Avec son lot de massacres au quotidien, sa population déchirée, déchiquetée, éparpillée, déportée, Ghaza n’avait pas le cœur à la fête. En plein Aïd El Adha, la population palestinienne a continué à compter ses morts lorsqu'une nouvelle salve de raids sauvages est venue s’abattre indistinctement sur plusieurs secteurs d’El Qita’ déjà lourdement endeuillés après huit mois d’une campagne d’une extrême brutalité.
Malgré une pause humanitaire partielle annoncée par l’occupant, ce qui a donné lieu à un «calme relatif» en Palestine, selon la formule de l’AFP, la bande de Ghaza a continué à subir les raids meurtriers de la machine de guerre israélienne en plein Aïd El Adha.
Au moins trois massacres ont été commis en 24 heures, entre lundi et mardi, faisant 25 morts et 80 blessés, selon le ministère de la Santé dans la bande de Ghaza. La même source fait savoir que le bilan de la guerre s’élève désormais à 37372 martyrs et 85452 blessés.
Au cours de la journée d’hier qui marquait le 256e jour de l’agression militaire israélienne contre Ghaza, des bombardements ont ciblé plusieurs secteurs de l’enclave martyrisée, particulièrement au centre et au sud du territoire palestinien dévasté.
Ces frappes ont fait 17 morts selon l’agence Wafa. «Nos correspondants rapportent que les équipes de secours ont retiré des décombres les corps de 8 martyrs ainsi que plusieurs blessés, suite à une attaque qui a ciblé le domicile de la famille Al Raï, dans le camp de Nusseirat, au centre de la bande de Ghaza», a indiqué, hier, l’agence de presse palestinienne. En outre, 5 autres personnes ont été tuées dans le bombardement de locaux commerciaux appartenant à la famille Al Madehoun, toujours à Nusseirat.
A noter aussi les attaques menées contre des zones agricoles dans la région d’Al Mufti, au nord de Nusseirat, ainsi que sur le quartier de Tell El Hawa et Haï Al Zaytoun dans la ville de Ghaza. Des raids aériens et des obus ont également visé une habitation de la famille Harb au camp d’Al Bureij, faisant un certain nombre de morts et de blessés, selon Wafa.
«Pause humanitaire»
Simultanément, des avions de combat israéliens ont déclenché des frappes sur la région d’Al Magharka et dans le secteur de Wadi Ghaza ainsi que dans la zone est de Deir El Balah, au centre de l’enclave. Au sud de la bande de Ghaza, les troupes israéliennes poursuivent leur incursion dans plusieurs quartiers de la ville au milieu de tirs nourris et de pilonnages intensifs à l’artillerie lourde, ajoute l’agence d’information palestinienne.
L’AFP confirme que des «bombardements meurtriers sur plusieurs secteurs de la bande de Ghaza» ont été enregistrés, hier, signalant que «les plus violents ont touché la ville de Rafah, dans le sud». «Toute la nuit, des explosions ont été entendues à Rafah, cible d’intenses tirs d’artillerie», écrit l’agence française.
Dans la journée de lundi qui coïncidait avec le deuxième jour de l’Aïd, l’armée israélienne a mené des frappes au nord de la bande de Ghaza. «Mais la situation est relativement plus calme depuis le début d’une pause humanitaire observée par l’armée dans un secteur du Sud. Cette pause, dont l’annonce a coïncidé dimanche avec le premier jour de la fête musulmane du sacrifice, a pour but de faciliter l’acheminement dans le territoire palestinien de l’aide humanitaire, dont les Ghazaouis ont cruellement besoin», affirme l’AFP.
Et de préciser : «L’armée (israélienne) a annoncé une pause «de 08H00 à 19H00 (heure de Ghaza) tous les jours et jusqu’à nouvel ordre», sur un tronçon routier d’une dizaine de kilomètres, allant du point de passage israélien de Kerem Shalom, à l’extrémité sud de la bande de Ghaza, jusqu’à l’Hôpital européen de Rafah, plus au nord».
Cette pause «observée localement» a pour but «de permettre à l’ONU de collecter et distribuer plus d’aides», a déclaré lundi un porte-parole israélien depuis le poste de Karam Abou Salem, cité par l’AFP.
Tout en saluant cette mesure, l’ONU a demandé à ce que cette pause «conduise à d’autres mesures concrètes» et a réclamé «la levée de tous les obstacles» à l’acheminement de l’aide humanitaire à l’intérieur de Ghaza.
Le poste-frontière de Karam Abou Salem, qui se trouve côté israélien, est désormais l’unique point de passage pour l’aide humanitaire depuis la fermeture du poste frontalier de Rafah dès le lancement par l’armée israélienne d’une vaste offensive terrestre dans le sud de la bande de Ghaza depuis le 7 mai. A Rafah, la situation est d’ailleurs toujours aussi critique, concentrant une grande partie des frappes israéliennes. «Des chars ont tiré lundi sur des secteurs est et sud de Rafah», rapporte l’AFP.
Dans d’autres secteurs de la bande de Ghaza, les opérations se poursuivent avec intensité. «L’armée a indiqué poursuivre ses opérations dans le centre de la bande de Ghaza et être engagée dans des «combats rapprochés» avec des combattants palestiniens. Dans la ville de Ghaza, dans le nord, deux frappes aériennes ont fait cinq morts, selon des médecins » détaille l’AFP.
Le porte-parole de la Défense civile de Ghaza, Mahmoud Basal, a déclaré à la même agence que les forces d’occupation «ont mené deux frappes nocturnes sur un appartement et une maison, faisant des morts dont un enfant et un homme âgé. Le reste de la bande de Ghaza est relativement calme.»
«L'Aïd, c’est quand on retournera chez nous»
Avec ou sans pause, cet Aïd El Adha, à l’instar de l’Aïd El Fitr, aura été un cauchemar pour les Palestiniens, spécialement les habitants de la bande de Ghaza. «On n’est pas dans un état d’esprit de l’Aïd.
L’Aïd, c’est quand on retournera chez nous, quand la guerre prendra fin. Quand chaque jour il y a un martyr, ce n’est pas l’Aïd», a déclaré à l’AFP Amer Ajour, un déplacé rencontré dans la ville de Deir el-Balah, au centre de la bande de Ghaza. Avec son lot de massacres au quotidien, sa population déchirée, déchiquetée, éparpillée, déportée, Ghaza n’a certainement pas le cœur à la fête, en effet.
Au premier jour de l’Aïd El Adha, la population palestinienne a continué à compter ses morts lorsqu’une nouvelle salve de raids sauvages est venue s’abattre indistinctement sur plusieurs secteurs d’El Qita déjà lourdement endeuillés.
«Depuis les premières heures de la journée (de dimanche), l’artillerie de l’occupant n’a pas cessé de pilonner divers quartiers de la ville de Rafah, ce qui a conduit à la destruction de plusieurs habitations et à provoquer des dégâts importants au niveau des infrastructures et du réseau routier», relève l’agence palestinienne.
Malgré l’ampleur de la dévastation, la population résiliente de Ghaza a trouvé la force de marquer l’évènement en célébrant notamment la prière de l’Aïd. Les fidèles se sont résolus à accomplir l’office religieux au milieu des décombres, faute de mosquée, tous les lieux de culte de l’enclave ayant été détruits.
«Des dizaines de citoyens ont célébré la prière de l’Aïd dans différentes zones de la bande de Ghaza à même les décombres, sur les ruines de mosquées et en plein air, accompagnés de leurs enfants et petits-enfants, dans une atmosphère où il n’y avait aucun signe de joie à l’arrivée de l’Aïd, suite à l'agression en cours qui se poursuit pour le neuvième mois consécutif», souligne l’agence Wafa.
Et de noter : «Un certain nombre de familles de martyrs ont visité les tombes de leurs proches, récité la Fatiha à leur mémoire et distribué des gâteaux et des friandises aux enfants».
Des images qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrent des femmes de Ghaza réunies autour de plateaux garnis de «kaâk» et autres gâteaux orientaux dans ce qui reste de leurs maisons. Maigre signe de gaîté et de convivialité au milieu d’une montagne de gravats.
En revanche, vous ne trouverez quasiment aucune image de familles palestiniennes se permettant le luxe d’immoler un mouton comme le veut le rituel de l’Aïd El Kébir, elles qui sont confrontées depuis près de 9 mois à une famine à grande échelle. Selon le Bureau des médias à Ghaza, 3500 enfants palestiniens risquent de mourir de malnutrition.
Griffiths : Les bombardements ont transformé Ghaza en «un enfer sur terre»
Le secrétaire général adjoint des Nations unies aux Affaires humanitaires, Martin Griffiths, a déclaré que les bombardements de l’armée de l’occupation sioniste sur la bande de Ghaza depuis le 7 octobre dernier ont transformé l’enclave palestinienne assiégée «en un enfer sur terre».
Cité par l’agence de presse Wafa, Griffiths a affirmé lundi dans ses déclarations qu’il était presque impossible de fournir une aide humanitaire aux habitants de la bande de Ghaza qui sont au bord de la famine, notant que les civils et les infrastructures de la bande de Ghaza «ont été soumis à des dommages excessifs...».
Le responsable onusien a, par ailleurs, souligné que des armes continuaient d’affluer vers l’entité sioniste depuis les Etats-Unis et d’autres pays «malgré l’impact horrible de la guerre sur les civils de Ghaza».
Depuis le 7 octobre 2023, l’entité sioniste mène une agression dévastatrice contre Ghaza faisant plus de 122 000 martyrs et blessés parmi les Palestiniens, en majorité des femmes et des enfants. Outre le bilan humain, cette agression sauvage contre Ghaza se déroule dans un contexte de famine et de destruction massive.