Réformer en profondeur l’Etat

20/08/2022 mis à jour: 02:46
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Deuil et colère comme il y a une année. Cela pourrait bien recommencer l’été prochain sous les coups de boutoir de la nature, désormais hors de contrôle, par l’effet apocalyptique du dérèglement climatique, de portée planétaire. Comme d'autres pays désertiques et semi-désertiques, l’Algérie paye le prix le plus fort, pas seulement à la furie des feux, mais aussi au déferlement d’eaux issues d’orages ravageurs.
Dans quelques semaines, des torrents vont balayer les villes et villages et ajouter de la destruction à la destruction. 

De nouveau, la mort est appelée à être au rendez- vous. Un signe qui ne trompe pas, c’est la fin de l’été et les autorités n’ont même pas commencé à nettoyer les avaloirs et les talus pour stopper la furie des eaux à venir, comme elles n’avaient rien entrepris de sérieux dès le début de l’automne dernier pour rendre les forêts moins vulnérables au feu. Dès la fin d’une catastrophe, tout est vite oublié, en attendant la suivante. C’est dire que le mal est profond, très profond, il réside, et on n’invente rien, dans la sous-estimation des dangers nés du bouleversement climatique. 

On réagit comme lors des décennies antérieures, au coup par coup, de manière isolée et ponctuelle lorsque l’on ne se remet pas à la volonté divine pour tout expliquer, tout arranger et tout pardonner. Les citoyens ne peuvent être blâmés, car toujours en position de victimes, mais l’Etat, lui, ne peut échapper au blâme. Dès le début des années 2000 avec l'hécatombe de Bab El Oued, il aurait dû comprendre les choses et se lancer dans l’anticipation des catastrophes naturelles, il y eut les inondations de Ghardaïa, d’El Bayadh et dans de multiples autres lieux, y compris les grands centres urbains, jusqu’aux terribles incendies de 2021 et de ces derniers jours. 

Aucune leçon n’a été tirée, même pas la dotation de ses structures en minimum de moyens d’intervention, tels les fameux «Canadair» bien que ce ne soit pas la panacée. Les solutions existent dans la volonté politique de prendre à bras-le-corps cette question du réchauffement climatique et d’en faire une priorité nationale. De plus en plus de nations développées le font, ayant compris que leur avenir en dépend. L’Etat algérien doit être restructuré en profondeur pour répondre à ces défis. Il n’est plus possible que ce soit une simple direction générale de la Protection civile qui ait la lourde charge de protéger les citoyens. Un grand ministère de souveraineté doit lui être dédié, avec les mêmes moyens que les ministères de la Santé, de l’Education nationale ou des Moudjahidine. Chargé de la prévention et de la protection de la population, il verrait aussi son champ d’intervention s'élargir à la sécurité alimentaire, fortement tributaire des aléas climatiques, à l'aménagement du territoire ravagé par le béton et par l’urbanisation effrénée et anarchique. Et aussi à la lutte contre les grands fléaux sanitaires, telle l'épidémie du corona. 

En tout état de cause, les experts auront leur mot à dire sur tout cela dès lors que les autorités jugeront utile de leur faire appel et de s’engager à mettre en pratique leurs recommandations. La course contre la montre est engagée et le futur gouvernement ne pourra faire l'économie d’une telle restructuration. La population est sensibilisée car en première ligne, tant en victimes que dans son implication spontanée dans la solidarité. Les gouvernants sont-ils en mesure d'opérer une telle révolution dans leur pensée ? 

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