En général, les premiers travaux cinématographiques des potentiels futurs talents sont des préludes aux styles et aux idées futures. Mais il est difficile de présager quoi que ce soit concernant la restitution des travaux de la 10e édition du Lab dz, une initiative de l’Institut français d’Algérie qui s’est tenue cette année à Constantine et a concerné une dizaine de travaux présentés récemment à Oran, à l’IFO.
L’initiative est louable dans la mesure où elle permet à des jeunes gens de s’initier aux métiers du cinéma mais les contenus dépendent exclusivement des auteurs et c’est là que les choses ne semblent pas aller de soi même s’il faut garder à l’esprit que tout travail mérite un encouragement. Un premier opus, un montage sonore, c’est-à-dire sans aucune image, évoque en résumé la solitude d’une jeune femme qui se résigne à accepter la compagnie d’un lézard.
Une réalisation presque sans saveur avec un contenu qui ne renvoie à rien d’autre qu’aux pensées du personnage mais dénuées de toute poésie ne fussent-elles divagantes. Il n’y a pas de lézard dans le deuxième opus mais il est beaucoup question de cheveux à exhiber ou à couper. Là aussi avec toutes les «modes» qui s’expriment bien dans les villes algériennes, on ne peut pas dire que cette préoccupation puisse présenter un intérêt quelconque même si l’auteur veut lui donner un contenu politique. C’est du moins ce qu’il a lui-même affirmé à la fin de la présentation.
Double Miloud, titre d’un court métrage, «imagé» cette fois, aurait bien pu présenter un réel intérêt avec la focalisation sur un personnage réel mais hors du commun, un marginal qui n’a pas la langue dans sa poche et préférant la compagnie de ses chiens qu’il chérit. En affirmant, vrai ou pas, qu’il avait participé à un attentat à Biskra durant la guerre de Libération, une action qui, selon lui, a poussé le général de Gaulle à se déplacer sur les lieux, le Miloud en question donne une piste qui mérite d’être exploitée eu égard à ce qu’il devenu, délaissé à un triste sort.
Au détour d’une conversation avec le «filmeur», celui-ci dit également qu’il a été, plus tard après l’indépendance, l’«artificier» du cinéaste Lakhdar Hamina pour les besoins de l’une de ses œuvres consacrée à la guerre de Libération, ce qui n’est là aussi pas rien car pouvant constituer un vrai centre d’intérêt pour un cinéaste débutant. Mais le travail en question, centré en partie sur la propre famille de l’auteur, passe à côté de l’essentiel malgré l’idée du dedans/dehors mise en avant pour défendre son contenu. A ce propos, le personnage dont il est question ici rappelle un des court métrage présentés dans ces mêmes lieux et mettant en scène une femme marginale dans un quartier populaire à Annaba mais l’intérêt ici était d’avoir fait le lien avec le «Hirak» car elle y a pris part mais la comparaison s’arrête-là.
Les réalisations faites sur la base d’images d’archives d’autres films, les «mashup» dont il est aussi question dans les choix techniques de certains participants manquent d’originalité. On a par exemple beaucoup puisé dans le film Mascarades mais, en général, on sent un manque d’investigation ou d’investissement pour mieux explorer les œuvres dans le sens de créer un récit avec une certaine cohérence qui soit au service de la thématique choisie. On a l’impression que ça part dans tous les sens, que ce soit concernant le sujet du cinéma ou celui de l’amour, là où on est toujours en retard d’une guerre. Sur un autre registre, les montages photographiques, un autre genre également pris en compte, on peut dire que ni les images de camping sur une plage déserte ni même les contre-plongées consacrées aux ponts de Constantine ne sont convaincantes.
Une espèce de légèreté qui n’épargne pas les échanges de politesses entre Oran et Constantine dans un autre des films présentés et où il est question, à titre illustratif (car le film aborde plusieurs aspects), d’un plat de pâtes avec du «Sprite» (boisson gazeuse de la firme Coca Cola), ou alors de la dégustation d’une pièce de «makroud» (pâtisserie traditionnelle). Après tout, pour ce dernier cas, on a déjà vu un court métrage mettant à l’honneur la traversée de la ville d’Alger pour un morceau de «kalb louz» mais c’est une toute autre histoire. Les travaux ont quand même le mérite d’exister et tout peut changer à l’avenir.