Le PAM alerte la communauté internationale : Six semaines avant la famine à Ghaza

25/04/2024 mis à jour: 07:58
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Des enfants de Ghaza sont décédés de complications liées à la famine

L’armée israélienne a mené, hier, de nouvelles frappes meurtrières sur la bande de Ghaza, alors qu’une attaque s’annonce imminente contre Rafah après l’approbation par le Sénat américain d’une aide militaire de 13 milliards de dollars au profit de l’entité sioniste. 

Des sources hospitalières palestiniennes ont fait état de raids israéliens, tôt hier, dans les secteurs de Nousseirat (centre) et de Rafah ainsi que de tirs d’artillerie nourris dans le nord du territoire assiégé. Au total, 79 Palestiniens ont été tués en 24 heures, selon le mouvement de résistance du Hamas. Au même moment, Israël remerciait les Etats-Unis pour l’aide militaire qu’ils lui ont octroyée. 

Cette aide de 13 milliards de dollars doit notamment permettre de renforcer son bouclier antimissile «Dôme de fer», déployé à ses frontières et mis à l’épreuve lors des dernières frappes iraniennes ayant ciblé plusieurs sites israéliens. Cette aide à Israël «est un gage clair de la force de notre alliance et elle envoie un message fort à tous nos ennemis», a réagi sur X (anciennement Twitter) le chef de la diplomatie israélienne, Israël Katz. 

Cette aide pourrait également constituer le feu vert à une opération d’envergure dans la ville de Rafah où se concentre la résistance palestinienne. Le déplacement effectué, hier, au Caire par de hauts responsables sécuritaires israéliens pourrait être le signe d’une telle éventualité. Le chef d’état-major israélien, Herzi Halevy, et le directeur du Shin Bet, Ronen Bar, se sont rendus en Egypte «en préparation d’une éventuelle opération militaire à Rafah», a rapporté Yediot Aharonot. Le quotidien israélien a indiqué que Halevy et Bar ont rencontré le chef du renseignement égyptien, Abbas Kamel, et «ont discuté de l’action future à Rafah». Et ce au moment où les craintes d’une tragédie provoquée par la famine s’accentuent dans les territoires occupés. 

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a d’ailleurs appelé hier la communauté internationale à faciliter l’acheminement des aides humanitaires à Ghaza «en toute urgence». Dans une déclaration à la chaîne Al Jazeera, les responsables du PAM ont indiqué que la situation dans la bande de Ghaza «est complexe, avec des cas de faim menant à la mort». «L’aide doit être autorisée de toute urgence. Si l’aide n’est pas acheminée en quantité suffisante dans la bande de Ghaza, une famine est à craindre, s’alarme l’organisation onusienne. Nous avons enregistré un nombre croissant d’enfants souffrant de malnutrition à Ghaza.»

 La bande de Ghaza pourrait en effet dépasser le seuil de famine dans les six prochaines semaines, a évalué la même source, ajoutant que la famine dans l’ensemble de l’enclave palestinienne se rapprochait de jour en jour, après avoir confirmé mardi que la moitié de la population de Ghaza souffrait de la faim. 

Des sources palestiniennes ont révélé que 30 enfants sont morts de faim depuis le début de l’agression israélienne contre le territoire assiégé. «Nous nous rapprochons de jour en jour d’une situation de famine», a déclaré Gian Caro Cirri, directeur du PAM, bureau de Genève. Selon ce dernier, «il existe des preuves raisonnables que les trois seuils de famine, à savoir l’insécurité alimentaire, la malnutrition et la mortalité, seront dépassés dans les six prochaines semaines». 

Cirri s’exprimait lors du lancement d’un rapport du Réseau mondial contre les crises alimentaires, une alliance d’acteurs humanitaires et de développement comprenant notamment des agences des Nations unies, la Banque mondiale (BM) et l’Union européenne (UE). Il a noté que la seule façon d’éviter la famine à Ghaza était d’ «assurer des livraisons immédiates et quotidiennes de vivres. Ils (les Palestiniens) vendent leurs biens pour acheter de la nourriture. Ils sont la plupart du temps démunis», a-t-il souligné. Les Nations unies se plaignent depuis longtemps des obstacles à l’acheminement de l’aide et à sa distribution dans toute la bande de Ghaza au cours des six derniers mois. 
 

 

Un risque de famine «très élevé»

Un rapport soutenu par l’ONU et publié en mars indiquait que la famine était imminente et susceptible de survenir d’ici le mois de mai dans le nord de Ghaza et pourrait se propager à toute l’enclave d’ici juillet. Mardi soir, l’envoyé spécial américain pour les affaires humanitaires au Moyen-Orient, David Satterfield, a prévenu que le risque de famine à Ghaza «est très élevé». Satterfield a, selon la chaîne américaine El Horra, déclaré que «le risque de famine concerne toute la bande de Ghaza», dévastée par les bombardements sionistes depuis le 7 octobre 2023, soulignant que ce risque «est très élevé» dans le nord de l’enclave assiégée depuis 17 ans. L’émissaire américain a appelé, dans ce contexte, à «accroître le volume de l’aide» destinée à ceux qui en ont besoin. 

L’agence onusienne a déclaré, mardi, que 200 jours après l’agression israélienne, «la moitié de la population souffre de la faim». Le PAM a souligné que son aide n’est «qu’une goutte d’eau dans l’océan des besoins, et qu’un cessez-le-feu est nécessaire» dans l’enclave. Israël restreint l’entrée de l’aide en Territoires occupés, ce qui a conduit à des pénuries de nourriture, de médicaments et de carburant et provoqué une famine qui a coûté la vie à des enfants et à des personnes âgées dans l’enclave habitée par environ 2,3 millions de Palestiniens, dont environ deux millions de personnes déplacées à cause de l’agression. L’occupation mène une agression meurtrière contre Ghaza, qui a fait plus de 111 000 victimes entre martyrs et blessés, dont la plupart sont des femmes et des enfants, selon les données palestiniennes et onusiennes. 

Le 20 avril, le PAM a annoncé l’arrivée de seulement 392 camions chargés de nourriture depuis le début du mois, indiquant que ce nombre est «presque le même qu’en mars, mais la moitié de celui de janvier». Le bilan de l’agression israélienne contre Ghaza s’est encore alourdi hier, s’élevant à 34 262 morts et 77 229 blessés depuis le 7 octobre dernier, selon l’agence palestinienne Wafa. D’après la même source, l’armée d’occupation a commis 6 massacres au cours des dernières 24 heures. Depuis le 7 octobre 2023, l’armée sioniste mène une agression sauvage contre l’enclave palestinienne qui a entraîné des destructions massives d’infrastructures en plus d’une catastrophe humanitaire sans précédent. 
 

 

Les préparatifs de l’opération militaire sur Rafah s’accélèrent

Le gouvernement israélien dit «avancer» dans les préparatifs de son opération militaire prévue sur Rafah où, selon lui, quatre bataillons du mouvement de résistance palestinien Hamas sont regroupés. «Israël avance vers son opération ciblant le Hamas à Rafah», a déclaré hier en fin de journée un porte-parole du gouvernement, David Mencer, lors d’un point presse. Il a ajouté que «deux brigades de réservistes» avaient été  mobilisées pour des «missions défensives et tactiques dans Ghaza». Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a déclaré à plusieurs  reprises qu’Israël entendait mener un assaut contre Rafah, ville où sont réfugiés des centaines de milliers de Ghazaouis, déplacés par la guerre génocidaire menée depuis plus de 200 jours par l’occupant.

M. Abdelkrim
 

 

 

 

Amnesty : «L’échec moral»de l’ordre mondial 

L’ordre mondial construit à partir des ruines de 1945 est «sur le point de s’effondrer» en raison de l’agression sioniste contre Ghaza et de «l’échec» de la communauté internationale à mettre un terme à la violence dans l’enclave palestinienne, a déclaré hier l’ONG Amnesty International (AI). «Pour des millions de personnes dans le monde, Ghaza symbolise désormais l’échec moral total de nombreux architectes du système de l’après-Seconde Guerre mondiale», souligne AI dans un rapport annuel. La secrétaire générale d’Amnesty, Agnès Callamard, a déclaré que les Palestiniens vivaient une «version bien plus violente et destructrice» des événements de 1948, au cours de laquelle de nombreux Palestiniens ont été déplacés. Mme Callamard a déclaré que la promesse post-1945 de «plus jamais ça» – incarnée dans des documents tels que la Convention sur le génocide et la Déclaration universelle des droits de l’homme, toutes deux de 1948 – «était menacée». Le rapport d’AI affirme que les «leçons morales et juridiques» de la Seconde Guerre mondiale «ont été déchirées en un million de morceaux» en 2023. «Trop de personnes ont été plongées dans l’enfer auquel la génération de 1948 cherchait à mettre fin pour toujours», a déclaré Mme Callamard aux journalistes à Londres. «Le système international qui a été mis en place après 1948 est sur le point de s’effondrer... ces institutions ne fonctionnent pas parce qu’elles sont intentionnellement perturbées ou affaiblies par l’action d’Etats puissants», a-t-elle fait remarquer. Elle a déclaré qu’il y avait «des preuves croissantes» de crimes de guerre et un «risque irréfutable» de génocide, une question examinée par la Cour internationale de justice (CIJ) après une affaire intentée par l’Afrique du Sud contre l’entité sioniste. AI «prend très au sérieux le processus visant à déterminer si cela équivaut ou non à un génocide», a-t-elle déclaré. R. N.


 

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