John Fithian, patron de l’association nationale des propriétaires de cinémas aux États-Unis : «L’avenir de Netflix passe par les salles obscures»

30/04/2022 mis à jour: 02:02
AFP
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La perte nette de 200 000 abonnés au premier trimestre annoncée la semaine dernière a affoléIl a encouragé Ted Sarandos, responsable des contenus de Netflix, à essayer de voir s’ils ne pouvaient pas également bien s’en tirer dans les cinémas

L’organisateur du festival CinemaCon de Las Vegas ne cesse de répéter que, contrairement à ce que veulent bien dire les oiseaux de mauvais augure du secteur, le géant du streaming ne va pas provoquer la disparition des salles de cinéma, des films sur grand écran et du popcorn. 

Maintenant que le box-office commence à récupérer des coups infligés par la pandémie et que Netflix vient de subir sa première perte d’abonnés depuis plus de dix ans, les cinémas pourraient même aider la plateforme à s’adapter à un avenir des plus incertains, insiste M. Fithian. Il dit avoir eu «de nombreuses discussions» avec Ted Sarandos, responsable des contenus de Netflix, pour «l’exhorter à essayer de voir s’ils ne pouvaient pas également bien s’en tirer dans les cinémas». «Je ne me préoccupe pas du cours de l’action dans un sens ou un autre. Je regarde juste les statistiques...

Même si vous faites du streaming, vous pouvez gagner plus d’argent si vous sortez vos meilleurs films d’abord dans les cinémas», lance-t-il. Sortir des films sur grand écran avant de les rendre disponibles pour ses abonnés ? L’idée semble à l’opposé du modèle économique choisi par Netflix, que les grands studios comme Disney ou Warner ont frénétiquement tenté d’émuler ces dernières années en lançant leurs propres plateformes de streaming. Après avoir loué des DVD par voie postale, Netflix avait révolutionné le marché du divertissement en débauchant à coups de milliards les stars et les talents d’Hollywood pour produire films et séries à regarder à domicile. Mais la perte nette de 200 000 abonnés au premier trimestre annoncée la semaine dernière a affolé Wall Street, où l’action Netflix a plongé de 30%.

La plateforme, qui anticipe une dégringolade de deux millions d’abonnés au deuxième trimestre, a déjà annoncé la mise en place de nouvelles stratégies pour enrayer le phénomène dont des solutions inenvisageables jusqu’alors, comme des abonnements moins chers mais avec publicité. A cette aune, la sortie de films Netflix au cinéma avant le streaming ne paraîtrait plus si saugrenue. 

Pour l’instant, la plateforme se contente de diffuser ses films dans un petit nombre de salles afin de satisfaire aux règles des Oscars et d’autres prix cinématographiques. Mais John Fithian «pense que le modèle de Netflix pourrait évoluer» vers une présence accrue dans les cinémas. 

«Nous l’espérons», souligne le président de l’organisation, qui dit représenter quelque 35 000 écrans aux Etats-Unis. Une sortie en salles permet à un film de «mieux se faire remarquer» tandis que ceux qui «vont directement en streaming se perdent», plaide-t-il. 

Amazon Prime inquiète 

L’humeur des patrons de cinémas présents à Las Vegas est sensiblement meilleure que pendant de la précédente édition du CinemaCon en août 2021, lorsque le dernier variant du Covid-19 effrayait les spectateurs et que les studios court-circuitaient les salles pour sortir leurs films directement en streaming. John Fithian s’est même payé le luxe cette semaine de proclamer que la mode consistant à mettre les films simultanément au cinéma et sur internet le même jour, inaugurée durant la pandémie, était «morte». «Ce n’est pas sorti de nulle part. J’ai dit ça après avoir consulté beaucoup de nos partenaires des studios», a-t-il précisé à l’AFP. 

De grands studios américains ont récemment annoncé qu’ils renouaient avec une «fenêtre» d’exclusivité pour les films au cinéma, même s’ils ont ramené cette période à 45 jours contre environ 90 avant la pandémie.

 Malgré cette embellie et la main tendue à Netflix, les cinémas ont encore des raisons de s’inquiéter. John Fithian se dit ainsi «très inquiet» d’un autre géant du streaming, Amazon Prime. Selon lui, le modèle économique de cette plateforme n’est pas de «gagner de l’argent avec des films» mais plutôt d’attirer le chaland pour qu’il y «fasse ses courses et passe par son service de livraison». Amazon Prime vient de racheter pour 8,5 milliards de dollars les studios MGM, qui produisent notamment la franchise James Bond. 

Si Amazon Prime veut ainsi soustraire des films aux salles de cinéma «pour ne les diffuser qu’à domicile, ils réduisent le choix des consommateurs ainsi que la concurrence», déplore John Fithian. De son côté, Apple TV+ est devenu le mois dernier le premier service de vidéo à la demande à remporter l’Oscar suprême du meilleur long métrage pour «CODA». Une année cinématographique jugée tout simplement «très bizarre» par M. Fithian. 

(La perte nette de 200 000 abonnés au premier trimestre annoncée la semaine dernière a affolé Wall Street, où l’action Netflix a plongé de 30%).  

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