A mesure que les forces israéliennes pénètrent plus profondément dans le sud du Liban, les échanges de tirs le long de la Ligne bleue, cette frontière temporaire définie par l’ONU, se multiplient.
Alors qu’Israël intensifie ses frappes contre le Liban, le spectre d’une crise humanitaire, sanitaire et communautaire se profile. Israël, qui a annoncé hier l’élargissement de son offensive terrestre au Pays du Cèdre, a déployé des troupes supplémentaires dans le sud du Liban, appelant à l’évacuation des habitants de la zone côtière. Simultanément, les forces d’occupation israéliennes ont pilonné les faubourgs sud de Beyrouth, bastion chiite, tandis que le Hezbollah ripostait par une série de tirs de missiles en direction du nord d’Israël.
L’armée d’occupation israélienne a annoncé hier avoir tué Souhail Hussein Husseini, qu’elle présente comme «le commandant du quartier général du Hezbollah», dans une frappe visant la banlieue de Beyrouth. A mesure que les forces israéliennes pénètrent plus profondément dans le sud du Liban, les échanges de tirs le long de la Ligne bleue, cette frontière temporaire définie par l’ONU, se multiplient.
Le général Aroldo Lazaro, commandant de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), et Jeanine Hennis-Plasschaert, coordinatrice spéciale de l’ONU pour le Liban, ont averti qu’une solution négociée est la seule voie possible pour restaurer la stabilité régionale. «Trop de vies ont été perdues, déracinées et dévastées», ont-ils déclaré, soulignant que «l’impact humanitaire de cette campagne militaire est absolument catastrophique».
L’Union européenne, par la voix de son chef de la diplomatie, Josep Borell, a une nouvelle fois exhorté à un cessez-le-feu, appel renouvelé à l’occasion d’un discours devant le Parlement européen. Rappelant que les affrontements ont déjà «forcé 20% de la population libanaise à se déplacer», il a dit voir dans le Liban un «pays très instable» frappé par une «faiblesse institutionnelle depuis des décennies», situation dans laquelle «les élites ont une énorme responsabilité».
«Sans un compromis fort, sans réforme politique au sein de la société libanaise, conduite par les Libanais, rien ne peut se passer», a analysé M. Borrell, ajoutant que «la classe politique doit prendre le contrôle du pays», alors que la Présidence est vacante depuis deux ans.
La perspective d’un cessez-le-feu est de plus en plus lointaine. Depuis que les Etats-Unis et la France ont proposé un cessez-le-feu de 21 jours pour ouvrir la voie à des négociations plus larges, l’initiative n’a trouvé aucun écho. Israël a catégoriquement rejeté l’offre, prétextant vouloir un désarmement complet du Hezbollah. Pour l’instant, la diplomatie paraît paralysée et les armes parlent.
Le Hezbollah, par la voix de son numéro deux, Naim Qassem, a réaffirmé la capacité de l’organisation à résister à l’offensive israélienne, qualifiant de «mensonges» les affirmations sur une prétendue faiblesse de ses forces. Dans un discours télévisé, Qassem a martelé que «la douleur des Israéliens ne cesse d’augmenter» et que son organisation est prête à poursuivre sa riposte.
Il a également fustigé les tentatives israéliennes et occidentales d’intimider le Hezbollah après l’assassinat de son leader Hassan Nasrallah, saluant la résistance continue contre l’occupation sioniste. Il a, par ailleurs, affirmé soutenir les efforts de la classe politique au Liban, en vue d’un cessez-le-feu. «Nous soutenons les efforts politiques menés par le président du Parlement Nabih Berri, qui visent en priorité un cessez-le-feu», a-t-il déclaré lors d’une allocution diffusée par la télévision du mouvement Al Manar.
Réfutant tout chaos dans ses rangs, Naïm Qassem, qui a automatiquement pris la tête du mouvement à la mort de Hassan Nasrallah, le 27 septembre, a assuré que la direction du Hezbollah était «parfaitement organisée», tout en admettant que les frappes israéliennes étaient «douloureuses». «Nos capacités sont bonnes», a-t-il insisté.
Près de 20% de la population déplacée
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a tiré la sonnette d’alarme face à une situation sanitaire alarmante. Ian Clarke, directeur adjoint des opérations d’urgence de l’OMS pour le Liban, a averti depuis Beyrouth que les conditions de promiscuité dans les abris de fortune et la fermeture de plusieurs hôpitaux augmentent considérablement le risque d’épidémies. «Nous faisons face à un risque accru de flambées de maladies, telles que la diarrhée aiguë, l’hépatite A et plusieurs maladies évitables par la vaccination», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à Genève. A ce jour, cinq hôpitaux libanais ont cessé de fonctionner et quatre autres ne sont que partiellement opérationnels, conséquence directe des bombardements israéliens.
Cette nouvelle guerre au Liban, entrée dans sa deuxième semaine, a déjà causé la mort de plus de 1100 personnes et a forcé près d’un million de Libanais à fuir leurs foyers. D’après le Premier ministre libanais, NajibMikati, près de 20% de la population libanaise sont aujourd’hui déplacés, un chiffre qui ne cesse de croître au fil des jours. En quinze jours, le visage de Beyrouth s’est transformé : les rues sont saturées, la circulation infernale et les déchets s’amoncellent. Des dizaines de milliers de personnes ont convergé vers la capitale, où elles s’entassent dans des écoles, des gymnases, ou dorment même dans la rue.
L’afflux massif de déplacés, en particulier à Beyrouth, accentue les tensions et provoque des scènes de panique dans une société libanaise toujours marquée par les divisions communautaires. Alors que des familles fuient les bombardements israéliens sur la banlieue sud, la capitale est confrontée à une vague de méfiance à l’égard de ces nouveaux arrivants. Le spectre des tensions intercommunautaires, jamais totalement éteint depuis la guerre civile, resurgit avec force.
Dans ce petit pays multiconfessionnel de six millions d’habitants, où les plaies de la guerre civile restent béantes, la peur et la suspicion s’installent. Les frappes israéliennes, concentrées sur les bastions chiites, visent désormais des déplacés installés hors de ces zones. A Baadaran, village druze dans la montagne, l’inquiétude grandit. «Au début, les gens louaient des maisons à n’importe qui», explique Imad, un habitant de 68 ans, selon un compte-rendu de l’AFP. «Mais aujourd’hui, ils sont beaucoup plus prudents.»
A Beyrouth, certains déplacés ont investi des bâtiments vides, à la recherche d'un abri. Cette situation ravive de douloureuses réminiscences des années 1970 et 1980, lorsque des milices s'emparaient de propriétés pour les redistribuer à leur communauté. «Nous avons déjà vécu cela», rappelle un résident à l’AFP. «Certains ont mis plus de dix ans à récupérer leur maison.
C’est pour cela que les gens paniquent. C’est déjà arrivé, cela pourrait arriver de nouveau.» La police, tout en assurant qu’un «très petit nombre» de déplacés ont occupé des propriétés privées, tente de contenir les tensions en procédant à leur évacuation tout en cherchant des solutions d’hébergement. Dans un pays déjà épuisé par les crises économiques et politiques, les divisions, encore à peine contenues, réapparaissent, et la peur que l’histoire se répète est dans tous les esprits.
34 membres du Croissant-Rouge palestinien morts depuis le 7 octobre
Au total, 34 membres de la Société du Croissant-Rouge palestinien (PRCS) sont tombés en martyrs depuis le début de la guerre génocidaire sioniste à Ghaza, il y a un an, a indiqué la porte-parole de l’organisation humanitaire, Nebal Farsakh. «Les 12 derniers mois étaient particulièrement durs pour les habitants de Ghaza, tant sur le plan humanitaire que pour ceux qui travaillent dans les secteurs de la santé et de la médecine», a déclaré Nebal Farsakh, citée par des médias, révélant que «34 membres de la Société du Croissant-Rouge palestinien sont tombés en martyrs depuis le début de la guerre en cours à Ghaza».
La principale cible de l’armée sioniste, a-t-elle expliqué, a été les hôpitaux, les établissements médicaux et les professionnels de santé. «L’occupation a mis hors service l’hôpital Al Qods de Ghaza et l’hôpital Al Amal, mais nous avons réussi à rétablir les services dans les deux. Aujourd’hui, cependant, nous sommes confrontés à la menace d’une nouvelle fermeture des hôpitaux en raison du refus de l’occupation d’autoriser la livraison de pièces de rechange pour le générateur», a déclaré la responsable.
Le PRCS a également déclaré sur les réseaux sociaux que l’entité sioniste ciblait ses travailleurs même s’ils portaient l’emblème du Croissant-Rouge et accomplissaient leurs tâches. «Alors que nous commémorons une année de guerre continue dans la bande de Ghaza, nous nous souvenons aujourd’hui des héros du travail humanitaire. 19 employés et bénévoles de la Société du Croissant-Rouge palestinien ont été tués alors qu’ils accomplissaient leur mission humanitaire et qu’ils portaient l’emblème du Croissant-Rouge, censé assurer leur protection», a-t-elle indiqué.