Manipulés sans précaution, les pétards et autres produits pyrotechniques peuvent s’avérer dangereux. C’est pourquoi, il est important de sensibiliser quant aux risques encourus. Explications !
Chaque année, à l’occasion de la célébration du Mawlid Ennabaoui, plusieurs cas de brûlures et blessures corporelles sont enregistrés au niveau des services des urgences médicales, et les conséquences peuvent être graves.
D’ailleurs, le ministre de la Santé, Abdelhak Saihi, a fait savoir, lors de la journée de sensibilisation et de prévention des accidents résultant de l’utilisation de produits pyrotechniques, que l’Algérie est témoin chaque année d’accidents douloureux liés à l’utilisation de ces produits.
Soulignant au passage que l’année dernière, pas moins de 70 cas, dont 5 très graves ont été enregistrés. «Toutes les institutions hospitalières sont toutefois prêtes pour soigner les blessures.» De son côté, le Dr Yacine Iddir explique que les pétards peuvent provoquer des traumatismes graves, notamment des brûlures, des lésions auditives (perte d’audition partielle ou totale due aux explosions) et des traumatismes psychologiques chez les plus jeunes et les personnes fragiles.
«Les éclats projetés lors des explosions peuvent également causer des blessures sévères», a-t-il ajouté. De plus, le contact direct avec les pétards peut causer, selon le Dr Yacine Iddir, des brûlures de premier à troisième degré, qui peuvent laisser des cicatrices permanentes et nécessiter des soins intensifs, voire des interventions chirurgicales dans les cas graves.
«Les enfants, souvent plus exposés, risquent particulièrement des blessures graves aux mains», a-t-il relevé. Les yeux ne sont pas épargnés, et la manipulation ou même la proximité des explosions représente un risque important pour la vue. En effet, très vulnérables face aux éclats de pétards, les blessures au niveau des yeux peuvent aller jusqu’à la perte complète et définitive de la vision.
«Les blessures oculaires peuvent aller de simples irritations à des blessures graves, telles que des perforations du globe oculaire, entraînant une perte partielle ou totale de la vision», affirme le Dr Yacine Iddir. Ce dernier rappelle au passage que de nombreuses blessures graves sont constatées chaque année, à l’exemple des amputations de doigts, des brûlures sévères nécessitant des greffes de peau, ainsi que les traumatismes oculaires irréversibles.
«Certaines victimes souffrent également de traumatismes auditifs permanents, qui affectent leur qualité de vie», précise le Dr Yacine Iddir. C’est pourquoi, le médecin estime important de sensibiliser les familles et les enfants aux risques et recommande par la même occasion d’éviter l’utilisation de pétards, surtout par les enfants. «Il est préférable de célébrer cet événement dans un esprit de paix et de recueillement, en mettant en avant les valeurs spirituelles plutôt que les activités dangereuses», a-t-il indiqué.
Farid Rahal. Enseignant chercheur à l’université des sciences et technologies Mohamed Boudiaf d’Oran
«Lors de l’explosion du pétard, ses composants toxiques restent en suspension dans l’air»
- Quel est l’impact des pétards et feux d’artifice sur la qualité de l’air ?
Il est clair que l’utilisation des produits pyrotechniques contribue à l’augmentation des niveaux de concentration des polluants de l’air. Les composants de base des feux d’artifice de manière générale sont la poudre noire qui est un mélange de charbon, de salpêtre et de nitrate.
Pour obtenir les différentes couleurs, on y mélange du baryum, du strontium, du sodium, du magnésium et d’autres composants. Par conséquent, l’ensemble de ces éléments peuvent se retrouver dans l’atmosphère. La qualité de l’air s’en trouve évidemment impactée. Lors d’une étude scientifique réalisée dans l’île américaine de Hawaï, il a été constaté une multiplication par trois des concentrations de particules fines dans les heures suivant les feux d’artifice.
- Quel est l’impact des fines particules générées suite à l’explosion ?
Lors de l’explosion du pétard, ses composants chimiques parfois toxiques restent en suspension dans l’air, et les jeunes enfants sont susceptibles de les inhaler. Les conséquences peuvent être une irritation des voies respiratoires, des risques allergiques ou des problèmes oculaires. En outre, un risque de crise peut survenir chez les asthmatiques.
- Quelles sont vos recommandations pour passer un bon Mawlid ?
La fête du Mawlid est bien ancrée dans la société algérienne avec l’utilisation de différents types de pétards de plus en plus sophistiqués, visant à produire de la lumière, du son et de la fumée avec émission de nombreux polluants de l’air. Même les bougies, en brulant, libèrent dans l’air des composants pouvant être dangereux pour la santé comme le benzène, le toluène, le formaldéhyde ou la suie.
Il serait souhaitable de limiter l’utilisation de ces éléments de fête et surtout de ne pas les utiliser dans des espaces confinés mais plutôt dans l’air libre à l’extérieur pour en faciliter la dispersion. Enfin, une fête du Mawlid mieux axée sur les valeurs qu’elle véhicule serait beaucoup plus bénéfique à notre société et largement moins porteuse de risques induits par l’utilisation immodérée des produits pyrotechniques. S. O.
- Samy Akroun. Pneumologue : «Les particules fines peuvent affecter les voies respiratoires»
D’ailleurs, selon le Dr Samy Akroun, pneumologue, lorsqu’inhalées en grande quantité ou de manière répétée, les particules fines et irritantes émanant des fumées de pétards peuvent provoquer une variété de problèmes de santé, allant d’une simple irritation des voies respiratoires à des lésions graves des poumons, voire à des complications mortelles.
Ces lésions peuvent être, selon lui, immédiates, comme dans le cas d’un œdème pulmonaire aigu (détresse respiratoire), ou apparaître à long terme, entraînant des séquelles et des maladies chroniques. «Mais pas de panique, les effets les plus graves sont non seulement extrêmement rares, mais ils nécessitent également une exposition massive, ce qui est très rare avec de simples pétards utilisés en extérieur», rassure-t-il.
Le pneumologue tient tout de même à mettre en garde les personnes souffrant de maladies respiratoires chroniques, comme l’asthme ou la bronchite chronique, à rester vigilantes car elles sont particulièrement sensibles aux effets de l’inhalation de particules fines.
En effet, même de faibles expositions peuvent, selon le Dr Samy Akroun, déclencher des crises d’asthme, aggraver les symptômes d’une bronchite ou favoriser des infections pulmonaires. «Il est donc primordial que ces personnes évitent au maximum les environnements pollués et suivent scrupuleusement les traitements prescrits par leur médecin», recommande-t-il.
En cas de doute ou de symptômes, le Dr Akroun conseille de revoir son médecin traitant. Et enfin, pour le bon déroulement de la célébration du Mawlid, le spécialiste appelle à la modération et au bon sens! «Ne faisons pas de ce jour de fête un jour de deuil. Les pétards, c’est avant tout à l’extérieur, et sans en abuser», conclut-il. S. O.
- Lamia Mekkour. Dermatologue : «Les pétards peuvent avoir des conséquences sur la peau»
Une mauvaise manipulation des pétards et autres produits pyrotechniques peut entraîner des blessures graves aux mains et au visage. Cela peut aller jusqu’au délabrement des membres lorsqu’ils renferment une charge explosive lourde ou lorsqu’ils sont manipulés par des enfants.
A cet effet, le Dr. Lamia Mekkour, dermatologue, assure que les pétards peuvent entraîner deux grands effets sur la peau à savoir un véritable effet blaste et des réactions dermatologiques spécifiques. «Pour l’effet blaste, on retrouve des brûlures cutanées (chimique et thermique) allant du 1 er au 3e degrés, entraînant un risque de surinfection microbienne et le risque de séquelles graves inesthétiques et indélébiles», explique-t-elle. Des plaies cutanées pouvant, selon elle, être très profondes pouvant aller jusqu’à l’os nécessitant parfois un acte chirurgical et dans les cas les plus sévères l’amputation.
En ce qui concerne les réactions dermatologiques, Mme Lamia Mekkour explique qu’elles dépendent des composants chimiques de ces pétards comme le cuivre, le phosphore, le baryon et autres, et peuvent aller d’une simple irritation à de véritables allergies et eczémas, voire des dermatoses plus spécifiques de ces composants chimiques. En ce qui concerne les blessures les plus constatées, la spécialiste cite les brûlures, les infections, les cicatrices, les amputations et le déclenchement de véritables maladies dermatologiques qui peuvent persister dans le temps.
Et afin d’éviter tous ces risques, Mme Lamia Mekkour recommande d’éviter complètement ces pétards surtout ceux qui sont connus pour leur dangerosité. «Dans le cas où certaines familles vont tout de même acheter des pétards, il est important de choisir les plus inoffensifs et comportant des mèches plus longues pour éviter les accident.
Une bonne manipulation est tout aussi importante, c’est pourquoi, il faut éviter de les tenir avec les mains et respecter une distance de sécurité et éviter de les faire exploser dans des endroits où il y a du monde. Dans le cas ou le pétard n’explose pas, il ne faut jamais aller vérifier au risque qu’il n’explose au visage», recommande-t-elle. Toutefois, Mme Lamia Mekkour reste convaincue qu’il existe un milliard de façons de fêter sans s’exposer ou exposer les autres aux dangers. S. O.