L’annonce par la Syrie qu'elle n’envisage pas, pour l’instant, de revendiquer sa réadmission au sein de la Ligue arabe lève un important obstacle à la tenue du Sommet d’Alger prévu pour le mois de novembre prochain à Alger.
Pour l'Algérie, c’est le feu vert à la poursuite des consultations avec les capitales arabes qui ont buté, entre autres, sur ce point délicat. Les contacts commencent à être fructueux et Alger, satisfaite, a invité le roi Mohammed VI pour prouver que l’enjeu de la réunification arabe dépasse tout conflit bilatéral et que d’autres Etats en conflit de voisinage pourraient s’en inspirer. De ce sommet, on attend beaucoup dans une conjoncture régionale des plus explosives depuis l’implosion de la Syrie, de l’Irak, de la Libye, la guerre au Yémen et l'avènement de l’organisation Daech. Ces conflagrations ont poussé Israël à redoubler de férocité dans son extension territoriale en Palestine, à accentuer le muselage de la population de ce territoire spolié et à étendre sa stratégie dite de «normalisation»
Celle-ci a pris une nouvelle dimension en ne se confinant plus au Proche-Orient, gagnant le Maghreb et faisant tomber le ventre mou qu’est le Maroc. S'il y a donc un objectif immédiat utile que pourrait se fixer le Sommet d’Alger, c’est de relancer le dialogue entre les souverains et chefs d’Etat qui ont perdu l’habitude de se parler et de s’écouter. La récente poignée de main de responsables palestiniens rivaux est tout un symbole.
La région a besoin de paix et de sécurité, loin de tout langage de la force qui a abondamment fait verser du sang arabe. Elle a aussi besoin que soient bannies la faim et la malnutrition affectant des millions de citoyens. Il doit être mis fin au paradoxe qu'une partie des grandes richesses en hydrocarbure de cette région est destinée à la guerre alors même que de larges populations sombrent dans la misère et le dénuement. Les peuples arabes sont peu maîtres de leur destinée, ce qui a fini par reléguer la région à la lisière de l’histoire au seul profit d'Israël, plus fort que jamais grâce au soutien occidental mais aussi des politiques de rapprochement initiées par divers pays arabes.
De ce fait, le Sommet arabe d’Alger ne pourra faire l'économie d’un diagnostic sans complaisance de tous les errements passés. L’exercice est difficile mais utile, il demande courage et surtout volonté d’aller de l’avant. La question palestinienne doit revenir au cœur des préoccupations arabes, telle qu'elle l'a été il y a quelques décennies. Chaque dirigeant devra dire ce qu il entend faire à l’avenir pour que cesse le processus de désintégration de la Palestine au profit des Israéliens. Il s’agit aussi de faire retrouver au monde arabe sa place dans le concert des nations en participant activement à la mise en place du nouvel ordre mondial qui commence à se dessiner suite à la guerre entre la Russie et l’Ukraine.
Les pays arabes ont les moyens de faire face aux autres blocs : des hydrocarbures en abondance, recherchés avidement, des moyens financiers considérables dans plusieurs Etats, des atouts géostratégiques d’importance et enfin un énorme potentiel humain, en plus de liens politiques et culturels historiques avec l’ensembles des nations du monde. Il s’agira enfin de libérer une bonne fois pour toutes les sociétés du monde arabe, de les inscrire dans la profondeur du siècle en cours en les débarrassant des archaïsmes idéologiques et en les préservant des tentations totalitaires des régimes politiques. Le premier test du virage, si tel sera la volonté des participants, ce sera à Alger au prochain Sommet arabe.