L’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) a un nouveau secrétaire général. Il s’agit de Takjout Amar, plébiscité à l’ouverture, hier à Alger, du congrès extraordinaire de l’organisation.
Est-ce le début d’une nouvelle ère pour la centrale syndicale ? L’organisation réussira-t-elle à redorer son blason ? Ces interrogations attendent des réponses concrètes de la part de la nouvelle direction de l’UGTA.
Car la confédération syndicale, fondée en février 1956 par le syndicaliste et martyr de la guerre de Libération, Aïssat Idir, a traversé de nombreux épisodes durant toute son existence.
De la participation à la Révolution algérienne (1954-1962), l’UGTA est devenue une des principales organisations de masse du régime du parti unique, avant de connaître aussi un parcours jonché de paradoxes avec l’avènement du pluralisme politique au début des années 1990.
C’est durant cette dernière période que la centrale a toujours suscité débat et polémique. Marquée par la tragédie nationale et ses grandes répercussions sur le monde de travail en Algérie, cette époque était cruciale pour l’UGTA, seul syndicat implanté alors dans tous les secteurs d’activité.
Elle était alors sollicitée pour soutenir le combat national contre le terrorisme, et pour défendre les milliers de travailleurs ayant perdu leurs emplois, en raison de la crise économique et la fermeture de dizaines d’entreprises publiques.
Cette implication a d’ailleurs coûté la vie à un de ses secrétaires généraux, Abdelhak Benhamouda, assassiné, en janvier 1997, devant le siège national de l’organisation à Alger.
Lui succédant, Abdelmadjid Sidi Saïd avait déjà du pain sur la planche. Il devait continuer à défendre les droits des travailleurs licenciés pour des raisons économiques, en plus de la remise sur les rails de l’UGTA après ce séisme de l’assassinat, par des groupes terroristes, de son premier responsable.
Nouvelle orientation
A son arrivée, Abdelmadjid Sidi Saïd, de l’avis des observateurs, a donné une nouvelle orientation à l’organisation dès le début des années 2000. Sous le régime du président Abdelaziz Bouteflika, l’homme a choisi, comme il l’a toujours affirmé, une «nouvelle forme de lutte».
Celle-ci consiste à abandonner les mouvements de grève, comme moyen de revendication, pour les remplacer par la «négociation directe avec le pouvoir pour sauvegarder les emplois» et «arracher des augmentations de salaires».
Mais cette manière de procéder a coûté beaucoup à l’UGTA. Cette dernière a perdu son influence dans les secteurs de la Fonction publique, avec notamment la montée en puissance des syndicats autonomes. Mais elle garde toujours son statut de seul représentant du monde du travail lors des réunions tripartites annuelles (gouvernement-patronat-UGTA).
La perte de crédibilité de la centrale syndicale s’est accentuée, depuis son engagement sur le terrain politique en devenant une simple organisation de soutien des mandats successifs d’Abdelaziz Bouteflika.
Cette compromission n’a fait que ternir davantage l’image de l’UGTA, qui s’est retrouvée carrément sur la touche, après l’avènement du hirak du 22 février 2019.
Sans influence sur le terrain et incapable de réaliser de grandes mobilisations, la centrale a choisi de faire profil bas. Et son secrétaire général, Abdelmadjid Sidi Saïd, se retire, invoquant des raisons de santé.
Effacement
Et c’est Salim Labatcha qui prend sa place, après le congrès du 21 juin 2019. Mais il ne fera pas long feu, comme il ne marquera pas son passage à la tête du plus vieux syndicat algérien. Jusqu’à sa démission surprise en mars dernier, l’homme était complètement effacé.
L’UGTA aussi. L’organisation s’est éclipsée de la scène. L’un des signes de cette disparition est son absence lors des festivités de commémoration officielle du double anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures et de la création de l’UGTA.
Cette attitude a fait encourir à la centrale le risque de disparition de la scène syndicale nationale…