Nouvelle donne gazière mondiale : Les conseils avisés de Sadek Boussena

07/12/2023 mis à jour: 00:40
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Photo : D. R.

L’ancien ministre de l’Energie, Sadek Boussena, estime que les questions pétrolières et gazières nationales ne relèvent pas uniquement d’équations économiques et techniques, car selon lui, «les bonnes réponses ne peuvent émaner que d’un débat politique en vue  d’asseoir le plus large consensus possible autour de mesures et de réformes dont certaines sont certes complexes et difficiles à entreprendre mais urgentes à traiter».

L’Algérie, en tant qu’exportateur important de gaz naturel, doit rester en veille stratégique afin de s’adapter aux développements possibles du marché gazier qui la concerne au premier chef, avertit Sadek Boussena, ancien directeur général de Sonatrach et ancien ministre de l’Energie et de l’Industrie.

«L’avenir du marché international est incertain sur les plans des débouchés, des prix, du climat, de la sécurité, etc. Les analyses exigent encore plus de rigueur et de lucidité pour en extraire des perspectives réalistes, détecter les opportunités et les risques», préconise M. Boussena au sujet du débat sur la stratégie gazière nationale.

Celle-ci doit dorénavant prendre en compte, entre autres aspects «le rapport de force au niveau international sur notre politique énergétique intérieure, au vu de la compétition rude et multidimensionnelle qui s’installe sur le marché», a en outre souligné l’ancien ministre, lors d’une conférence-débat intitulée «L’Algérie et la nouvelle donne gazière mondiale», organisée dans le cadre du Club Energy qui regroupe notamment d’anciens ministres et hauts cadres du secteur.

«L’Algérie a connu des situations de perte de marchés - exemple du marché américain qui s’est retourné à la fin des années 1970, et la baisse de la demande en Europe dans les années 1980 - d’où  l’intérêt absolu de se doter d’une vision du futur qui soit la plus élaborée possible, y compris en recourant aux meilleures expertises mondiales», souligne 
M. Boussena. Il mettra l’accent sur l’élaboration de «scénarios avec les hypothèses les plus plausibles en termes de concurrence, de prix, de croissance économique mondiale, de place du gaz dans la transition énergétique, de garanties contractuelles et conditions géopolitiques».

Il s’agit pour Sonatrach, selon l’ancien ministre, d’affiner «les prévisions de la demande européenne et des prix sur ce marché».

Sadek Boussena a entamé sa conférence en plantant le décor 
actuel du marché gazier mondial en rappelant notamment que «deux crises, l’une sanitaire, la Covid-19 et l’autre géopolitique, le conflit Russie-Ukraine, ont sérieusement bousculé le monde de l’énergie».

Si la première crise a mis le pétrole en exergue, «le gaz naturel a été la vedette de la seconde», souligne M. Boussena qui rappelle que «2022 aura été l’année la plus perturbante de l’histoire du marché gazier international». Il indiquera que «si en Occident, lorsqu’on parle de sécurité énergétique, on fait strictement référence à celle des approvisionnements,  l’expérience montre que les exportateurs aussi y sont confrontés, d’autant que le gaz naturel n’a pas de marché captif».

Sadek Boussena estime que «l’Algérie, comme d’autres exportateurs de gaz, pourrait être interpellée par la question de la sécurité de ses débouchés» du fait, par exemple, d’une crise géopolitique, où elle serait impliquée, ou de chute de recettes, en cas de crise économique internationale ou régionale.

Approfondir la réflexion sur la stratégie énergétique

«Faut-il s’en tenir strictement au caractère commercial des contrats, ou intégrer parfois la qualité stratégique et la coopération entre Etats ?», s’interroge par ailleurs M. Boussena, en relevant que «la question peut interpeler l’Algérie». Face au développement du marché du GNL et le basculement de l’Europe vers une position d’importateur majeur, «l’Algérie doit-elle s’impliquer plus dans les marché spot ?», se demande en outre le conférencier.

L’ancien ministre de l’Energie signalera que «les épisodes de prix négatifs sur les marchés papier et la flambée des prix spot en été 2022 ont relancé le besoin de réflexion concernant l’opportunité de s’impliquer plus fortement dans les marchés spot».

Il estimera que dans ce contexte «Sonatrach est bien placée vis-à-vis du marché européen, surtout en Méditerranée, et elle peut utiliser cet avantage et celui de son infrastructure flexible (gazoducs/GNL/méthaniers) pour profiter, le cas échéant, des pics de prix et d’opportunités d’arbitrage».

«Faut-il réserver des quantités de gaz ou de GNL à cette fin, ou maintenir la couverture la plus large possible des exportations via des contrats à long terme ?» Autant de questionnements qui appellent une réflexion approfondie sur la future stratégie gazière de l’Algérie au sens, ajoute l’ancien ministre.

A propos de la contrainte climatique et ses effets sur le gaz algérien, M. Boussena estime que l’Algérie doit actualiser sa stratégie de lutte contre les émissions de CO2, conformément à ses engagements internationaux, indiquant que cela suppose des dispositions à prendre «dans un futur proche».

Il citera notamment la diminution des fuites de gaz dans les gazoducs, l’élimination du torchage du gaz, la  récupération et l’utilisation du gaz et des émissions fugitives, la relance du programme de captation/séquestration du carbone ou CCS, la plantation d’arbres (barrage vert à la lisière du Sahara), etc.

Plus globalement, M. Boussena estime que les questions pétrolières et gazières nationales ne relèvent pas uniquement d’équations 
économiques et techniques car,  selon lui; «les bonnes réponses ne peuvent émaner que d’un débat politique, en vue  d’asseoir le plus large consensus possible autour de mesures et de réformes dont certaines sont certes complexes et difficiles à entreprendre mais urgentes à traiter». 

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