Le FMI préconise que les pays «devraient faire face aux risques d’endettement aujourd’hui à l’aide de politiques budgétaires soigneusement élaborées qui protègent la croissance et les ménages vulnérables, tout en tirant parti du cycle d’assouplissement de la politique monétaire».
La dette publique mondiale a atteint 100 000 milliards de dollars, soit 93% du PIB mondial en 2024, c'est-à-dire 10 points de pourcentage de plus par rapport à 2019. Un nouveau rapport du Fonds monétaire international s’inquiète de l’augmentation de la dette publique mondiale qui risque d’atteindre 100% du PIB d’ici 2030. «Même si la dette devrait se stabiliser ou reculer dans environ deux tiers des pays du monde, elle restera largement supérieure aux prévisions établies avant la pandémie», indique ce rapport rendu public hier.
La tendance dans de nombreux pays à augmenter les dépenses publiques accentue l’incertitude entourant la politique budgétaire et les lignes rouges en matière de fiscalité se figent, estiment les analystes du FMI. «Les projections tendent systématiquement à sous-estimer les niveaux d’endettement : les ratios dette/PIB réalisés trois ans plus tard sont, en moyenne, supérieurs de 6 points de pourcentage du PIB par rapport aux projections.» Le FMI préconise que les pays «devraient faire face aux risques d’endettement aujourd’hui à l’aide de politiques budgétaires soigneusement élaborées qui protègent la croissance et les ménages vulnérables, tout en tirant parti du cycle d’assouplissement de la politique monétaire».
Les études, effectuées par l’institution financière, montrent une tendance mondiale à dépenser plus pour faire face au vieillissement de la population, aux soins de santé, pour maîtriser la transition écologique et l’adaptation au changement climatique et pour assurer la défense et la sécurité énergétique, en raison de la montée des tensions géopolitiques. «Un rééquilibrage budgétaire joue un rôle déterminant pour contenir les risques d’endettement. Dans un contexte de modération de l’inflation et de baisse des taux directeurs par les banques centrales, les pays sont mieux armés aujourd’hui pour amortir les conséquences économiques d’un durcissement budgétaire.
Un report serait à la fois coûteux et risqué puisque la correction qui s’impose prend de l’ampleur au fil du temps», indique le rapport. De même que les rééquilibrages actuels des finances publiques de 1% du PIB en moyenne sur six ans ne sont pas suffisants pour réduire sensiblement la dette ou la stabiliser. Le FMI préconise, à cet effet, un resserrement de 3,8% du PIB pour un pays moyen afin de garantir une forte probabilité de stabilisation de la dette.
Un dosage pertinent de mesures
Dans des pays comme la Chine et les Etats-Unis, les efforts de resserrement devraient être plus importants. «Le choix des mesures à prendre pour réduire le déséquilibre budgétaire implique des arbitrages», soulignent les analystes du FMI en notant que la réduction de l’investissement public occasionnera des pertes de production en pesant sur la croissance, alors que la diminution des transferts sociaux pénalisera les ménages vulnérables et accentuera les inégalités.
«Un dosage pertinent de mesures budgétaires axées sur les individus et sur la croissance s’impose, qui variera d’un pays à l’autre», estime le FMI. Dans le cas des pays avancés, la solution réside dans l’accélération des réformes des prestations sociales, la redéfinition des priorités de dépenses et l’accroissement des recettes lorsque leur fiscalité est faible.
Tandis que dans le cas des pays émergents et pays en développement, il est préconisé de profiter du potentiel important d’accroissement des recettes fiscales, en élargissant les bases d’imposition et en renforçant les capacités de l’administration fiscale, par la réduction, notamment de l’informalité, tout en consolidant les dispositifs de protection sociale et en préservant l’investissement public afin de stimuler la croissance à long terme.
Du côté des dépenses, il est nécessaire, indique le FMI, de rationnaliser la masse salariale publique. «Les rééquilibrages doivent aller de pair avec un renforcement de la gouvernance budgétaire, qui passe par des cadres à moyen terme crédibles, des conseils budgétaires indépendants et une gestion des risques rigoureuse», conseille le FMI en notant qu’une meilleure évaluation des risques budgétaires et une surveillance étroite des passifs conditionnels dans les entreprises publiques et la publication des statistiques de la dette détaillée, sont autant de préalables à la réduction de la dette non identifiée. Dans un précédent rapport, la Banque mondiale a estimé qu’une quarantaine de pays sont en situation de crise de la dette ou proche de l’être, en raison, notamment, de la hausse de leur service de la dette.