Les Rencontres cinématographiques de Béjaïa, événement incontournable pour les amateurs du septième art en Algérie, font leur retour du 24 au 29 septembre. A l’affiche, pas moins de 35 films, dont sept longs métrages, cinq documentaires et treize courts métrages mêlant fiction et documentaire.
A cette sélection, s’ajoute un hommage à la Palestine, avec dix courts métrages témoignant de la force du cinéma pour éclairer les tragédies souvent ignorées. Lors d’une conférence de presse tenue à la Cinémathèque d’Alger, les membres de l’association Project’heurts à l’origine de l’organisation des RCB, Hassan Kerraouche, Hakim Abdelfettah et Aissam Nacereddine, ont levé le voile sur le programme de cette 19e édition.
Un défi relevé malgré des moyens financiers en berne, «pis encore que d’habitude», a confié l’équipe, marquée par une baisse des subventions de leurs sponsors habituels. Cette année, plus de 370 films ont été soumis, mais tous n’ont pu être retenus. Hakim Abdelfettah précise : «Certains films nous ont beaucoup plu, mais nous n'avons pas pu les programmer.»
Le fait est que le paysage cinématographique mondial est en plein chamboulement, marqué par des grands festivals de la région MENA, qui exigent des exclusivités, ce qui complique la tâche des organisateurs. «Cela brise notre élan premier : présenter des films algériens, mais pas uniquement, qui nous semblent essentiels à montrer en Algérie», déclare Nabil Djedouani , directeur artistique de ces 19èmes rencontres dans un post sur Facebook .
Hakim Abdelfattah lance un appel aux réalisateurs pour s’imposer face aux producteurs et aux distributeurs afin que leurs œuvres puissent être montrées en Algérie. Le programme de cette édition comporte malgré tout une sélection intéressante.
Le long métrage Six pieds sous terre, de Karim Bensalah, ouvrira les festivités. Le film raconte l’histoire de Sofiane, fils d’un ex-diplomate algérien, victime d’une décision administrative et vit sous la menace d’une expulsion. Dans l’espoir de régulariser sa situation, il accepte de travailler pour des pompes funèbres musulmanes. Entre les fêtes, les rencontres et son emploi, Sofiane va se découvrir dans un parcours initiatique qui le conduira à construire sa propre identité et passer peu à peu vers l’âge adulte.
Ce n’est rien en avant-première
Sera projeté, jeudi 26 septembre, le très attendu film sur Frantz Fanon (ayant pour titre : Chroniques fidèles survenues au siècle dernier à l'hôpital psychiatrique de Blida-Joinville au temps où Dr Frantz Fanon était chef de la cinquième division entre 1953 et 1956) d’Abdenour Zahzah. En avant-première, Ce n’est rien, du prolifique Merzak Allouache, sera dévoilé.
Il raconte l’histoire d’une comédienne, Ouardia (jouée par Hamida Aït Lhadj), partagée entre sa carrière d’actrice de théâtre qu’elle tente de maintenir à flot et son fils, Rachid, jeune handicapé moteur de 25 ans, et qui voit des personnes proches d’elle sont mystérieusement assassinées les unes après les autres…
La direction artistique des RCB regrette l'absence de La première ligne du même Allouache récemment projeté au Festival international de Toronto mais réservé en exclusivité pour le Red Sea Festival.Les RCB projetteront également le film Ben M’hidi, de Bachir Derraïs, dans sa version bien connue du public, tout comme l’œuvre Boualem Zide el Goudem du regretté Moussa Haddad dans sa version restaurée. Lamine Amar Khodja présentera, quant à lui, Houbla, dont le pitch est présenté comme suit : «En se promenant dans un jardin à Alger, un peintre voit apparaître au loin la silhouette d’un homme. Intriguée, elle décide de le suivre, mais l'homme disparaît. De retour chez elle, elle persiste à le retrouver à travers ses dessins et peintures. S’ensuit une longue rêverie, en forme de quête initiatique, empreinte de mysticisme. Est-ce le peintre qui a vu l'homme, ou est-ce l'inverse ? »
Dans le menu des documentaires, Taghezout Ghezali présentera Des hommes libres en présence de Kateb Amazigh, Karim Sayad reviendra avec 2G, Nadia Zouaoui dévoilera La promesse d'Imane, Walid Sahraoui présentera, en avant-première, Je est un autre, Marcel Mlerjen projettera Memories of an Unborn Sun. Le film Pour que ses jours fleurissent, de Nicole Ferry, fera le tour de quelques communes de Béjaïa, dont Aït Aïssa, Timezrit et Akbou.
Celui-ci est consacré à la transmission de mère en fille des connaissances et traditions autour de l'accouchement dans la société kabyle. Dans le menu des courts métrages, il y a notamment Printemps reporté, de Walid Bouchebbah, Daw, de Samir Ramdani, Inconnu, d’Ahmes Zitouni, Varitas, de Thomas Castaing ou encore Abdelkader, d’Oumnia Hanader.
La Palestine, fil rouge de cette édition, sera au cœur de la programmation avec Some Strings, une sélection de courts métrages inspirés du poème de Rafâat Alareer Si je dois mourir, Qu'il en naisse de l'espoir, Qu'il en reste une histoire. Dix films issus de ce projet mondial seront projetés en début de séance, prolongeant ainsi la réflexion sur la tragédie vécue par le peuple palestinien, ignorée de la communauté internationale. Le festival ne s’arrête pas aux projections. Des tables rondes enrichiront cette édition avec des débats sur des thèmes cruciaux comme «Cinéma, les influenceurs sont-ils plus prescripteurs que les critiques ?» ou encore le complexe sujet du «Rapatriement et restitution des archives cinématographiques».
Parallèlement aux projections, les Rencontres cinématographiques de Béjaïa renouent avec leur engagement en faveur de la jeune création algérienne avec la Bourse Zermani. «Nous sommes très honorés par les candidatures reçues pour la Bourse Zermani : 44 au total, avec des noms bien connus de la scène cinématographique algérienne et même internationale», sourit à ce propos Hakim Abdelfatah. Initiée par l’artiste Sofiane Zermani, alias Fianso, cette bourse de 500 000 DA vise à soutenir l’écriture cinématographique émergente. Les scénarios sélectionnés seront accompagnés par une série d'ateliers dédiés au pitch et aux dialogues, avec une masterclass intitulée De la rime à l’écran, animée par Fianso lui-même.
Ce dernier, aux côtés d’Amazigh Kateb et de la chanteuse et actrice Kamelia Jordana, enrichira les discussions sur la porosité entre musique et cinéma. Enfin, un atelier sur «l’adaptation littéraire au cinéma» verra la participation d’auteurs algériens qui devront discuter de la scénarisation des œuvres littéraires. Et en plus d’une projection pour enfants autour du film de Hakim Traïdia, un atelier de coloriage sera ainsi organisé autour de l’affiche -signée Slim- de ces 19es rencontres cinématographiques.