La crise russo-ukrainienne fait grimper les prix du blé

13/02/2022 mis à jour: 05:10
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Photo : D. R.Le conflit russo-ukrainien laisse planer des incertitudes sur le marché des céréales /

Un conflit armé s’accompagnerait de blocage des voies de circulation sur la mer Noire, la mer d’Arov et le détroit de Kerch, ce qui obstruerait le passage aux exportations ukrainiennes de blé.

Les répercussions économiques du conflit entre la Russie et l’Ukraine n’ont pas tardé à se manifester. Après l’impact certain sur le marché gazier, voilà que les ventes de blé tendre risquent de connaître bien des perturbations à cause de la hausse des prix intervenant juste après l’annonce de risques de guerre sur le continent européen.

Un conflit armé s’accompagnerait de blocage des voies de circulation sur la mer Noire, la mer d’Arov et le détroit de Kerch, ce qui obstruerait le passage aux exportations ukrainiennes de blé. Des manœuvres navales russes ont été annoncées vendredi en mer Noire dans un «exercice tactique» impliquant 400 militaires russes et le marché d’Euronext n’a pas tardé à réagir en affichant une progression de 4,50 euros pour le prix du blé, qui s’est vendu à 266 euros la tonne sur l’échéance de mars et à 267,25 euros la tonne pour la livraison en mai.

L’Ukraine, qui est un exportateur important de blé (cinquième mondial avec une moyenne de 17,9 millions de tonnes exportées sur la période 2017/2019), craint de ne pouvoir emprunter la voie maritime lui permettant d’acheminer ses ventes vers d’autres pays. C’est pas moins de 12% du commerce mondial de céréales qui transite par le Bosphore chaque année et dont une grande partie est destinée à la région MENA.

L’Ukraine y fait transiter pas moins de 95% de ses céréales et plus de 50% de ses exportations de blé sont acheminés vers cette même région. «L’ampleur sans précédent de ces exercices rend la navigation sur les deux mers pratiquement impossible, et limitera très probablement l’arrivée des bateaux dans les ports ukrainiens. En conséquence, les chargements dans les ports pourraient être perturbés», indique le cabinet Agritel.

Record de la demande mondiale

Ces perturbations sur le marché interviennent alors que la demande mondiale sur le blé connaît déjà des records, ce qui accentuera davantage les perspectives haussières sur le marché du blé.

Selon l’analyse d’Agritel, les mois qui viennent risquent de voir un marché du blé bien tendu, notamment avec une demande importante et une disponibilité fragile. «Cette année, c’est la demande qui est venue apporter un soutien considérable aux prix, on le sent depuis l’automne 2020. C’est la demande qui a drivé le marché et pas l’offre, comme c’était le cas auparavant. Les campagnes tendues – 2007, 2010, 2012 – étaient plutôt dues à des creux de production», expliquait en janvier dernier Nathan Cordier lors du Paris Grain Day.

La demande chinoise en pleine expansion a été le facteur booster de la demande mondiale sur le blé, le maïs, l’orge et le sorgho. Les analystes s’attendent à la persistance de cette tendance haussière de la demande qui ne serait pas conjoncturelle mais plutôt structurelle. Le prix du blé risque même d’atteindre des cimes.

Certaines projections s’attendent à une moyenne oscillant entre 250 et 300 dollars la tonne. Une mauvaise nouvelle pour les pays importateurs comme l’Algérie, faisant partie du top quatre des grands importateurs mondiaux de blé tendre. Pour échapper à la mono-source française et afin d’acheter moins cher, l’Algérie avait opté ces derniers mois pour le blé russe.

La croissance de la production de blé dans le monde a été dirigée par les exportations au niveau de la mer Noire «avec l’Ukraine qui a triplé sa production depuis 2000 (+25 Mt) et la Russie l’a doublé (+40Mt)».

Les besoins mondiaux continueront d’augmenter notamment avec l’augmentation du nombre d’habitants. La campagne 2022/2023 s’annonce tendue selon les analyses d’Agritel qui s’attend à des stocks de fin à 58,6 Mt contre 56 Mt pour la campagne 2021/22 mais en cas de problèmes de production en Europe et en Ukraine, le niveau baisserait à 47,8 Mt, un plus bas depuis 2008 ce qui aura pour incidence une «une réelle tension sur les stocks et surtout un niveau très faible du ratio stocks/utilisation».

Selon les projections de la FAO, les échanges mondiaux de blé en 2021/2022 (juillet-juin), établis à 193 millions de tonnes, devraient augmenter de 2% par rapport à 2020/2021, et ce, sous l’effet d’une hausse de la demande à l’importation au Proche-Orient qui fait suite à une diminution des récoltes dans plusieurs pays.

 

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