La défense de Saïd Bouteflika a dénoncé des irrégularités dans l'instruction.
Le procès de l’affaire dite des SMS a repris hier avec les plaidoiries de la défense, dont celle de Saïd Bouteflika, représentée par Mes Kamel Allègue et Salim Hadjouti. Intervenant en premier, Me Hadjouti, durant plus d’une heure, dénonce les conditions de ce procès où son mandant «n’a pas pu transmettre son message en raison des coupures récurrentes de la connexion et de la mauvaise qualité de la transmission.
Il est poursuivi dans un dossier qu’on appelle ''l’affaire de Saïd Bouteflika'' et les autres alors, donnons-lui le droit de bien se défendre». Pour l’avocat, les droits de Saïd ont été «violés», puisque l’on «n’a pas voulu le ramener à l’audience. Il est en prison pour ce dossier. Il a le droit de se défendre». Il a qualifié le procès «d’affaire politique par excellence ordonnée par des parties connues. Elle n’a rien de juridique. Elle est basée sur de simples déclarations».
L’avocat tente d’argumenter en revenant aux déclarations du parquet du pôle, selon lesquelles tout a commencé par «l’enquête sur la protection qu’accordait Saïd Bouteflika à des hommes d’affaires. Or, il a été arrêté un 31 mars 2019 après ce sinistre 22 février et, deux jours avant, que son frère, le défunt Président, ne présente sa démission. Il ne pouvait même pas assurer sa protection puisqu’il était assigné à résidence.
Pourquoi parle-t-on de protection sans apporter un seul fait, un seul appel qui le prouve. Même Ali Haddad, quand il lui a envoyé des messages lors de son interpellation à la frontière, il ne lui a pas répondu. Trouvez-vous les appels suspicieux ? Donnez-nous les preuves de cette suspicion.
Rien dans le dossier. Tout est basé sur la violation de la procédure, depuis l’enquête jusqu’à la condamnation». Me Hadjouti ne laisse rien au hasard. Il passe le dossier au peigne fin depuis l’ouverture de l’information judiciaire jusqu’au renvoi devant le tribunal, en passant par les perquisitions, les pièces non scellées, censées être récupérées sur les lieux, l’absence d’inventaire, les vices de forme dans les procès-verbaux d’audition présentés comme des faux et la «dissipation» de certains documents. «Nous n’avons pu obtenir les deux boîtes à archives que grâce à vous, ici lors du procès.
Dieu seul sait ce que nous avons trouvé comme pièces, toutes en faveur du prévenu et auxquelles nous ne nous attendions pas. Pourquoi le juge les a-t-il cachées ? Cinq prévenus ont peut-être un lien avec Bouteflika, mais les autres pourquoi sont-ils ici ? Quelle est leur relation avec Bouteflika ?» souligne l’avocat.
Ce dernier surprend la présidente en lui montrant la réponse à une commission rogatoire délivrée à la police judiciaire qui commence par «suite à la demande par téléphone du juge d’instruction...» «Depuis quand la commission rogatoire se fait par téléphone ? N’est-ce pas une violation caractérisée du code de procédure pénale ? Depuis quand la réponse à une commission rogatoire constitue une pièce à conviction ?» s’interroge l’avocat.
Il a évoqué le listing des communications de Saïd Bouteflika entre 2017 et 2019, présenté comme «un document sans cachet et sans signature», puis se demande «pourquoi uniquement Haddad, Kouninef, Tahkout et Mazouz sont cités et non pas les nombreuses autres personnalités très importantes toujours en activité», mais aussi «pourquoi 2017 et non pas 2012, comme cela a été fait par le tribunal militaire lors de son procès à Blida ?»
Listing des communications
Selon lui, toutes les affaires précédentes ont été ouvertes sur la base de listings des communications. «Nous savons tous que la loi interdit l’écoute sans ordonnance du juge. Dans ce dossier, elle l’a fait et sans aucune ordonnance. Pourquoi n’a-t-on pas ramené les correspondants des 2500 communications et on s’est limité à celles qui concernent les prévenus ?
On a même trouvé dans une boîte un chèque daté de 2009, de Hyundai, collé à Tahkout alors qu’il n’avait pas encore la marque. Pourquoi n’ont-ils pas entendu le concerné ? Nous pensons que ces documents n’ont pas été trouvés chez Bouteflika. Ils ont tout simplement été ajoutés. Prouvez-moi le contraire si je ne dis pas la vérité. A quoi servent toutes ces violations ? Pour maintenir Bouteflika en prison ?
Comment accepter ces dérives ?» Me Hadjouti énumère plusieurs commissions rogatoires, en commençant par celle qui concerne les comptes de Saïd à l'étranger, avec 52 pays, et qui est revenue négative, selon lui. «C'est dans les boîtes à archives dissimulées que nous avons trouvé ce document. Pourquoi le juge d’instruction ne nous l’a pas donné ?
Il nous a caché les réponses aux commissions rogatoires délivrées aux instances financières algériennes et étrangères parce qu’elles étaient en faveur de notre mandant. Malgré cela, il a décidé de la saisie de tous les biens du prévenu, y compris son héritage qui est dans l’indivision.
Même son épouse, qui est médecin spécialiste, a fait l’objet de commissions rogatoires sur ses biens, qui sont revenues négatives, et malgré cela, ils ont fouillé dans les biens de son père, parce qu’elle est l’épouse de Saïd. Ils lui ont saisi son studio parce qu’elle lui a donné le droit d’usufruit en tant que mari, vu qu’elle n’a pas d’enfant. De quelle justice parle-t-on ?» Les plaidoiries se sont poursuivies très tard, nous y reviendrons.