Projet de village touristique «Forum El Djazaïr» à Moretti 1 : Des tours aux pieds d’argile ?

09/05/2024 mis à jour: 10:33
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La vérification de la structure initiale a révélé des insuffisances par rapport au niveau de sécurité requis par la réglementation. (…) Les tours, telles qu’étudiées, nécessitent, à notre avis, une remise aux normes».

«Le ferraillage horizontal dans les voiles est insuffisant.» «98% des panneaux de voiles présentent une insuffisance en armature horizontale.» «100% des panneaux de linteaux présentent une insuffisance en armature verticales et 72% des panneaux de linteaux présentent une insuffisance en armature horizontales.» «Les armatures diagonales sont nécessaires dans 100% des cas, mais à travers les consultations des plans d’exécution, on n’en trouve aucune.»

Ce sont là des constats qui révèlent des lacunes alarmantes dans la construction des tours emblématiques «Forum El Djazaïr» à Moretti 1 (Alger), un projet de l’entreprise Emiral, une filiale du groupe émirati  Emirates International Investment Company (EIIC).  

Etablis par des bureaux d’études et d’engineering, mandatés par Emiral, ces constats, ayant trait aux besoins d’une faisabilité de modification de certaines parties de la structure des tours R+23 de son projet, jettent une lumière crue sur ce qui semble devenir un scandale immobilier.

Mais ce n’est pas tout. Les fuites d’eau de mer, un problème persistant, malgré les tentatives de correction, menacent sérieusement les fondations des tours. Les sous-sols sont continuellement infiltrés, mettant en péril la stabilité même de ces structures. 

En effet, selon les documents de ce volumineux  dossier dont El Watan détient une copie, d’importantes fuites d’eau de mer s’infiltrent continuellement dans les sous-sols des tours, malgré l’installation des suceuses qui  pompent l’eau des infiltrations en H24.

Cela a d’ailleurs provoqué d’incessantes alertes des bureaux de suivi à l’adresse de l’entreprise réalisatrice : «(…) L’entreprise réalisatrice a négligé de protéger les niveaux des sous-sols contre les fuites d’eau ni de plusieurs endroits à l’intérieur des tours 1 et   2 à travers des fissures déjà réparées ; des tiges de liaison ; des jonctions ; des joints d’expansion et du noyau de la lutte contre l’incendie des murs de soutènement.

Le puisard situé du côté nord de la tour 2 est temporaire et les pompes doivent être arrêtées, une fois l’excavation terminée. Les travaux peu importants ont été effectués, en attendant le bétonnage de la sortie, malgré tous les dangers et la responsabilité de la gestion des risques.»

Et de prévenir : «Les autorités locales doivent être informées, sachant que le gaspillage de l’eau claire (nappe phréatique) est une activité illégale.» Quant à la responsabilité, elle incombe, selon le contrat de ce marché, «à l’entreprise réalisatrice, conformément à l’article 32.

L’entreprise est priée de mettre en œuvre toutes les mesures susceptibles de permettre l’identification d’un tel problème et de fournir des propositions concernant les mesures à prendre pour récupérer le défaut et remédier à ce défaut ou/et à ses conséquences.

L’entreprise doit, à ses propres frais et risques, mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires pour le rendre conforme aux normes applicables et aux documents contractuels, et demandera d’enquêter d’urgence sur la question et de présenter une solution technique pour éliminer tous les risques de toute urgence, car ces infiltrations peuvent avoir un impact grave sur les éléments structurels des zones citées». 

Evoquant l’aspect financier, la même source affirme : «Les coûts des travaux de correction sur l’ensemble du bâtiment ou de la structure ou ceux encourus pour le rendre conforme aux normes applicables et aux documents contractuels, y compris les coûts de toute mesure impliquée dans l’identification du problème, sont à la charge de l’entrepreneur, sans préjudice de toute compensation que le client pourrait alors avoir le droit de réclamer.» L’architecte urbaniste L. Boulbir souligne avec justesse que «ces tours, symbole d’un capitalisme immobilier effréné, dissimulent souvent des défauts structurels majeurs.

La course à la hauteur n’a pas été accompagnée d’une planification adéquate des infrastructures souterraines, laissant une cité vulnérable et non résiliente». Face à ces révélations accablantes, il est impératif que des mesures urgentes soient prises pour garantir la sécurité des futurs occupants des tours «Forum El Djazaïr». 

Cette révélation intervient alors que la commercialisation des logements, haut standing, a été déjà lancée dont le coût/m² est parmi les plus chers de la capitale. Elle intervient aussi dans un contexte déjà chargé de controverses.

Le groupe émirati EIIC, à travers sa filiale Emiral, avait engagé une procédure arbitrale contre le gouvernement algérien, réclamant des dommages et intérêts pour des entraves présumées à l’investissement.

Le verdict, rendu en mai 2023, a accordé une importante somme d’argent au Fonds émirati, malgré les soupçons de malversations et de corruption. «Une entité détenue par la famille royale d’Abu Dhabi s’est vue attribuer plus de 228 millions de dollars, les intérêts et les frais d’arbitrage», avait rapporté Global Arbitration Review (GAR). 

 

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