Deux milles vingt quatre, année perdue pour la paix et la justice. D’abord, l’incroyable boucherie de Ghaza, Israël soumettant quotidiennement ce territoire et sa population à un tapis de bombes.
50 000 civils ont été massacrés, dont les deux tiers sont des femmes et des enfants, et 100 000 blessés. Ghaza, qui a perdu pratiquement toutes ses maisons et infrastructures publiques, a été livrée à la famine et aux maladies sciemment, pour que ses habitants perdent leur vitalité et leurs réflexes de résistance et soient conduits à s’exiler vers des pays voisins, ce qui permettrait le retour des colons israéliens. Le monde entier a fini par comprendre les intentions historiques des Israéliens longtemps occultées par la propagande du sionisme mondial, théorisées et mises en pratique, bout à bout, depuis 1948. L’épisode du 7 octobre a été un accélérateur du processus d’annexion totale de la Palestine, par le feu et le sang.
La justice internationale a décidé d’agir en évoquant l’intention génocidaire d’Israël et en ordonnant l’arrestation du Premier ministre, Benyamin Netanyahu, et son ministre de la Défense, Yoav Gallant. L'Assemblée générale des Nations unies a régulièrement dénoncé cette politique, mais la mise en œuvre des résolutions, du ressort du Conseil de sécurité, s’est toujours heurtée au veto américain. Malgré tout, un pas historique a été fait, même des alliés d’Israël ont fini par admettre que le moment est venu de régler la question palestinienne dans le fond, c'est-à-dire par la reconnaissance des droits de ce peuple à un Etat libre et indépendant. L’idée diplomatique de «deux Etats» a fait son chemin, quoi qu’elle rencontre constamment l’hostilité du gouvernement israélien noyauté par l’extrême droite suprémaciste et raciste dirigée par Netanyahu et l’opposition des Etats-Unis.
Ces derniers ont joué un rôle néfaste. Toute l’année 2024, ils ont fourni à Israël d'importantes quantités d'armes et de milliards de dollars qui ont servi non seulement à effacer Ghaza de la carte du Moyen-Orient, mais aussi à détruire une partie du Liban sous prétexte de mettre fin aux activités du Hezbollah après l’assassinat spectaculaire de ses principaux dirigeants. Il s’agissait aussi pour Israël de fragiliser l’Iran, son ennemi de toujours, en n’hésitant pas à intervenir sur son sol pour tuer des chefs du Hezbollah et même palestiniens. Ismaël Haniyeh, leader politique du Hamas, a été assassiné près de Téhéran par un missile israélien, et des intérêts iraniens ont été touchés même en Syrie.
Aidée par les Etats-Unis et les Européens, l’aviation israélienne a aussi ciblé le Yémen, dont la population houthie s’est solidarisée avec les Palestiniens, attaquant en mer Rouge des navires se dirigeant vers Israël et commerçant avec cet Etat. C’est dans ce contexte de guerre totale au Proche-Orient que le président Bachar Al Assad a été poussé à quitter le pouvoir et s’enfuir en Russie sous les coups de boutoir du mouvement Hayat Tahrir Al Sham, conduit par Mohamed Al Joulani, un ancien d’Al Qaïda, mais repenti depuis.
Un gouvernement de transition prépare le futur paysage politique interne et multiplie les gestes d’apaisement tant vis-à-vis de sa population que de la communauté internationale. L’objectif est de rassurer qu'aucune nouvelle dictature sanglante ne prendra le relais de l’ancienne, et que la «Syrie nouvelle» ne pourra être que pacifique, multiculturelle et libre. Après, les intentions restent les actes sur lesquels pourra peser un nouvel acteur, Donald Trump. Dès le 20 janvier, il entrera en fonction suite à son élection en novembre dernier.
Son principal dossier sera incontestablement la guerre entre la Russie et l’Ukraine, enlisée tout au long de l’année écoulée avec des pertes immenses des deux côtés, frisant le conflit nucléaire.
Alors que l’ancienne administration de Biden aidée par l’Europe et l'OTAN a poussé à la poursuite de la guerre pour faire sombrer la Russie, Donald Trump s’est prononcé pour une «possible paix» qui préserverait l’Ukraine mais sans acculer Poutine. Un exercice périlleux à mettre en pratique comme le sera sa nouvelle politique au Proche-Orient qu'il présente comme audacieuse.
A l’origine des accords d’Abraham, on prête au nouvel homme fort américain l'intention de les conforter et surtout les élargir à l’Arabie saoudite. Cela se fera s’il bride les intentions génocidaires d’Israël et accepte la solution des «deux Etats», ce qui reste improbable tant le soutien inconditionnel à Israël est ancré dans la classe politique américaine, notamment dans le camp républicain. Et tant les intérêts économiques et géostratégiques américains sont énormes dans cette région du monde. Sur tous les fronts, 2025 ne s’annonce pas avec les couleurs de la paix.