Latifa Karnaouat publie son dernier roman aux éditions Ahlam : Les tribulations d’un homme humilié

01/02/2024 mis à jour: 06:07
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L’influence de l’écrivaine Ahlam Mostaghenemi y est évidente : phrase courte, formules qui font tilt. Ne s’agit-il pas d’un legs ? Toute cette littérature féminine nous renvoie finalement au travail placé sous le sceau de la résistance. « J’écris, j’écris pour décrire l’horreur, pour ne jamais oublier… », écrira Assia Djebar. Karnaout peut facilement y souscrire.

Les auteurs de langue arabe n’arrêtent pas de nous surprendre. La production littéraire de ces dernières années explore des univers insoupçonnés : l’esthétique et les thématiques proposées par ces écrivains se construisent en rupture avec les textes publiés des aînés.

Si les Abdelhamid Benhadouga, Tahar Ouettar, Djillali Khellas, Ahlam Mostaghenemi, Merzag Bagtache, Béchir Mefti, Laredj Waciny, Zaoui Amine, se sont légitimement imposés en Algérie et même dans l’espace arabe, de (très) jeunes auteurs réussissent à se faire une place au soleil.

Avocate de profession, Latifa Karnaout est de ces auteurs, qui discrètement creusent leur sillon. Choisissant de s’intéresser à des genres aussi divers tels que le roman, la nouvelle ou encore la poésie, la jeune auteure vient de publier aux éditions Ahlem, un texte foisonnant : « Allahad, El Akdar el Adhima yasnaouha el choudjaane » (« L’inconnu, les grands destins sont construits par des courageux »).

Le roman raconte l’histoire d’un homme né sans filiation, méprisé de tous. Cette vie cahotique n’a pas empêché le narrateur de s’affirmer et de ne pas succomber à cette tentation de quitter ce bas monde.

«Les questions étaient sans réponses, cherchant à me tuer chaque nuit. Mais je possédais un esprit tenace, résistant et refusant de mourir », lance-t-il au début du récit, organisé en plusieurs chapitres. Un long monologue s’installe au fil des pages.

« Ne jamais oublier »

Travaillant dans une ferme, nouant des relations, parfois difficiles, avec son entourage, il réussit à survivre. Bon an mal an. Son patron suscite chez cet homme inquiet un sentiment étrange en lui lançant un mot : « « Bounay » (« mon fils »). « T’es un homme bien Nacer, ne laisse pas les événements t’influencer, mais prend ton destin en main. 

C’est le début du chemin[…]», s’adressa le patron à ce jeune employé, troublé par tant d’attention. La suite est un long soliloque, où le héros finira par s’en sortir. Malgré les brimades, les insultes, l’individu trouve son bonheur dans l’abandon à Dieu, note le narrateur.

Des flots de sentiments envahissent le lecteur : de la pitié mais surtout du respect pour un « self-made man », qui ne s’avouera jamais vaincu.

Du sentimentalisme ? Aucunement. L’écriture de Karnaout est formidable, le niveau de maitrise de la langue est remarquable. 
L’influence de l’écrivaine Ahlam Mostaghenemi y est évidente : phrase courte, formules qui font tilt.

Ne s’agit-il pas d’un legs ? Toute cette littérature féminine nous renvoie finalement au travail placé sous le sceau de la résistance. « J’écris, j’écris pour décrire l’horreur, pour ne jamais oublier… », écrira Assia Djebar, l’auteure des Femmes d’Alger dans leur appartement. Karnaout peut facilement y souscrire. 

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