Poursuite à Dubaï de la 28e conférence de l’ONU sur le climat : Négociations serrées sur l’avenir des énergies fossiles

10/12/2023 mis à jour: 04:43
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Les négociations s’annoncent serrées à quelques jours de la fin de la Cop28 à Dubaï. Les experts, qui se sont penchés sur les aspects techniques, ont rendu leur rapport mercredi dernier. Les discussions entre les délégations de différents pays portent désormais sur les sujets qui «fâchent» et qui sont du ressort des ministres. 

Les négociateurs ont deux jours devant eux pour décortiquer, éplucher et étudier les différentes options et propositions de solutions quant à la poursuite de la mise en œuvre de l’Accord de Paris en 2015 et pour trouver des compromis sur quatre enjeux majeurs, à savoir juguler le recours aux énergies fossiles, doper les énergies renouvelables, débloquer les financements nécessaires à la lutte contre le réchauffement climatique, mettre en place le fonds «pertes et dommages». 

Les discussions s’annoncent difficiles, notamment sur les énergies fossiles où les divergences entre les pays sont accrues. 

D’ailleurs, pour le moment, les négociateurs sont loin d’arriver à un consensus, malgré les nombreuses options qui sont sur la table. Une forte pression a caractérisé le premier jour de cette seconde partie. On est bien à la phase critique de la négociation où ceux qui veulent marquer «le début de la fin» des énergies fossiles peinent à convaincre dans un contexte où une bonne partie de la planète n’a pas les moyens financiers pour faire la transition vers les énergies renouvelables. 

La tendance semble être en faveur de l’option de ne «rien décider», surtout lorsque l’on sait que près de 2500 représentants des compagnies des énergies fossiles étaient accrédités à cette conférence. Très actifs, ils font du lobbying auprès des négociateurs, ce qui a suscité de vives critiques de plusieurs ONG dédiées à la protection de l’environnement. C’est d’ailleurs certainement cette question des énergies fossiles qui tient en haleine les participants à cette conférence. L’optimisme est-il de mise ? Les experts divergent, et tout peut se décider à la dernière minute.
 

Giec retient son souffle

Cette 28e conférence est considérée comme celle du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Les négociateurs se basent en effet sur les données scientifiques de Giec. Le nouveau volet de son rapport a rendu compte des impacts, de l’adaptation et de la vulnérabilité liés au changement climatique. 
 

Les décideurs sont désormais, et plus que jamais, informés de la situation et deviennent de cette manière «responsables» devant tout éventuel acte en défaveur de la planète. Abdellah Mokssit, secrétaire général du GIEC que nous avons rencontré en marge des travaux de cette conférence, ne se montre pas pessimiste puisqu’il croit à la possibilité de pouvoir avoir le dernier mot en tant que scientifique. «C’est l’information scientifique qui est au cœur des négociations. 

Les décideurs n’ont aucune excuse pour dire que nous ne savons pas. Lorsque nous sommes informés, nous devenons responsables. Cette voie de la science leur permet de faire le bon choix», nous a t-il déclaré. 

Il y a lieu en effet de séparer le GIEC, en tant qu’instrument scientifique, de la convention cadre des Nations unies, qui est un instrument juridique. Autrement dit, le GIEC fait son expertise scientifique en mettant entre les mains des décideurs politiques des données réelles, tangibles et vérifiables. 

Les politiques sont ainsi mises devant leurs responsabilités historiques, exprime Abdellah Mokssi, qui précise que le GIEC évalue la recherche et propose des solutions, mais il n’a nullement le pouvoir d’imposer quoi que ce soit.  

«Le manuscrit de travail de cette Cop évoque la sortie des énergies fossiles, ce qui constitue une avancée», estime Fanny Petibon, responsable Plaidoyer à l’ONG Care France qui observe depuis 8 ans les différentes Cop. Elle se montre plutôt optimiste quant à la possibilité de l’actuelle conférence puisse faire «bouger les lignes» sur la question des énergies fossiles, comme cela été le cas pour le fonds «pertes et dommages», impensable il y a deux ans. 

Toutefois, le combat est loin d’être gagné, car «il ne suffit pas de réparer les dégâts mais de les éviter. Il faut couper le robinet des énergies fossiles qui alimente le chaos climatique», affirme-t-elle à El Watan. Il faut souligner qu’il y a bien un changement dans le discours, puisque le dossier des énergies fossiles était un tabou jusqu’à la Cop26 où la question du charbon était timidement évoquée. 

Même avec cette avancée, de l’avis de Habib Maaouf, observateur et professeur en journalisme environnemental à l’université du Liban, le réchauffement climatique a de «belles» années devant lui tant que l’économie de marché n’est pas réformée. «Les investisseurs attendent la fonte des glaciers pour chercher de l’énergie fossile !» regrette-t-il.
 

Dubaï
De notre envoyée spéciale Nassima Oulebsir


 

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