Métiers des IT : Des talents de plus en plus rares

10/05/2023 mis à jour: 11:00
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Dans les métiers de l’IT, les talents sont de plus en plus rares. Un constat fait hier lors d’un panel du forum des technologies de l’information et de la communication (CTO) organisé par BoostEvent au Centre international de conférences Alger (CIC). La problématique des profils IT de plus en plus rares dans les entreprises est plus que jamais d’actualité et se pose avec acuité pour les managers. Un casse-tête aussi pour l’Algérie en pleine transformation numérique.

Il y a un déficit et une pénurie dans ce secteur stratégique mais qui ne date pas d’aujourd’hui, et les gérants de différentes entreprises en ont de plus en plus conscience parce qu’il y a eu, entre autres, une accélération de la digitalisation, liée à la crise sanitaire. Il y a 3,5 millions de postes à pourvoir dans le monde. Dans ce contexte, il y a une véritable urgence à saisir les enjeux et surtout à agir.

Pour Adel Amalou, co-fondateur Incube-Me, «on est un pays qui forme mais pas un pays qui produit. Les jeunes ont besoin de projets prometteurs mais aussi de moyens. Il faut savoir que ces métiers sont fortement rémunérés ailleurs. Il y a une réelle demande sur la cybersécurité par exemple. Il faut tracer un plan pour réduire les départs et faire baisser le taux de turnover (rapport entre les départs et les embauches). En 2021, j’ai eu 60 % de départs, les raisons ne sont pas d’ordre salarial, ni pour les projets mais pour la qualité de vie. Ils ont quitté le pays pour l’Europe ou l’Amérique du Nord». Louai Djafar, GM Emploitic, connaît bien cette problématique. Il a souligné  que «ce qu’on remarque, c’est que tous nos clients souffrent, c’est une problématique mondiale. On a des solutions individuelles, il faudrait des solutions collectives, chacun seul dans son coin, je ne pense pas qu’on puisse avancer».

Hachimi Benali, CEO CM Consulting, met le doigt sur la plaie : «Quand on regarde la problématique internationale, on se rend compte qu’en est une entreprise désarmée face à des pays comme l’Allemagne ou la France qui a besoin de 700 000 ingénieur d’ici 2030 avec des politiques d’emploi attrayantes qu’on n’a pas malheureusement. Le vrai problème est là. Le deuxième problème, c’est le marché, notre entreprise fête ses 20 ans, on a vécu 2 épisodes avant et après le Covid. Avant, ils restaient 15 ou 16 ans, aujourd’hui 2 ou 3 ans au maximum et ils partent bien que les anciens restent.

C’est une nouvelle tendance. 90 % de nos collaborateurs sont jeunes et on les forme pour travailler sur des projets intéressants, il faut qu’ils soient nombreux et une dynamique de marché pour qu’ils puissent rester». Il ajoute : «On est dans une phase de balbutiement de la numérisation. De plus en plus de jeunes ne veulent pas être salariés, on doit s’adapter à ce modèle». Fatiha Zeghoudi, CEO Cysafe Consulting, affirme qu’il faut développer «la culture de l’entreprise et la valorisation des profils. Il leur faut un point d’attache».

En 2009, l’Algérie formait 5 000 informaticiens par an et avait mis en place un programme pour arriver à tripler ce nombre pour atteindre en cinq ans 15 000 diplômés en informatique chaque année. L’expert algérien en cyber-sécurité, Abdelaziz Derdouri, a fait savoir que 80% des ingénieurs informaticiens algériens partent à l’étranger trois ans après la fin de leur formation. Selon les données de l’organisme Africa Developer Ecosystem, l’Algérie comptait 29 000 développeurs en 2021.

Si le chiffre peut paraître important, il devient moins consistant quand on le compare avec ceux des autres pays africains. Le Maroc en comptait 50 000, l’Égypte et le Nigeria 89 000, l’Afrique du Sud 121 000 et le Kenya 40 000. La taille de l’économie algérienne et sa très faible digitalisation ne permettent pas d’absorber tous les contingents d’informaticiens qui sont formés chaque année, encore moins de leur assurer les mêmes conditions que peuvent leur offrir les pays occidentaux qui, eux, recrutent les informaticiens à tour de bras pour les besoins de numérisation de leurs administrations et de leurs économies. En 2020, le rapport de Google avait recensé 28  000 développeurs professionnels qui exerçaient en Algérie qui renferme 4 % des développeurs de tout le continent africain.

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