«Regards croisés» de photographes algériens à la galerie Racim à Alger : Panorama de la ville de Bou Saâda

05/03/2022 mis à jour: 00:32
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Un regard croisé à Bou Saâda

Placée sous le thème «Bou Saâda regards croisés», cette résidence fait suite à la deuxième résidence euromaghrébine tenue en novembre 2014 à Constantine. Initiée par la délégation de l’Union européenne en Algérie, cette présente résidence algéro- européenne a été inaugurée mercredi dernier en fin d’après-midi. 
 

Lors d’un point de presse tenu dans la matinée, Thomas Eckert, ambassadeur et chef de la délégation de l’UE en Algérie, a soutenu que cette troisième résidence revêt un double objectif : «Le premier objectif est de montrer le soutien de l’Union européenne à la jeune photographie en Algérie, de favoriser et de stimuler l’échange artistique entre les passionnés de l’art en général et de la photographie en particulier. Le deuxième objectif assigné est de mettre en valeur l’héritage et la créativité qui sont une richesse absolument fascinante pour le pays dans tous les domaines culturels. 

Cette résidence a donné lieu à la réalisation d’un beau livre qui regroupe les travaux des résidents avec une grande diversité artistique, porteuse d’un message humain profond avec une démonstration de toute l’inspiration de l’endroit. La résidence a permis de découvrir les nuances des couleurs de Bou Saâda, cette ville particulière qui a toujours créé des impressions extraordinaires.» 

Sur la même lancée son Excellence l’ambassadeur, chef de la délégation de l’UE en Algérie, a ajouté qu’en raison de la crise sanitaire, cette résidence n’a pu enrôler des photographes européens à l’instar des précédentes éditions. «Après deux années de gel de la vie artistique, nous avons néanmoins trouvé dix résidents bouillonnant de créativité et avides de pratiquer leur art.» Cette résidence de photographique a été sanctionnée par la publication d’un livre d’art regroupant les travaux des résidents, sous la direction de Reslane Lounici. 

Ce dernier a estimé que «ce projet a été une sorte de montagnes russes émotionnelles pour toute l’équipe artistique. Le choc de la rencontre avec la ville a vu son onde se répercuter dans le travail de chacun et qu’il a été très difficile par la suite de faire un choix d’œuvres tant la production a été prolifique». 
 

10 photographes algériens
 

Ainsi la ville de Bou Saâda a accueilli dix photographes algériens venus de huit wilayas du pays et encadrés par trois photographes professionnels, dont Nora Zair, Liasmine Fodil, Mehdi Hachid, et par le directeur artistique de la Résidence regards croisés, Reslane Lounici. Pour rappel, 200 candidatures ont été examinées par les organisateurs mais uniquement une dizaine de candidats a été sélectionnée. Les dix photographes algériens ont présenté 120 œuvres avec une moyenne de 20 œuvres par artiste. Ces derniers ont immortalisé des photographies de rue, un langage visuel ou encore des portraits. Rehou Djilali est un jeune amateur de photographie issu de la ville de Mostaganem. Banquier de formation, il s’adonne à la photographie depuis quelque temps déjà.

 Ce free-lance expose une dizaine de clichés sans titre, le plus souvent en noir et blanc. Il s’est plu à déambuler à l’extérieur de la ville de Bou Saâda en immortalisant son côté rural. Des lieux et des portraits s’exposent et s’imposent à nous, à l’image de cet adolescent de 15 ans qui espère vendre un bélier vers la fermeture du marché, ces enfants au sourire angélique suivant le mouvement de l’appareil, ou encore ce septuagénaire se dressant devant sa porte d’entrée millénaire. Le photographe Rehou Djilali, qui signe la sa sixième exposition, nous confie qu’il réalise le plus souvent ses photos à l’aide de son portable. S’il se considère comme un autodidacte pur, il n’omet pas de rappeler qu’il a suivi une formation de trois mois à l’Institut français d’Oran en 2018. 

Par ailleurs, il est sur un autre projet photographique à Tiout dans la ville de Naâma. Pour sa part, Ahmed Merzagui est un photographe amateur par intermittence, c’est du moins ce qu’il nous révèle en aparté ce jeune de 28 ans au regard vif et à l’allure imposante. Il se démarque des autres résidents puisqu’il présente une installation, sous forme de scénographie. Il travaille généralement sur des projets. Il indique que les photos, c’est juste une vitrine. 

Contrairement à ses projets artistiques où il tend à exprimer quelques choses. «En projet, généralement, c’est beaucoup de photos à partir de dix à douze. Ce n’est pas chaque photo qui raconte mais chaque photo est une pièce d’un puzzle ou c’est la série entière qui raconte l’histoire», éclaire t-il. 

Ce projet artistique se décline sous la forme d’un voyage initiatique de gauche à droite où se mêlent des photos et des éléments esthétiques. Notre photographe semble avoir un rapport particulier avec la langue de Shakespeare puisque il use et abuse de certains mots et phrases pour orienter le visiteur. Ce médecin généraliste qui a choisi de ne pas exercer sa profession nous livre des instantanés gorgés de philosophie.

 Il capture un poteau d’électricité courbé avec un reflet d’ombre, donnant cette impression d’un palmier. On retrouve aussi les cours d’eau de Bou Saâda à travers les cendres du passé ainsi qu’un cavalier de la fantasia dans ses moments de détente. Le photographe Ahmed Merzagui a toujours eu un penchant pour l’art et la culture. Les expressions visuelles, audio et audio-visuelles l’ont toujours interpellé. 
 

En 2015, il a acquis son premier appareil photo, un vieux Minolta X300. Par la suite, il décide de collectionner les appareils argentiques. En 2016, il adhère l’association culturelle la Grande maison où il intègre le nouvel atelier photo dirigé par Houari Bouchenak. Il avoue que c’est à partir de là que le véritable voyage photographique a commencé. Dès lors, il s’initie à la photographie d’art et documentaire et il commence un projet sur sa ville natale Tlemcen avant d’enchaîner sur d’autres projets. A travers son approche artistique, l’artiste va vers le questionnement et la remise en question. Il ne donne pas des pistes de compréhension de ses œuvres à son public. Il l’invite plutôt à faire sa propre interprétation. 

Les coups de cœur de la photographe Nora Ziar représentent entre autres la tombe de l’artiste peintre Nacer-Eddine Dinet, sur l’hôtel Beau séjour de Bou Sada la nuit avec une façade jouxtant un poteau électrique sur lequel un oiseau a construit son nid. Quant à Rabah Djabbar, il s’intéresse à nos aînés vaquant à leurs occupations du moment où encore s’adonnant aux jeux des dominos sur une placette publique. 

L’exposition photographique «Regards croisés» à la galerie Mohamed Racim est à ne pas rater. Elle offre un panorama exceptionnel de la ville ensablée de Bou Saâda.
 

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