Ouverture de la 2e édition des Journées théâtrales arabes de Sétif : «La vie pour celui qui ose...» ou la grande douleur palestinienne

17/02/2024 mis à jour: 06:23
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Farouk Redouana a conçu le spectacle d’ouverture Soumoud Handhala (La résistance de Handhala) sur un texte de Djamel Labidi

Cinq pays participent à cette manifestation organisée par l’association culturelle Fen El Ibdaa de Sétif. Outre l’Algérie, l’Irak, le Sultanat d’Oman et la Tunisie participent avec des spectacles en compétition jusqu’à dimanche. 

La Palestine est représentée par le metteur en scène et comédien Ghanam Ghanam qui présentera un spectacle, Bi oumi ayni ya falestine (Avec mes propres yeux Palestine),  dans une forme circulaire traditionnelle au Musée public national d’archéologie de Sétif, aujourd’hui 17 février, à partir de 14h. 

Farouk Redouana, directeur des Journées théâtrales arabes de Sétif et président de l’association Fen El Ibdaa, a indiqué, lors d’une conférence de presse, à l’hôtel Azdif, que la Palestine était le pays invité d’honneur de l’événement culturel. «La cause palestinienne est celle du monde entier. 

Nous voulons envoyer un message artiste fort pour dénoncer ce qui se passe à Ghaza actuellement», a-t-il dit. Farouk Redouana a conçu le spectacle d’ouverture Soumoud Handhala (La résistance de Handhala) sur un texte de Djamel Labidi. 

Un spectacle constitué d’une série de tableaux, partagés entre expressions chorégraphiques et jeu de comédiens, sur le drame des Palestiniens à Ghaza actuellement, livrés à des crimes en masse commis par l’armée israélienne. «Ils ont tué les femmes, les enfants, les médecins, les secouristes, les journalistes, bombardé les ambulances, les écoles, les mosquées, les églises, les hôpitaux, violé les cimetières, pollué l’eau et la terre, coupé l’électricité et l’internet, déplacés les habitants...», ont crié les artistes sur scène pour évoquer la tragédie de Ghaza.
 

N’y a-t-il donc aucun humain parmi vous ? 

La normalisation des relations entre certains pays arabes et Israël, «le silence et la complicité des frères», l’indifférence du monde dit civilisé face au drame palestinien ont été fortement critiqués dans ce spectacle débordant d’émotion et de  colère... «Sourds, muets, aveugles...N’y a-t-il donc aucun humain parmi vous ? Je n’entends aucune voix parmi vous», lance un comédien à l’adresse de la salle. Une salle qui symbolise l’espace d’un instant l’immensité du monde contemporain. 

Un autre comédien surgit de la salle et vocifère : «Sourds, oui, vous êtes sourds. Vous n’entendez rien . Rien. Muets, muets. Vous ne dites rien ! Vous ne voyez donc rien...Dites quelque chose, dénoncez, criez à haute voix... Dites-le : génocide, génocide !» Soumoud Handhala s’attaque aussi aux «défenseurs des droits de l’homme, des libertés et de la démocratie», dans la sphère occidentale, qui ne réagissent pas au drame des Palestiniens. 

«Le masque est tombé du masque», a explosé le narrateur sur scène, reprenant un célèbre poème de Mahmoud Darwich, Madih el dhil al ali (Eloge de la haute ombre), critiquant l’attitude des pays arabes par rapport à la cause palestinienne et aux réfugiés palestiniens. L’auteur et le concepteur du spectacle se sont inspirés d’images réelles de Ghaza, de déclarations de la population civiles, d’écrits et de graffitis sur le mur dont le terrifiant La vie pour celui qui ose... (El hayatou li men yaj’roue). Une expression-douleur qui peut juste donner un aperçu sur ce que peut être une tragédie humaine de grande ampleur. 

Le spectacle, basé sur une musique vivante, a été clôturé par une interprétation furieuse de la chorégraphe et danseuse, Khadija Guemiri, exprimant la tristesse intense des mères palestiniennes qui ont perdu leurs enfants durant les bombardements israéliens de Ghaza sans pouvoir les sauver.

 

 

Dialogue entre les cultures

Créé en 1969 par le caricaturiste palestinien Naji Al-Ali, le personnage Handhala est devenu le symbole de la Palestine. Un personnage qui tourne le dos au monde et joint les mains derrière le dos.

Abdelfattah Benguergoura, secrétaire général de la wilaya de Sétif, a annoncé l’ouverture des Journées théâtrales arabes de Sétif et rappelé l’approche de la date de la célébration de la Journée nationale du chahid qui coïncide avec le 18 février de chaque année. «Le théâtre a toujours joué un rôle dans la transmission des valeurs de liberté et de justice et dans l’affirmation de l’identité nationale», a-t-il dit. 

«Cette édition est dédiée au martyr Hacene Belkired qui a réuni entre la pensée politique et l’art. Il était le précurseur du théâtre sétifien. Sétif fut une tribune du militantisme et de la résistance face à un colonialisme cruel. Le théâtre joue un rôle dans la construction de la société et dans la consolidation des valeurs du dialogue entre les cultures», a déclaré, pour sa part, Hamza Belayat, président de l’APC de Sétif. 

L’APC de Sétif, l’une des plus riches en Algérie, a soutenu financièrement les Journées théâtrales arabes. Cinq spectacles sont en compétition : El gharib ou nakib (Sultanat d’Oman), Hadja okhra (Tunisie) et Azra’eil (Irak). L’enjeu de la troupe Les compagnons de Nedjma de Sétif et Hallaq ichbilia du théâtre régional d’Annaba représentent l’Algérie. Mise en scène par Boukhari Hebbal, Hallaq ichbilia (Le barbier de Séville) a décroché le prix du jury et le prix de la meilleure musique au 16e Festival national du théâtre professionnel d’Alger (FNTP), qui s’est déroulé fin décembre 2023. 

Le metteur en scène et scénographe algérien, Ahmed Rezzak, préside le jury. Jury composé aussi de Safa El Baily (Egypte), d’Ahmed Hamed (Irak),  de Hafedh Khalifa (Tunisie)  et de Samira Sahraoui (Algérie). Trois ateliers de formation se déroulent durant les Journées théâtrales arabes sur l’actorat, l’écriture dramatique et la scénographie.
 

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