Les Présidents, des hommes et des contextes

05/09/2024 mis à jour: 21:52
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Avec le scrutin du 7 septembre 2024, l’Algérie aura à sa tête le septième président de la République depuis son accession à l’indépendance. Avant Abdelmadjid Tebboune, il y a eu Abdelaziz Bouteflika, Liamine Zéroual, Mohamed Boudiaf, Chadli Bendjedid, Houari Boumediène et Ahmed Ben Bella, chacun avec un profil particulier et un parcours singulier, lié bien entendu aux conditions politiques et économiques de leur époque.

Les trois premières années de l’Algérie indépendante, sous Ben Bella, ont été marquées par un mélange de populisme teinté de références socialisantes. Après le coup d’Etat du 19 juin 1965, Houari  Boumediène s’entoura d’un Conseil de la Révolution chargé de  l’orientation et du contrôle politique comprenant les principales branches du FLN.

Il monopolisa le pouvoir avec l’intention d’arriver graduellement à changer le champ politique fermé. Son décès en décembre 1978 laissa inachevées les diverses réformes entreprises au niveau institutionnel, industriel et agraire. Pour sa succession, le congrès du FLN de janvier 1979 désigna le colonel Chadli Bendjedid, membre du Conseil de la Révolution, qui bouleversa les choix économiques de son prédécesseur, mais fut contesté par la rue dans un contexte de grave crise financière.

Les émeutes d’Octobre 1988 poussent le Président à se lancer dans un processus dit d’ouverture politique et médiatique. Ce fut un foisonnement de partis et de médias privés, mais sans la mise en pratique de la démocratisation recherchée.

Le principal obstacle fut le parti islamiste, l’ex-FIS qui, après avoir remporté le premier tour des élections législatives le 26 décembre 1991, s’attaqua à l’Etat républicain et ouvrit la voie à l’apparition de la violence totale. Le processus électoral fut suspendu suite à la démission de Chadli  Bendjedid le 11 janvier 1992, lequel fut remplacé par un Haut Comité d’Etat (HCE) de cinq membres.

Après la dissolution de l’ex-FIS, réapparaît la figure historique emblématique de Mohamed  Boudiaf. Porté à la tête de l’Etat, il suscita l’espoir populaire. Il ne put aller au bout de ses idées dans un climat de généralisation du terrorisme islamiste auquel s’opposèrent l’armée et la résistance populaire.

Les affrontements sanglants qui se déployèrent à une large échelle provoquèrent des dizaines de milliers de morts et déplacèrent environ 1 million de personnes. Le président Boudiaf sera assassiné le 29 juin 1992 à Annaba, dans des circonstances à ce jour non élucidées.

Il est remplacé par Ali Kafi à la tête du HCE et en novembre 1995, une élection présidentielle sera organisée. Liamine Zeroual remporte le scrutin. Un an plus tard, une nouvelle Constitution renforce les pouvoirs du président de la République et crée notamment une seconde Chambre parlementaire, le Conseil de la nation.

Après la démission surprise de Liamine Zéroual, une élection présidentielle est organisée en avril 1999. Elle aboutit à l’élection de Abdelaziz  Bouteflika. La totalité des autres candidats avaient décidé de boycotter le scrutin. Le nouveau Président s'attelle à mettre en œuvre un processus dit de réconciliation nationale.

Des revendications liées à la question amazighe entraînèrent de graves émeutes, notamment en 2001. Bouteflika bénéficia d’une manne financière sans précédent du fait de l’explosion des prix des hydrocarbures sur le marché mondial. De grands projets d’équipement publics furent lancés.

Il y a cependant eu peu d’investissements productifs. Cela peut s’expliquer par un manque de volonté politique, mais surtout par une corruption généralisée qui s’est installée avec l’assentiment et la complicité du frère du président de la République.

Abdelaziz Bouteflika sombra  dans une grave maladie à partir de 2013, ce qui ne l’empêcha pas de briguer un cinquième mandat. Une révolte populaire, le Hirak, et l’intervention de l’armée stoppèrent net cette folle ambition. Abdelmadjid Tebboune succéda à Abdelaziz Bouteflika le 12 décembre 2019.

Il annonça un ambitieux programme de lutte contre les oligarques et de remise à niveau des institutions et de l’économie nationale, mettant à profit la manne financière tirée des hydrocarbures, en hausse suite à la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

La grave épidémie de Covid-19 ralentit ce processus pendant  près de deux années. Sa politique ambitieuse a nécessité toutefois un niveau élevé de dépenses publiques et c’est un des grands défis qui lui sera posé en cas de réélection.

Ses deux adversaires à la présidentielle du 7 septembre, le président du MSP, Abdelaali Hassani Cherif, et le premier secrétaire du FFS, Youcef Aouchiche, ont tous deux prôné, durant la campagne électorale, un changement dans la conduite des affaires publiques comme ils ont plaidé pour une relance du dialogue politique et de meilleures conditions d’exercice des libertés collectives et individuelles. Il revient à présent au peuple de trancher. 
 
 

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