Avec son expansion, le groupe des Brics représentera 45% de la population mondiale et 36% de la superficie du globe. Son PIB augmentera de 5%.
Le groupe des Brics s’est élargi et regroupera, à partir de janvier 2024, onze pays au lieu de cinq. La décision, annoncée à l’issue des travaux du 15e Sommet à Johannesburg, n’a pas étonné les observateurs avertis qui ont lu dans le choix du bloc des BRICS une expansion géopolitique certaine. Les pays BRICS ont fait le choix d’intégrer des pays membres à part entière au lieu de membres observateurs, comme ils l’avaient suggéré avant la tenue de leur sommet.
L’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, l’Iran, l’Argentine, l’Egypte et enfin l’Ethiopie sont désormais admis au club des pays émergents qui ne ferme tout de même pas la porte à d’adhésion future d’autres membres en fonction probablement de l’évolution de la situation géopolitique dans le monde, mais aussi des intérêts de chacun des membres de ce bloc se voulant rival des Etats-Unis.
«Les discussions ont été assez intenses et ne se sont pas déroulées sans problèmes», a affirmé le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, en annonçant les critères d’admission des nouveaux membres. Il cite à ce propos la condition d’avoir «du poids, de l’autorité et de la position sur la scène internationale des candidats». Le bloc Brics, qui n’est plus seulement un groupe d’intérêt économique, se donne désormais une identité politique guidée par la volonté d’engloutir des espaces dans le pré carré du bloc occidental.
L’admission de l’Arabie Saoudite, des Emirats arabes unis, de l’Egypte et de l’Argentine est loin de traduire l’idée de renforcer le critère du non- alignement. Ces pays sont des alliés historiques des Etats-Unis, mais qui cherchent aujourd’hui à sortir de la condition pure et simple de «vassalité» les enfermant dans le rôle de simples exécutants. Ils affichent depuis quelques années, notamment l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis, une volonté de peser sur l’échiquier politique international.
L’Arabie Saoudite, à travers son poids dans l’organisation OPEP+ (premier exportateur mondial de pétrole), et les Emirats en devenant une plaque tournante pour les dépôts de fonds internationaux et en ayant des investissements diversifiés dans différentes parties, du globe souvent utilisés comme moyen de pression sur les Etats, représentaient les candidats espérés par la Chine qui cherche à étendre son influence. Notons que le poids financier des deux Etats du Golfe, combiné à leur qualité de grands producteurs de pétrole, a aussi plaidé pour leur intégration aux Brics.
L’Iran et en sus d’être aussi un grand producteur de pétrole et de gaz (deuxième réserve mondiale de gaz, après la Russie, et quatrième réserves prouvées de pétrole) est également une puissance militaire et subit, avec la Russie surtout, des sanctions internationales liées à ses activités dans le nucléaire. Le premier acte de l’admission de l’Iran et l’Arabie Saoudite aux Brics, a commencé avec le rapprochement acté entre les deux Etats rivaux. Leur présence au sein de ce groupe pourrait changer la face de la région du Golfe sur le plan politique et économique. Avoir les plus importants producteurs de pétrole dans le groupe offre aux Brics la possibilité d’engager leur projet de monnaie unique, estiment des analystes.
Le choix de l’Egypte (105 millions d’habitants et siège de la Ligue arabe avec ce que cela représente comme poids diplomatique dans le monde arabe), et l’Ethiopie (123 millions d’habitants et siège de l’Union africaine) est dicté à la fois par leur position géographique et leur potentiel économique. Ils représentent en Afrique un couloir ouvert pour la circulation des marchandises à travers le canal de Suez vers l’Afrique de l’Est et du Nord. Ces deux pays représentent non seulement deux grands marchés potentiels pour les produits des pays Brics, mais avec leur situation et leurs influences politiques peuvent aider le bloc à peser en Afrique.
Le choix de l’Argentine avec ses 46 millions d’habitants, malgré sa situation économique très fragile, semble être un coup de pouce du Brésil, qui a voulu renforcer la présence de l’Amérique latine dans le bloc des pays émergents. Washington n’a pas tardé à réagir mais en minimisant l’impact de l’expansion des Brics. «Les Etats-Unis réaffirment leur conviction que les pays sont libres de choisir leurs partenaires et les groupements auxquels ils s’associent…Nous continuerons de travailler avec nos partenaires et alliés sous des formes bilatérales, régionales et multilatérales afin de renforcer notre prospérité partagée et de maintenir la paix et la sécurité mondiales», a souligné le porte-parole du département d’Etat.
Les nouveaux membres prendront exemple sur l’Inde, qui a gardé de bonnes relations avec les Etats-Unis. Ce pays prépare d’ailleurs d’accueillir le prochain sommet du G20 regroupant les pays du G7 et quelques pays émergents et en développement. Le groupe des Brics aura désormais deux autres représentants au sein de ce forum de coopération économique internationale avec l’Argentine et l’Arabie Saoudite. Avec son expansion, le groupe des Brics représentera 45% de la population mondiale et 36% de la superficie du globe. Son PIB augmentera de 5%.