Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a donné, hier en conférence de presse, les six grands axes de l’initiative du président Abdelmadjid Tebboune pour le règlement pacifique de la crise au Niger. Les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest ont accueilli favorablement cette initiative.
Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a détaillé hier, lors d’une conférence de presse animée au Centre international des conférences à Alger, l’initiative du président Abdelmadjid Tebboune pour le règlement pacifique de la crise au Niger. Cette initiative se décline, a précisé M. Attaf, en six axes et vise à la fois à rétablir l’ordre constitutionnel dans ce pays frontalier et à éviter toute intervention militaire aux conséquences néfastes sur toute la région.
Ce plan de sortie de crise, proposé par le président Tebboune et soumis aux responsables nigériens et aux pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), prévoit, entre autres, une période de transition de six mois. Cette période va être consacrée à trouver «une solution politique garantissant le retour à l’ordre constitutionnel et démocratique au Niger à travers la reprise de l’action politique dans le cadre de l’Etat de droit», a souligné le chef de la diplomatie, affirmant que l’Algérie se considère comme le «garant politique et moral» du principe de l’illégitimité des changements anticonstitutionnels de pouvoir en Afrique, parce que «ce principe a été codifié et consolidé sur sa bonne terre lors du sommet africain de 1999».
M. Attaf a assuré dans ce sillage que l’Algérie fera, lors du prochain sommet de l’Union africaine, des propositions visant à renforcer ce principe et à le consacrer sur le terrain dans le but de mettre un terme définitif à l’ère des coups d’Etat dans ce continent qui favorisent l’instabilité et empêchent le développement. Autre axe de l’initiative algérienne, ce sont «les arrangements politiques de sortie de crise» qui visent à arriver à une solution consensuelle qui émanerait d’un dialogue inclusif entre les différentes parties nigériennes.
Ce dialogue inclusif sera sous l’égide d’une autorité civile qui sera dirigée par une personnalité consensuelle au sein de la classe politique nigérienne. Aussi, a ajouté M. Attaf, l’initiative proposée par l’Algérie s’articule également sur la nécessité de donner suffisamment de garanties à toutes les parties afin de permettre l’aboutissement de la solution politique et son acceptation par tous les acteurs de la crise. Pour ce faire, l’Algérie s’engage à entrer en contact et à discuter avec, en premier lieu, les différentes parties en conflit et tous les acteurs influents dans ce pays. Elle va également se concerter avec les pays de la région et particulièrement avec le Nigeria qui préside actuellement la Cédéao.
Par la suite, a assuré Ahmed Attaf, des discussions vont être menées au niveau international avec des pays qui veulent appuyer les efforts visant à trouver une solution pacifique à cette crise. Et comme dernier axe de cette initiative, a fait savoir le ministre des Affaires étrangères, il y a l’organisation d’une conférence internationale sur le développement au Sahel. L’Algérie, selon lui, est prête à accueillir cette conférence dont le but sera d’encourager l’approche de développement comme élément cardinal de stabilisation des pays de la région et atout majeur dans la lutte contre les extrémismes violents et le terrorisme.
M. Attaf a estimé que le règlement de la crise au Niger exige beaucoup de sagesse et de persévérance. Le ministre des Affaires étrangères a réaffirmé la condamnation ferme de l’Algérie du coup d’Etat au Niger et son exigence d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel, tout comme il a assuré que l’Algérie considère Mohamed Bazoum comme étant le président légitime du Niger et appelle à le libérer et à lui permettre de reprendre ses fonctions.
Mais elle réitère son rejet total de toute intervention militaire qui ne fera qu’aggraver la situation non seulement dans ce pays mais dans l’ensemble de la région. «La raison de notre forte opposition à l’option du recours à la force pour résoudre la crise au Niger réside dans les répercussions graves et désastreuses qu’aura toute intervention militaire sur le Niger et l’ensemble de la région, en plus il y a peu de chances que cette option réussisse à atteindre les objectifs souhaités», a-t-il précisé. Il a cité dans ce contexte un dicton africain qui dit qu’ «il n’y a jamais eu de bonne guerre, ni de mauvaise paix».
Pas de « va-t-en guerre»
M. Attaf a poursuivi en affirmant que l’Algérie croit fortement qu’il est encore possible de résoudre cette crise politiquement et pacifiquement. Revenant sur la tournée africaine, M. Attaf a affirmé qu’elle a été fructueuse en ce sens que les responsables qu’il a rencontrés, que ce soit au Nigeria, au Bénin ou au Ghana, ont tous assuré qu’ils n’étaient pas «des va-t-en guerre» et qu’ils privilégiaient la solution politique sur l’option militaire.
L’Algérie et les BRICS
Par ailleurs, le ministre des Affaires étrangères s’est exprimé sur la non-acception de la demande de l’Algérie d’intégrer le groupe des BRICS, qui regroupe le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, lors du sommet qui s’est tenu à Johannesburg entre le 22 et le 24 août. Ahmed Attaf a affirmé que l’Algérie, qui défend le principe de la multipolarité dans les relations internationales et le rétablissement de la coopération multilatérale, continuera à défendre ces choix avec ses alliés du groupe des BRICS dans d’autres cadres.
«Les pays du BRICS sont des Etats amis, voire des alliés de longue date avec lesquels nous entretenions, avant même les BRICS, une coordination concernant nos questions politiques étrangères», a souligné M. Attaf. L’Algérie a de tout temps plaidé en faveur de la multipolarité dans les relations internationales, des rapports équitables, la sécurité internationa le et le rétablissement de la coopération multilatérale, a-t-il ajouté, rappelant que ces choix et ces principes «sont au cœur de la politique étrangère de l’Algérie depuis le recouvrement de sa souveraineté nationale». «Nous continuerons à défendre ces choix avec les mêmes alliés dans d’autres cadres, comme le Conseil de sécurité de l’ONU, le Groupe des 77 et le Mouvement des non-alignés», a soutenu M. Attaf, soulignant que ces «objectifs sont toujours de mise».