Mer de Chine : Un navire de guerre australien a franchi le détroit de Taïwan

25/11/2023 mis à jour: 04:28
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Les relations entre la Chine et l’Australie ont connu des tensions durant le passage des conservateurs au pouvoir à Canberra

Le ministère taïwanais de la Défense a affirmé hier qu’un navire de guerre australien a franchi la veille le détroit de Taïwan, la voie navigable qui sépare l’île autonome de la Chine continentale voisine, selon des propos recueillis par l’AFP. Le navire est entré dans le détroit jeudi et s’est dirigé en direction du sud, a indiqué le ministère. 

«Lors de la traversée du détroit, l’armée taïwanaise a surveillé la situation de l’espace maritime et aérien, et la situation était normale», a-t-il ajouté. 

Ce détroit, de 180 kilomètres de large, est un passage incontournable pour le transport maritime international et représente un enjeu géopolitique pour Pékin, qui revendique l’île autonome comme faisant partie de son territoire. 
L’armée taïwanaise fait part de passages quasi quotidiens de navires dans ses eaux ainsi que des incursions d’avions de guerre chinois dans sa zone de défense aérienne. Les Etats-Unis envoient leurs navires de guerre dans le détroit de Taïwan pour des traversées «de routine». 

Des navires de guerre britanniques, canadiens, français et australiens ont tous effectué des traversées ces dernières années, suscitant l’ire de Pékin. 

Le passage de jeudi dans le détroit intervient après la déclaration, la semaine dernière, du ministre australien de la Défense, Richard Marles, selon laquelle des plongeurs ont «probablement» été blessés par des impulsions émises par le sonar d’un navire de guerre chinois au large du Japon. De son côté, le Premier ministre du pays-continent, Anthony Albanese, a soutenu que le navire de guerre chinois a fait preuve d’un comportement «dangereux (...) et non professionnel» en mer. Propos qualifiés par le porte-parole du ministère de la Défense chinois, Wu Qian, d’«accusations irréfléchies et irresponsables» du pays de la Grande Muraille. 

Les relations entre la Chine et l’Australie ont connu des tensions durant le passage des conservateurs au pouvoir à Canberra. En 2018, le gouvernement australien de l’époque a exclu le groupe privé chinois Huawei du réseau 5G du pays. En 2019, les autorités australiennes ont publiquement dénoncé une ingérence croissante de la Chine dans les affaires intérieures de l’Australie, par le biais, notamment, de dons à des partis politiques, dans le but d’influencer la politique de l’île-continent.

 En août de la même année, le député australien Andrew Hastie, président du comité parlementaire sur le renseignement et la sécurité, a publiquement comparé l’essor actuel de la Chine avec celui de l’Allemagne nazie avant la Seconde Guerre mondiale. 
 

Des frictions à l’apaisement

Aussi, le Parlement australien a adopté une série de lois pour lutter contre l’espionnage et l’ingérence étrangers. En 2020, l’Australie a demandé une enquête internationale sur l’origine de la pandémie de Covid, détectée dans la ville chinoise de Wuhan à la fin de 2019. En avril 2021, le gouvernement australien a annoncé l’annulation de deux accords de coopération signés par la Victoria, l’un de ses six Etats fédérés, avec la Chine pour se joindre aux «Nouvelles Routes de la soie». De tels accords sont «incompatibles avec la politique étrangère australienne ou contraires à nos relations internationales», a déclaré la ministre des Affaires étrangères, Marise Payne, appliquant une loi adoptée en décembre 2020 autorisant le gouvernement fédéral à annuler ces accords s’ils compromettent les intérêts nationaux. A ces différends, s’ajoutent les condamnations par Canberra de la politique chinoise à l’égard des Ouïghours, au Xinjiang, ou à l’encontre de Hong Kong. 

En riposte, la Chine a imposé, en 2020, des droits de douane élevés sur des exportations australiennes clés, telles que l’orge, le bœuf et le vin, au plus fort d’un conflit diplomatique avec l’ancien gouvernement conservateur en poste à l’époque à Canberra. Pékin a également cessé d’acheter en Australie d’importantes quantités de matières premières, dont le charbon. Comme il a déconseillé à ses étudiants de fréquenter les universités australiennes, citant des incidents racistes. 

Les tensions sont montées d’un cran en septembre 2021, quand l’Australie a annoncé son adhésion à l’accord trilatéral d’Aukus avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Dans ce cadre, les trois pays ont lancé, en mars dernier, le programme de coopération concernant les sous-marins nucléaires. L’Australie est membre du Dialogue quadrilatéral pour la sécurité (Quad) aux côtés des Etats-Unis, de l’Inde et du Japon. Elle est aussi membre de l’alliance dite «Five Eyes» dans le renseignement avec la Grande-Bretagne, le Canada, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis. 

En janvier, la Chine a exhorté l’Australie à se souvenir des crimes de guerre commis par le Japon pendant la Seconde Guerre mondiale avant de se rapprocher de Tokyo, avec qui Canberra a signé en octobre un pacte de sécurité historique. «Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Japon a envahi l’Australie, bombardé Darwin, tué des Australiens et fusillé des Australiens» prisonniers de guerre, a déclaré l’ambassadeur de Chine en Australie, Xiao Qian, à la presse. «Faites attention à ce qui pourrait se passer à l’avenir. Quand quelqu’un vous menace, il peut vous menacer à nouveau», a-t-il observé. Et de rappeler : «La Chine a été votre amie.» 

Ceci dit, les deux pays ont opté, avec l’arrivée au pouvoir des travaillistes en mai 2022, pour la désescalade. Ainsi, Pékin a rouvert son marché au charbon australien en mars dernier, puis levé des taxes prohibitives sur l’orge en août.
Début novembre, Anthony Albanese a effectué une visite en Chine. A cette occasion, le président chinois, Xi Jinping, a indiqué que Pékin et Canberra peuvent devenir des «partenaires de confiance». 

De son côté, A. Albanese a salué des progrès «incontestablement très positifs» dans les relations bilatérales.

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