Proposition de projet d’introduction en Bourse sur une période de cinq années de 150 à 200 entreprises filiales des sociétés publiques

13/03/2025 mis à jour: 05:17
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Photo : D. R.

Par Ismaïl Noureddine  
Ancien DG Bourse d’Alger et dépositaire central
et ancien président de la COSOB

L’économie algérienne connaît une reprise de la croissance notable à travers tous les secteurs d’activités. Cette reprise est soutenue par un effort d’investissement public et privé et accompagné d’une libéralisation des initiatives de création de la valeur et de l’emploi à tous les niveaux. Pour être durable, cette croissance obtenue nécessite un financement adapté, à moyen et long termes, à travers un marché financier en plus du marché bancaire à court et moyen termes.

Le succès d’introduction en Bourse des deux banques publiques CPA et BDL (en 2024 et en 2025) ont démontré que le dispositif mis en place au niveau du dépositaire central de la place d’Alger est moderne et fiable grâce à la dématérialisation et de la numérisation des titres cotées (opération réalisée en 2005).  Ce dispositif est capable de gérer des centaines de titres par inscription en compte d’investisseur (associé à un compte dinars) au niveau de toutes les banques teneurs de compte de la place. et la Bourse d’Alger tourner très faiblement.

Ce qui génère un problème de liquidité sur le marché secondaire qui risque de le bloquer et de nuire à l’image de marque de la Bourse d’Alger. Pour régler ce problème de liquidité sur le marché secondaire et répondre au besoin de financement direct des entreprises sur les cinq années à venir, il convient de travailler sur la profondeur du marché financier et cibler une taille critique de la Bourse d’Alger en nombre d’entreprises cotés à fin 2030.  A ce titre, il y a lieu de souligner que les Bourses régionales des économies émergentes cotent de 100 à 300 entreprises (voire 400 titres).

Au rythme actuel d’introduction de sociétés à la Bourse d’Alger, nous risquons d’attendre cinquante ans  (voire un siècle),  pour atteindre le niveau actuel des Bourses régionales avec  un marché financier dynamique et représentatif de notre économie. Ainsi et pour accompagner l’émergence de l’économie algérienne, nous proposons de réaliser l’introduction à la Bourse d’Alger d’une moyenne de 150 à 200 entreprises sur les cinq prochaines années. Ce qui passe par une opération spéciale d’ouverture en masse du capital social de ces 200 entreprises publiques sur cinq années au niveau de la Bourse d’Alger. Les entreprises ciblées par cette opération spéciale sont les filiales éligibles d’entreprises publiques. 
L’objectif est de les rendre visibles, bancables et solides sur le marché intérieur et extérieur.

Les sociétés mères de ces filiales assurent l’autorisation et l’accompagnement et conservent une majorité bloquante (30 à 40%).  Chaque filiale éligible doit choisir et retenir avec son propriétaire (société mère) le niveau d’ouverture du capital social compatible avec leur stratégie et le partenaire technologique étranger avant de venir au marché primaire pour réaliser les cessions de bloc dimensionnés et libérés en commun accord. Cette opération spéciale d’enregistrement en masse de ces entreprises, qui  a la cote, nécessite de réduire la durée de passage au marché primaire à dix jours au maximum.

Ce qui suppose un nouveau montage financier de souscription au marché primaire au tour de trois ou quatre fonds d’investissement (ou SCI ou autre vecteur et porteur de titres à étudier...) pour acheter les actions et les revendre plus tard au moment opportun sur le marché secondaire entre eux, au grand public, aux professionnels, aux institutionnels et aux étrangers grâce aux intermédiaires en opérations de Bourse (IOB). La création de ces trois ou quatre fonds d’investissement passe par une mobilisation des ressources par emprunt obligataire ou Bancaire qui sera remboursé sur une période de 5 à 7 ans, au fur et à mesure des cessions d’actions sur le marché secondaire.

Ainsi, la Bourse d’Alger peut profiter de ces fonds d’investissement qui collectent des ressources pour les investir dans les entreprises (pas seulement dans l’immobilier) grâce à des plus-values et des dividendes. Une bonne préparation de cette opération de souscription au marché primaire par entreprise éligible doit être soutenue par une notice d’information et un programme de communication à la place comme indiqué par la législation Boursière. L’aboutissement de l’opération de souscription au marché primaire permet automatiquement l’inscription du titre à la cote de la Bourse d’Alger dans le compartiment principal.

Pour se maintenir à la cote, la société doit faire l’objet d’une transaction par semestre au moins, suite à l’analyse des fonds d’investissement porteurs des actions de la société qui est élaborée sur la base du reporting trimestriel de la société cotée. Cette démarche permettra à terme d’avoir une profondeur de marché favorable au développement d’un environnement d’intermédiation, d’évaluation, de fonds communs de placement  et de financement direct de l’économie nationale.

Elle permettra ainsi de promouvoir une ingénierie financière avec une interdépendance des activités de la banque d’affaires (banque d’investissement de montage et d’émission) et de la Banque de marché (salle de marché : placement et négociation sur le marché secondaire). Il est même prouvé que la relation est «biunivoque» entre les deux, la salle de marché enregistre un besoin de «papier» d’un certain type exprimé par les investisseurs, et demande ensuite au «corporate finance» de trouver les clients (entreprises) prêts à l’émettre. C’est la «reverse enquiry».
Sur les cinq prochaines années, nos banques de place (IOB et teneurs de compte-conservateur) pourraient évoluer et accompagner ces fonds d’investissement ou banques d’affaires  pour booster l’industrie de titres  en tant que nouvelle source de revenu complémentaire aux crédits. 

Enfin et même si les conflits d’objectifs et d’intérêts persistent au sein de la Banque, il est recommandé de filialiser les activités d’intermédiation en Bourse  au sein d’une société IOB à condition de l’externaliser avec des professionnels de compétence reconnue et avérée, de codifier la relation financière, de risque et d’engagement avec la banque mère, et de maintenir la T de CC au sein de la banque mère.  I. N.
 

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