L’attaque qui a fait 90 morts et 300 blessés a eu lieu dans une zone déclarée «sûre» : Israël massacre les réfugiés d’Al Mawasi

15/07/2024 mis à jour: 04:14
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Photo : D. R.

Les habitants déplacés ont décrit des scènes d’horreur, avec des corps et des membres éparpillés sur le sol.

La frappe de samedi soir dans le camp d’Al Mawasi, situé près de Khan Younès, comptera parmi les plus meurtrières depuis le début de la guerre déclenchée par Israël contre les Palestiniens de Ghaza. Le bombardement a laissé un cratère poussiéreux, des débris, des tentes aplaties et des déplacés qui ratissent les décombres à la recherche des victimes.

Les images qui nous parviennent montrent un homme qui porte une jeune fille à bout de bras qui semble inconsciente, du sang sur le visage. Puis c’est au tour d’un jeune garçon d’être récupéré, inanimé. Des hommes sont poussés dans des voitures, sur un semblant de charrette, transportés dans une couverture ou une bâche en plastique jusqu’à l’hôpital.

La frappe a causé la mort d’au moins 90 personnes, «dont la plupart étaient des femmes et des enfants», selon les services sanitaires palestiniens, et plus de 300 blessés. Les témoins ont rapporté que des avions de chasse et des drones israéliens ont été impliqués dans l’attaque. Les avions de guerre ont frappé des tentes abritant des Palestiniens déplacés ainsi qu’une unité de distillation d’eau. 

Les habitants déplacés ont décrit des scènes d’horreur, avec des corps et des membres éparpillés sur le sol. Cheikh Youssef, un résident de la ville de Ghaza réfugié à Al Mawasi, a témoigné à la chaîne Al Jazeera : «Je ne pouvais même pas dire où j’étais ni ce qui se passait. J’ai quitté la tente et regardé autour de moi.

Toutes les tentes étaient renversées, des corps partout, des femmes âgées jetées au sol, des enfants en morceaux.» «Il y a des gens qui ont perdu des jambes ou des bras partout, c’est une scène inconcevable, qui dépasse l’imagination», raconte Mahmoud Chahine à des médias occidentaux. «Ce n’est pas normal ce qui se passe, pourquoi ça nous arrive ?» poursuit-il en pleurant. «Tout d’un coup les roquettes tombent, c’était un massacre, on a été directement visés ! Regardez-nous, nous n’avons pas d’armes, on était assis au marché, il y a des enfants ici.»

Les blessés ont été transportés vers plusieurs hôpitaux de la région, dont le complexe médical Nasser à Khan Younès, sévèrement sous-staffé et manquant d’équipements. Comble du cynisme israélien : l’armée d’occupation n’a pas manqué d’attaquer les secours en route pour aider les victimes.

Plusieurs ambulanciers ont été tués. Un responsable de l’hôpital Nasser a indiqué que les équipes médicales n’avaient plus la capacité de recevoir d’autres blessés, tandis que les unités de la Défense civile continuaient de travailler sur les opérations de recherche et de sauvetage sur le site de l’attaque.

Dans le secteur d’Al Mawasi, «il reste de nombreuses dépouilles de martyrs éparpillées dans les rues, sous les décombres et autour des tentes de déplacés que l’on ne peut atteindre en raison des tirs intenses de l’occupation», a rapporté Mahmoud Bassal, porte-parole de la Défense civile, estimant qu’il s’agissait d’un «nouveau massacre».

A l’Hôpital koweïtien de Rafah, le directeur Suhaib Al Hams  a indiqué que la plupart des blessures étaient graves, dont des amputations. Il a qualifié la situation de «vrai désastre qui survient en plein effondrement du système de santé», selon un communiqué.

Les responsables israéliens ont indiqué samedi avoir visé deux hauts dirigeants du Hamas, dont son chef militaire, prétendant qu’ils se cachaient parmi les civils. Benyamin Netanyahu, le Premier ministre israélien, a reconnu qu'il n'était «pas absolument certain» que les responsables du Hamas aient été tués dans l’attaque, mais a maintenu qu’elle avait permis «d’avancer vers la réussite de tous les objectifs». «Cela envoie un message de dissuasion à tous les intermédiaires de l’Iran et à l’Iran lui-même», a-t-il soutenu.

De son côté, le Hamas a estimé que les allégations israéliennes visaient «à masquer l'ampleur de l’effroyable massacre». Khalil El Hayya, chef adjoint du Hamas à Ghaza, a qualifié les déclarations de Netanyahu de «victoire factice», affirmant que les allégations concernant la cible des leaders du Hamas étaient fausses. Le Jihad islamique palestinien a déclaré que cette attaque confirmait que l’occupation israélienne méprisait toutes les normes et conventions internationales.

Il n’y a pas d’endroits sûrs à Ghaza

L’Unrwa, agence onusienne pour les réfugiés palestiniens, estime qu’environ 1,5 million de personnes se trouvent dans le secteur d’Al Mawasi, à Khan Younès et Rafah. Les conditions de vie y sont déplorables, ont répété des organisations humanitaires.

«Nous avons surtout vu des enfants blessés», a relaté la porte-parole de l’Unrwa, Louise Wateridge, après une visite dans cet hôpital, y faisant état «de scènes vraiment horribles». Et d’ajouter : «Il y a beaucoup de colère et de ressentiment» parmi les résidents du secteur «parce qu’on leur a dit que c’était un endroit sûr».

Le chef de la politique étrangère de l'Union européenne, Josep Borrell, a condamné ce nouveau crime. Dans un message sur les réseaux sociaux, M. Borrell a déclaré samedi que «les guerres ont des limites inscrites dans le droit international, la fin ne peut justifier tous les moyens.

Nous condamnons toute violation». Dans un autre message, M. Borrell a appelé, une fois de plus, à «des enquêtes indépendantes et à la responsabilisation, ainsi qu’à la fin de la situation effroyable des civils innocents à Ghaza».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a condamné samedi le meurtre de civils, notamment de femmes et d’enfants dans ce massacre. M. Guterres s’est dit, par l’intermédiaire de son porte-parole, Stéphane Dujarric, «choqué et attristé par la perte de vies humaines». M. Dujarric, a déclaré que les rapports montrent que l’attaque a eu lieu dans une zone densément peuplée «désignée comme zone humanitaire abritant des personnes déplacées. Cela souligne qu’il n’y a pas d’endroit sûr à Ghaza», a-t-il affirmé.

Par ailleurs, une grève était observée hier dans plusieurs gouvernorats de Cisjordanie occupée en signe d’indignation suite au massacre de civils palestiniens commis par les forces d’occupation dans la région d’Al Mawasi. La grève a paralysé tous les aspects de la vie dans les gouvernorats de Beit Lehem (sud), Tulkarem, Jénine et Qalqilya (nord), y compris les secteurs public et privé, à l’exception des établissements de santé.
 

 

 

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