois chefs de gouvernement et nombre de commis de l’Etat.
Sans conteste, le fait marquant de son discours d’hier a été sa promesse de relance du «dialogue politique national» qui, à ses yeux, concernera l’ensemble des acteurs de la vie publique.
L’idée n’est pas nouvelle, mais qu’elle soit annoncée lors d’une prestation de serment signifie qu’elle constitue une priorité pour le président de la République. A plusieurs reprises ces deux dernières années, il a entamé des consultations avec des partis politiques et des personnalités de la vie publique.
Il était question de «tendre la main» à toutes les forces politiques légales organisées et d’aller vers un «rassemblement» autour d’un objectif commun, qui est l’intérêt national, dans un environnement international régional des plus chaotiques. C’était une exigence forte tant de la classe politique, toutes tendances confondues, que des citoyens.
Ce qui était demandé, en substance, c’est d’offrir des solutions judiciaires aux détenus politiques restant encore pour leur permettre de réintégrer leurs familles et la société.
Dans la foulée, revoir ou supprimer l’article 87 bis du code pénal restrictif pour la liberté d’expression et les rassemblements pacifiques. Il n’y a pas eu de suite à ces demandes, mais elles ne pouvaient qu’être remises sur la table dans le contexte actuel. Il est symptomatique que ce soit le président de la République lui-même qui le fasse et cela lors du moment solennel de prestation de serment.
Toutes les conditions sont réunies pour qu’il agisse en ce sens. Il est conforté dans sa légitimité par un score honorable, et il a pu apprécier le rôle positif de l’opposition engagée dans une compétition électorale. Il a d’ailleurs rendu hommage à ses deux adversaires, que sont le président du MSP et le premier secrétaire du FFS, Abdelaali Hassani Cherif et Youcef Aouchiche, comme il a relevé le fait que la compétition électorale se soit déroulée à l’échelle nationale dans la sérénité et le calme, n’eut été le couac de l’Autorité nationale indépendante des élections dont il faudra tirer les leçons.
Un régime politique au pouvoir peut très bien travailler avec l’opposition pour que les règles du jeu soient claires et justes. Il s’agit de réhabiliter la politique. Dès demain donc, les regards seront braqués sur le palais d’El Mouradia sur cette question de «l’ouverture et du dialogue politique».
Les réformes sont attendues avec le plus grand intérêt par les acteurs politiques et par les citoyens qui souhaitent qu’elles soient à la hauteur des ambitions économiques et sociales du pays pour le second mandat que le Président a tenu à mettre en avant. Un PIB de 400 milliards de dollars, 15 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures, 4% de taux de croissance, 2 millions de logements, l’éradication dans le pays des zones d’ombre et, enfin, pour l’Algérie, un statut de pays émergent.
La politique, l’économique et le social vont de pair, ils sont interdépendants et se nourrissent l’un de l’autre, ils constituent le substrat démocratique national. En évoquant la nécessité de «l’ouverture politique», le président de la République a certainement compris que c’était l’élément qui manquait à la chaîne de la construction démocratique du pays.